Janvier 1901
Semaine du 1er au 6 janvier 1901
Mardi 1er janvier 1901
Nous franchissons le seuil du XXe siècle dans l’église des Pères Jésuites d’Angers où on célèbre la messe de minuit ; nous communions. Dans la journée, nombreuses visites du jour de l’an.
Mercredi 2 janvier 1901
Rien de saillant ; je reçois et fais quelques visites.
Jeudi 3 janvier 1901
Départ de Philomène pour Le Mans. Nous l’accompagnons à la gare.
Vendredi 4 janvier 1901
Je rencontre M. Gallet qui me propose de me faire entrer à la conférence Saint Louis[1] : j’accepte. Il me propose aussi de me faire entrer dans la jeunesse catholique dont il est président à Angers. Après m’être informé de l’esprit de cette ligue et avoir demandé si on pouvait en faire partie sans abandonner ses convictions royalistes, et sur la réponse affirmative de M. Gallet, j’accepte d’en faire partie.
Samedi 5 janvier 1901
Rien de saillant.
Dimanche 6 janvier 1901
Visites de M. F. Delahaye et de MM. Gavouyère[2], le soir Papa et Maman vont à la soirée Bazin[3].
Semaine du 7 au 13 janvier 1901
Lundi 7 janvier 1901
Nous assistons à Saint-Laud au mariage de Mlle Elisabeth Bazin, fille de René Bazin, avec M. Antoine Sainte-Marie Perrin, de Lyon[4] ; le mariage est béni par Mgr Rumeau[5] ; beau discours de Mgr. Il neige abondamment et le thermomètre reste toute la journée entre 5° et 6° au-dessous de 0°.
Mardi 8 janvier 1901
Le froid diminue ; je vais cependant patiner dans les prairies du Bon Pasteur.
Mercredi 9 janvier 1901
Rien de saillant. Cours d’agriculture.
Jeudi 10 janvier 1901
Je vais m’entendre avec M. Letournel au sujet du cours de danse.
Vendredi 11 janvier 1901
J’assiste à l’Université à la conférence de Mgr Rumeau sur la lettre de Léon XIII au cardinal Richard au sujet du projet de loi sur le droit d’association.
Samedi 12 janvier 1901
Rien de saillant.
Dimanche 13 janvier 1901
Rien de saillant.
Semaine du 14 au 20 janvier 1901
Lundi 14 janvier 1901
Idem.
Mardi 15 janvier 1901
Nous assistons à Saint-Joseph au mariage de René Bazin fils, fils de l’auteur de La terre qui meurt, avec Mlle Madeleine Gain[6].

Mercredi 16 janvier 1901
Cours de viticulture de M. Bouchard.
Jeudi 17 janvier 1901
Premier cours de danse chez Monsieur Letournel avec Mlles : de la Villeliot, Mongazon, Estève de Bosch, Guilhaut, de Moulis, MM. Vachez, Gayon, Bazin, Gazeau, de Porcaro, Roussier, Parage, La Roche et moi. J’apprends la mort de M. le chanoine Boullay (dit Pous-Pous), directeur de Sainte-Croix du Mans, survenue avant-hier.
Vendredi 18 janvier 1901
Second cours de danse avec les mêmes personnes et en plus M. Dauge et sa sœur et Mlle Chenaut.
Samedi 19 janvier 1901
J’assiste le soir à l’université à la conférence de Mgr Favier, évêque de Pékin[7], sur le siège du Peï Tsang[8] et sur l’enseigne de vaisseau Paul Henry[9].
Mgr Rumeau souhaite la bienvenue à Mgr Favier, puis René Bazin raconte la vie de Paul Henry jusqu’au moment de son arrivée à Pékin au commencement de juin 1900. Puis Mgr Favier, venu à Angers pour remettre à M. Paul Henry, professeur à la Faculté catholique de droit et père de l’enseigne de vaisseau, le drapeau français qui flottait sur le Peï Tsang pendant le siège et que Paul Henry avait planté lui-même (le drapeau troué par les balles et un peu décoloré flottait sur l’estrade de la salle de conférence, un peu au-dessus du fauteuil du conférencier), raconte ce mémorable siège qui dura tes premiers jours de juin au 16 août 1900 ; il raconte les cruautés des Boxers, leurs attaques réitérées dans la direction du prince Tuan, parle des milliers d’obus, des millions de balles, des pots à feu, du pétrole, des biscaïens qui tombèrent sur le Peï Tsang, des mines qui firent tant de morts ; il met au courant des détails de la défense, du courage de Paul Henry ; il raconte en termes émouvants sa mort le 30 juillet et enfin la délivrance le 16 août par les Français et les Japonais de l’armée internationale au moment où les malheureux assiégés du Peï Tsang, réduits par la mort d’un tiers environ des défenseurs, étaient rationnés à deux onces d’une nourriture infecte par homme et par jour, et étaient sur le point de mourir de faim !
L’évêque de Pékin s’exprime dans un langage familier et émouvant qui a été coupé à diverses reprises par de frénétiques applaudissements.
Dimanche 20 janvier 1901
Rien de saillant ; je fais plusieurs visites.
Semaine du 21 au 27 janvier 1901
†Lundi 21 janvier 1901
Je suis admis à la Conférence Saint Louis ; première séance à laquelle j’assiste.
Mardi 22 janvier 1901
Rien de saillant.
Mercredi 23 janvier 1901
J’apprends la mort de la reine d’Angleterre survenue hier et l’avènement du nouveau roi[10]. Papa part à midi pour le Roussillon. Nombreuses visites à la maison.
Jeudi 24 janvier 1901
Troisième cours de danse ; le soir je vais prendre le thé chez De Bréon[11].
Vendredi 25 janvier 1901
Quatrième cours de danse.
Samedi 26 janvier 1901
Rien de saillant.
Dimanche 27 janvier 1901
Je passe l’après-midi chez J. Hervé-Bazin[12], où on prend le thé, on danse et on joue aux cartes. Maman, qui a la fièvre, fait appeler le docteur Saurier qui constate qu’elle a une angine
Semaine du 28 au 31 janvier 1901
Lundi 28 janvier 1901
Maman continue à avoir la fièvre ; son angine va un peu mieux.
Mardi 29 janvier 1901
Philomène vient passer la journée à Angers. Papa et Bonne Maman arrivent le soir à 5 heures.
Mercredi 30 janvier 1901
Cours de viticulture de M. Bouchard. Le soir je vais dîner chez M Buston[13]. Nous étions treize à table ; je ne m’en inquiète pas, réservant mes soucis pour des sujets plus sérieux.
Jeudi 31 janvier 1901
Maman se lève pour la première fois depuis samedi. 5e cours de danse.
Février 1901
Semaine du 1er au 3 février 1901
Vendredi 1er février 1901
6e cours de danse. Rien de saillant.
Samedi 2 février 1901
Rien de saillant.
Dimanche 3 février 1901
J’assiste matin à la messe de la Congrégation à l’Université. J’y renouvelle ma consécration de congréganiste[14].
Semaine du 4 au 10 février 1901
Lundi 4 février 1901
Rien de saillant.
Mardi 5 février 1901
Idem.
Mercredi 6 février 1901
Idem.
Jeudi 7 février 1901
Je vais déposer une carte à tout hasard chez Mme du Puy[15] où on donne un bal le 8 ; je ne suis pas invité.
Vendredi 8 février 1901
J’attends toute la journée mon invitation qui n’arrive pas ; j’en fais mon deuil.
Samedi 9 février 1901
J’apprends que je n’ai pas été invité parce que la famille du Puy n’est pas en relations avec la mienne.
Le soir, à 6h, je jette un flacon d’encre sur une affiche du discours de Waldeck-Rousseau contre les Congrégations[16] ; la bouteille se casse sans tacher l’affiche. Mais au même moment, 3 agents de la sûreté en civil ouvrent une porte dérobée, se précipitent sur moi, m’arrêtent et m’amènent dans une cuisine qui se trouvait derrière cette porte, située derrière le jardin de la Préfecture, boulevard du roi René. On arrête en même temps Vachez le plus jeune[17] et 3 messieurs qui se trouvaient près de moi ; on les relâche presque aussitôt.
Et mais après m’avoir fait décliner mes nom et qualité, on me mène devant le préfet, M. de Joly[18], qui me reçoit dans son cabinet et me sermonne sur ce qu’il appelle mon enfantillage ; puis il me fait mettre en liberté provisoire et les agents qui, sans son intervention, m’auraient mené passer la nuit au violon, me ramènent à la maison.
Dimanche 10 février 1901
J’attends mon assignation qui n’arrive pas.
Semaine du 11 au 17 février 1901
Lundi 11 février 1901
Rien encore. Nous passons la soirée chez Mme Loir-Mongazon[19].
Mardi 12 février 1901
Rien de saillant.
Mercredi 13 février 1901
On me signale un article du Patriote de l’Ouest[20] qui, sans me nommer, parle de l’affiche que j’ai voulu maculer et prétend que j’ai fait au préfet « de pleurnichardes excuses » ; j’écris au Patriote pour protester contre cette expression.
Jeudi 14 février 1901
Je vais raconter à M. Delahaye l’affaire de l’affiche et du Patriote. Il m’engage à ne pas pousser les choses plus loin.
Vendredi 15 février 1901
Le Patriote ne publie que ma lettre ; comme je n’étais pas nommé, je ne puis pas l’y obliger. Le soir, à 9h, nous recevons une quarantaine d’invités ; fort jolie soirée ; un artiste comique, M. Marcon, débite d’amusantes chansonnettes. On danse jusqu’à près de 3h du matin avec force visites au buffet.
Samedi 16 février 1901
Je vais patiner pendant 2 heures sur les prés du Bon Pasteur.
Dimanche 17 février 1901
Rien de saillant.
Semaine du 18 au 24 février 1901
Lundi 18 février 1901
Le matin, je vais à bicyclette à Bellouailles où le curé, M. Prud’homme, insiste pour me retenir à déjeuner. Je ne puis accepter à cause de Papa et de Maman qui m’attendent ; le soir, je vais patiner sur les prés de Saint-Serge ; ensuite, je vais avec Papa faire une visite de digestion à Mme Mongazon.
Mardi 19 février 1901
Je vais patiner au Bon Pasteur, après être allé le matin à la Membrolle à bicyclette.
Mercredi 20 février 1901
Le matin, j’entends la messe des cendres à l’Université. Le soir cours de M. Bouchard. Ensuite, je reçois avec Maman des visites au salon.
Jeudi 21 février 1901
Je vais patiner au Bon Pasteur. Le soir, après la réunion de la Congrégation, le comte de Saint-Pern[21] m’engage à assister à la réunion de la commission des patronages ; j’y assiste et, sur les instances de M. de Monti de Rezé[22], président du patronage de Saint-Serge, je me décide à faire partie de la direction de ce patronage. À la Commission, on discute les moyens d’établir un cours de dessin pour les apprentis concurrent du cours officiel qui est établi dans la matinée du dimanche et empêche les jeunes gens qui le suivent d’assister à la messe. Le projet de secours étant adopté en principe, on discute le détail : professeur, local finances, etc.
Vendredi 22 février 1901
9e cours de danse. Papa réussit à voir le directeur du Patriote de l’Ouest[23] qui consent, en principe, à rectifier l’expression de pleurnichardes excuses qui l’a mise à propos de l’affaire de l’affiche. Il avoue confidentiellement à Papa que, s’il n’a pas publié ma lettre, c’est qu’il l’a montrée au préfet et que celui-ci, craignant que des socialistes le prennent à parti pour avoir relâché un jeune homme de bonne famille, de la Faculté catholique et non repentant, ne se soucie pas de voir ma lettre publiée. Maman écrit au rédacteur en chef pour lui dire de rectifier sans mettre le préfet en cause. Le soir, conférence du comte du Réau[24] sur le mouvement angevin pour la défense du Pape en 1860.
Samedi 23 février 1901
Je vais patiner au Bon Pasteur et je vais à bicyclette sur la glace. Ensuite, je vais avec Papa trouver le rédacteur en chef du Patriote et il est entendu qu’il rectifiera sans mettre le préfet en cause.
Dimanche 24 février 1901
Je vais passer une partie de l’après-midi au patronage Saint-Serge où je surveille et fais amuser les enfants (Quel acte de dévouement !).
Semaine du 25 au 28 février 1901
Lundi 25 février 1901
Le soir, j’assiste à la salle des Quinconces à une conférence de Mr Augouard, vicaire apostolique de l’Oubanghi[25]. Mgr Rumeau, puis le R. P. Le Tallec lui souhaitent la bienvenue. Conférence très intéressante sur les mœurs des anthropophages de l’Oubanghi et sur les progrès du christianisme et de la civilisation dans ces contrées.
Mardi 26 février 1901
Rien de saillant.
Mercredi 27 février 1901
Je reçois plusieurs visites au salon après avoir suivi le cours de viticulture de M. Bouchard.
Jeudi 28 février 1901
10e cours de danse, avec cotillon. Le soirs conférence Saint Louis ; belle conférence de Normand d’Authon[26] sur la liberté d’enseignement. Et vote des 3 vœux suivants :
1° Toute personne, sous certaines garanties de capacité, aura le droit de fonder un établissement d’enseignement.
2° L’Etat devra distribuer également entre établissements officiels et établissements libres subventions et bourses.
3° Liberté absolue des programmes et libre collation des diplômes.
Ces 3 vœux seront portés à la réunion annuelle de la jeunesse catholique de l’Ouest à Saumur le 3 mars.
Mars 1901
Semaine du 1er au 3 mars 1901
Vendredi 1er mars 1901
11e cours de danse. Le matin j’assiste à l’Université à la messe du premier vendredi du mois de la congrégation.
Samedi 2 mars 1901
Le Patriote insère enfin la note rectificative à son article du 12 février. Nous apprenons la naissance et la mort de la fille de M. Maurice Gavouyère à Rennes[27].
Dimanche 3 mars 1901
Je vais passer l’après-midi au patronage Saint-Serge.
Semaine du 4 au 10 mars 1901
Lundi 4 mars 1901
À la conférence Saint Louis Conférence de M. de Ponnat[28] sur « Le vin et son rôle social en France ». Discussion qui se prolonge jusqu’à 10 h.
Mardi 5 mars 1901
Rien de saillant.
Mercredi 6 mars 1901
Papa et Maman font beaucoup de visites ; j’assiste aux cours de viticulture ; ensuite, je vais à la bibliothèque de la ville faire des recherches sur les combattants de Fontenoy ; l’heure de la fermeture de la bibliothèque arrive presque aussitôt ; je viendrai un autre jour continuer mes recherches.
Jeudi 7 mars 1901
Je me réunis avec MM. La Roche, Bazin et Parage, d’abord chez Letournel puis à l’Université pour décider les figures que nous présenterons ensemble au cotillon de demain.
Vendredi 8 mars 1901
Dernier cours de dansa ; il dure de 4h ½ à 7h ¾. Le cotillon, que je conduis en terminant avec Mlle de la Villebiot[29], est très réussi.
Samedi 9 mars 1901
Ce matin, M. Baugas[30] est malade et comme il devait faire les deux cours, par suite de l’absence de M. Coulbault parti pour Chinon à l’occasion de son mariage, il n’y a aucun cours. J’en profite pour faire avec Jacques Hervé-Bazin une jolie promenade à bicyclette. Nous allons chez sa sœur Mme Barthélémy au château de la Haye Joulin.
Dimanche 10 mars 1901
J’assiste au cirque à la conférence de M. Hubert Valleraux sur le droit d’association ; conférence très documentée, très claire, mais pas très éloquente. Ensuite, je vais au patronage Saint-Serge.
Semaine du 11 au 17 mars 1901
Lundi 11 mars 1901
Nous refusons une invitation de M. Gontard de Launay[31] pour mardi soir (demain), ayant déjà accepté une invitation à dîner chez M. Courtois pour le même jour. Le soir je vais à la Conférence Saint-Louis où M. René Bazin nous lit le premier chapitre du nouveau roman sur l’Alsace qu’il va faire paraître dans la Revue des Deux-mondes[32] ; autant que je puisse en juger par un premier chapitre, ce roman diffère un peu des précédents ouvrages de René Bazin. Ce n’est plus l’étude d’une classe particulière d’habitants d’un pays ; c’est plutôt l’étude de l’état d’âme d’un pays tout entier ; de plus, la fibre patriotique que René Bazin fait vibrer à propos de la malheureuse province qui nous a été ravie est d’un excellent effet.
Mardi 12 mars 1901
Le matin, profitant de la maladie de MM. Jac et Baugas je fais une longue promenade à bicyclette, 3 h de promenade (8h10 à 11h10) et 40 kilomètres de trajet ; je vais d’Angers à Corné (15 km), de Corné sur la Loire à 2 km de Saint-Mathurin (5 km ½) ; de là, je rentre à Angers par La Bohalle, La Daguenière, et La Pyramide (18 à 19 km). Le soir, je vais dîner chez M. Courtois.
Mercredi 13 mars 1901
Je reçois quelques visites au salon avec Maman.
Jeudi 14 mars 1901
Je vais à l’inspection d’Académie retirer mon diplôme de bachelier ès lettres philosophie.
Le soir, congrégation.
Vendredi 15 mars 1901
J’assiste à la conférence de droit civil de M. Jac.
Samedi 16 mars 1901
Rien de saillant. Le soir, leçon d’escrime et conférence Saint-Vincent de Paul
Dimanche 17 mars 1901
Je vais voir Jacques Hervé-Bazin et Jacques des Loges[33]. Le soir j’assiste à la représentation du Voyage de M. Perrichon, comédie de la Biche en 4 actes au patronage Saint-Joseph.
Semaine du 18 au 24 mars 1901
Lundi 18 mars 1901
Je passe à l’Université un examen préparatoire de droit ; j’obtiens : une rouge pour le droit romain (M. Gavouyère), une rouge pour l’histoire du droit (M. de la Bigne de Villeneuve) et une blanche-rouge pour le droit civil (M. Jac). Si cette moyenne se maintient à mon examen d’économie politique de demain, je serai reçu.
Le soir je vais à la conférence Saint-Louis où M. Grimaut lit une courte étude sur la Tunisie (j’y fais quelques observations) ; et M. Gaudineau lit un travail sur la loi, actuellement en discussion, des associations, et sur la manière dont elle est discutée à la Chambre[34].
Mardi 19 mars 1901
Marie-Thérèse, fatiguée depuis deux jours, est obligée de garder le lit à cause d’une angine. Le soir, je passe mon examen d’économie politique (M. Baugas) ; j’obtiens une rouge-blanche. Je suis donc reçu pour l’ensemble, puisqu’il suffit pour être reçu d’avoir une moyenne de rouge. Après l’examen, je vais faire une visite par carte à Madame Courtois.
Mercredi 20 mars 1901
C’est aujourd’hui Bonne Maman[35] qu’une grippe oblige à garder le lit. Cela fait deux malades en même temps. Papa va chercher une sœur garde-malade de l’Espérance. Maman reçoit quelques visites au petit salon.
Jeudi 21 mars 1901
Premier jour du printemps ; cela se reconnaît encore mieux à la température et à l’état du ciel qu’au calendrier ; aussi je profite du beau temps pour aller faire une belle promenade à bicyclette : Angers à Saint-Georges-sur-Loire, retour par La Possonnière, Savennières, Bouchemaine ; 42 km ; départ à 1h ½, retour à 5h avec de fréquents arrêts. Bonne maman et Marie-Thérèse vont mieux, mais plusieurs jours de lit et de précaution leur seront nécessaires.
Le soir, alerte, parce que la cuisinière a vu des individus de mauvaise mine prendre les dimensions de la porte ; Papa avertit la police ; nous barricadons toutes les portes etc… Et la nuit se passe sans que nous ayons à faire usage des armes que nous avions préparées.
Vendredi 22 mars 1901
Rien de saillant ; le soir à 5h, conférence de droit civil.
Samedi 23 mars 1901
Leçon d’allemand et leçon d’escrime ; le soir, conférence de Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 24 mars 1901
Je passe l’après-midi au patronage Saint-Serge ; le soir, j’assiste à la chapelle de l’internat de la rue Rabelais au sermon de l’abbé Crosnier, à la bénédiction et ensuite au punch en l’honneur de la fête de la congrégation de Notre-Dame de l’Annonciation qui est demain.
Semaine du 25 au 31 mars 1901
Lundi 25 mars1901
Le soir, conférence Saint-Louis ; après la conférence, Joseph Vachez m’amène dans sa chambre où il m’offre une cigarette et des biscuits.
Mardi 26 mars 1901
Le matin, premier jour de la retraite de l’Université. J’écris à M. Féron-Vrau, directeur de La Croix[36], pour lui demander de me laisser de temps en temps écrire dans son journal une chronique sur les œuvres d’étudiants de l’Université catholique d’Angers.
Papa va voir Philomène au Mans.
Mercredi 27 mars 1901
Je reçois quelques visites au petit salon avec Maman.
Jeudi 28 mars 1901
Rien de saillant. L’après-midi, je vais consulter un ouvrage à la bibliothèque de la ville.
Vendredi 29 mars 1901
Le matin, à 8h, je fais ma communion pascale à la chapelle de l’internat de l’Université. L’après-midi, je fais féliciter J. des Loges qui vient d’être reçu à Caen à l’oral dans son baccalauréat de philosophie. Ensuite, promenade à bécane aux Ponts-de-Cé où il y a une crue de la Loire. Le soirs conférence d’Étienne Lamy[37] sur la femme et l’enseignement de l’État. M. Lamy nous montre d’abord les hommes s’éloignant de plus en plus de toute morale sous l’influence de l’enseignement athée et destinée à glisser rapidement dans le socialisme, dont les partisans sont déjà légion dans l’Université, si un frein ne vient pas les arrêter. Ce frein, ce sont les femmes qui peuvent et doivent l’être, car, mieux que les hommes, elles ont su résister à l’athéisme et à ses conséquences. Mais, pour que la femme ait sur l’homme assez d’influence pour l’arracher à ces doctrines fatales, il faut développer son instruction. L’éducation actuelle de la femme est celle d’un temps de paix ; il lui faut l’éducation d’un temps de guerre ; et de peur qu’elle n’aille chercher la science dans les établissements de l’État ou les fausses doctrines l’auraient corrompue, les établissements catholiques de jeunes filles doivent étendre leur programme.
Toutes les idées de M. Lamy s’enchaînent d’une façon merveilleuse : pas d’artifices mais des idées. Cette conférence, présidée par Mgr Rumeau qui adresse quelques paroles de bienvenue au conférencier, est une des plus belles qui aient été prononcées à l’université.
Samedi 30 mars 1901
Je reçois la réponse de M. Féron-Vrau ; il accepte ma proposition ; je prépare sur la conférence d’Étienne Lamy un article que je lui enverrai demain. Il me demande dans sa lettre de lui envoyer régulièrement les publications concernant l’Université. L’après-midi je vais me renseigner sur ces publications ; je vois que celle qui pourra le mieux satisfaire est L’Écho régional. Le soir, leçon d’allemand, escrime et Conférence Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 31 mars 1901
Le matin, nous assistons au long office des rameaux à Saint-Joseph. Le soir, je recopie mon article d’hier sur la conférence Lamy et je l’envoie à M. Féron-Vrau à qui j’écris au sujet du Bulletin.
Avril 1901
Semaine du 1er au 7 avril 1901
Lundi 1er avril 1901
Le matin, promenade à bécane à Montreuil-Bellay, Béné et Epinard (20 km).
Mardi 2 avril 1901
Papa part à midi pour le Roussillon. Nous recevons une lettre de Tata Mimi[38] me disant qu’elle m’attend à Neuilly. Je partirai mardi 9 avril. L’après-midi, je vais consulter des ouvrages à la bibliothèque de la ville.
Mercredi 3 avril 1901
Je passe une partie de l’après-midi à fouiller l’arquimèse[39] du salon où je trouve quelques vieux papiers très curieux.
Jeudi 4 avril 1901
Le mauvais temps m’empêche d’aller déjeuner à bicyclette chez Jacques Hervé-Bazin au Château du Pathis, près Segré et Marrans, comme j’y étais invité. J’envoie une dépêche et j’écris. Le soir, je visite avec Maman et Marie-Thérèse les reposoirs des églises.
Vendredi 5 avril 1901
Vendredi Saint. Le matin j’assiste à l’Office à Saint Joseph.
Samedi 6 avril 1901
Le matin, j’assiste à l’Office à Saint Joseph. Le soir, je vais à la bibliothèque.
Dimanche 7 avril 1901 (Jour de Pâques)
Nous assistons à la messe de six heures à Saint-Serge. L’après-midi, je vais au patronage
Semaine du 8 au 14 avril 1901
Lundi 8 avril 1901
Nous allons attendre Philomène à la gare. Elle arrive à 11h37.
Mardi 9 avril 1901
Le matin, je vais chez l’oculiste Bernard qui m’enlève un commencement de kyste à la paupière inférieure de mon œil gauche. Par le rapide de 10h25, je pars pour Paris ; j’arrive à 3h30 à la gare Saint-Lazare où m’attendait Tata Mimi. Nous allons chez elle à Neuilly ; puis je vais me promener sur les boulevards. Je rentre à 7h et je dîne avec Monsieur le vicomte H. des Cordes[40], beau-frère de Xavier, en ce moment de passage à Paris.
Mercredi 10 avril 1901
Le matin, je fais quelques courses et commissions dans Paris ; le soir je vais me promener avec Margot, nous allons au Musée de Cluny, au Palais de justice puis je laisse Margot et je vais faire une longue visite à M. Le Marois, avocat à la Cour de Cassation, cousin de mon oncle Joseph de Lazerme et son associé dans l’affaire de la particule et du titre de comte des Lazerme ; nous causons longuement de cette affaire[41].

Jeudi 11 avril 1901
Le matin, je fais l’acquisition d’une photographie du duc d’Orléans et d’une photographie de la duchesse et je commande une photographie du comte de Chambord et une autre du comte de Paris ; puis je vais à la Bibliothèque nationale où je vais voir Monsieur Ria, archiviste paléographe, pour lequel Xavier m’a donné un mot de recommandation. Il m’engage à revenir demain parce que tout sera ouvert et que je pourrai mieux visiter la bibliothèque. Le soir, je vais voir à l’Hôtel de ville mon oncle Henri de Pontich, directeur administratif des travaux de la Ville de Paris, je ne le trouve pas, je me promène ensuite sur la rive gauche, je vais chercher Xavier à l’usine Mars[42], nous allons ensemble chez Piccot, que nous ne trouvons pas puis, chez Pouff.

Vendredi 12 avril 1901
Le matin, je vais avec Margot chez le curé de Neuilly à qui Margot demande pour quel candidat Xavier doit voter à l’élection municipale de dimanche. Puis nous faisons un tour au bois. Le soir, je vais voir mon oncle Albert de Lazerme, il est absent de Paris ; mais je vois ma tante Jeanne et mes cousines Madeleine et Suzanne[43]. Ensuite, j’entre à Notre-Dame, puis je reviens à l’Hôtel de ville où je ne trouve pas encore mon oncle de Pontich, je vais ensuite voir mon cousin le docteur Cornet de Bosch[44], que je ne trouve pas ; enfin, je vais chercher Margot au concours hippique, au Grand Palais des Champs-Elysées, et nous allons ensemble chez nos cousins de Barescut[45] que nous ne trouvons pas.
Samedi 13 avril 1901
Le matin, je reviens à la Bibliothèque nationale que je n’ai pas eu le temps de visiter hier ; je fais des recherches au Grand Armorial de d’Hozier ; je vais aussi chez Piccot que je ne trouve pas, mais je cause longuement avec son propriétaire qui me raconte toutes ses grotesqueries. Le soir, nous allons avec Margot visiter le Musée du Louvre ; puis Margot va faire des visites et je vais chez Piccot, que je rencontre enfin ; il me raccompagne dans le métropolitain jusqu’à l’Étoile. Après dîner, nous allons à la foire du Trône place de la Nation avec Margot et Xavier.
Dimanche 14 avril 1901
Le matin vers 9h Maurice[46] arrive pour passer la journée avec nous ; à 10 heures, nous allons tous les quatre, Margot, Xavier, Maurice et moi à la Mairie de Neuilly où Xavier vote pour le candidat de la « Patrie française », Monsieur Suard ; nous allons ensuite à la messe à Saint-Pierre de Neuilly. L’après-midi Xavier, Margot et moi raccompagnons Maurice chez son oncle M. Armand de Terrats[47], qui nous fait visiter son atelier de peinture et de sculpture. Ensuite nous rencontrons Piccot, à qui nous offrons une cigarette explosive, ce qui lui cause une frayeur injustifiée ; puis nous rentrons à Neuilly par le métropolitain.
Semaine du 15 au 21 avril 1901
Lundi 15 avril 1901
Je quitte Paris, avec regret, par le rapide du midi ; j’arrive à Angers à 5h de l’après-midi. Je trouve Bonne Maman en bien meilleure santé.
Mardi 16 avril 1901
Je fais quelques commissions avec Marie Thérèse et Philomène.
Mercredi 17 avril 1901
Je rentre à la Faculté pour la reprise des cours. L’après-midi, j’assiste à la séance du Conseil général ; par 25 voix contre 3, on vote un vœu invitant les sénateurs du Maine-et-Loire à s’opposer au vote par le Sénat de la loi sur les associations déjà votée par la Chambre.
Jeudi 18 avril 1901
Papa arrive le matin venant du Roussillon et de Biarritz. Le soir, à cinq heures, nous allons accompagner Philomène qui rentre au Sacré-Cœur du Mans. À 8h ¼, nous assistons à la salle de la rue des Quinconces à une séance musicale et récréative offerte par des Messieurs et des dames du monde au profit du patronage Saint-Vincent-de-Paul. Sortie à 11h ½.
Vendredi 19 avril 1901
À 5h, à l’Université, conférence de droit civil de M. Jac.
Samedi 20 avril 1901
Leçon d’allemand et leçon d’escrime. À 8 heures, conférence de Saint-Vincent-de-Paul à Saint-Serge.
Dimanche 21 avril 1901
Je passe la plus grande partie de l’après-midi au patronage Saint-Serge, le soir, à 8 heures, nous assistons avec Papa à la réunion générale des conférences de Saint-Vicent-de-Paul, place Saint-Martin.
Semaine du 22 au 28 avril 1901
Lundi 22 avril 1901
Je commence aujourd’hui les visites du jubilé. Le soir à 08h, Conférence Saint-Louis.
Mardi 23 avril 1901
À 2 ½ h, au laboratoire de chimie de l’Université, cours de viticulture avec un examen au microscope de certains ferments du vin. À cinq heures, conférence d’économie politique. Entre les deux, je continue mes visites du jubilé
Mercredi 24 avril 1901
Cours à 2h de viticulture à la société industrielle et agricole. À 5h cours de greffage chez M. Lepage, pépiniériste
Jeudi 25 avril 1901
A 5h leçon d’escrime, le soir à 8h congrégation.
Vendredi 26 avril 1901
L’après-midi, conférence d’économie politique à 1h ½ et conférence de droit civil à 5h à l’Université
Samedi 27 avril 1901
Par le rapide de 10h25, Maman part pour Paris ; comme il n’y a pas aujourd’hui de second cours, nous allons Marie-Thérèse et moi l’accompagner à la gare. L’après-midi, je vais à bicyclette à Sainte-Gemmes ; retour par les Ponts-de-Cé. Ensuite, leçon d’escrime ; à 5h, travaux pratiques de greffage chez M. Lepage ; à 8h, Conférence Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 28 avril 1901
Le soir, nous assistons à l’ouverture du Mois de Marie à la cathédrale.
Semaine du 29 au 30 avril 1901
Lundi 29 avril 1901
Le matin, je passe assez bien un examen de viticulture. L’après-midi, j’assiste à l’Université au cours de droit public du comte du Plessis de Grenédan[48]. À 8h, Conférence Saint-Louis.

Mardi 30 avril 1901
Bonne Maman, qui devait partir aujourd’hui pour Toulouse, retarde son départ jusqu’à demain à cause du mauvais temps. À 5h, conférence de Monsieur Coulbault.
Mai 1901
Semaine du 1er au 5 mai 1901
Mercredi 1er mai 1901
Bonne Maman renvoie encore son départ à demain à cause du mauvais temps. Le soir : cours de viticulture à 2h, cours de droit public à 3h ½ et cours de greffage à 5 heures. Après-midi bien employée !
Jeudi 2 mai 1901
À midi, nous accompagnons Bonne Maman à la gare. Papa l’accompagne jusqu’à Niort afin qu’elle n’ait pas à changer de train jusqu’à Bordeaux où l’attendra l’Oncle Paul[49]. L’après-midi à 1h ½ leçon de mandoline. Ch. de Fontenay qui vient prendre sa leçon avec moi, m’annonce ses prochaines fiançailles avec une jeune fille des environs de Saumur, dont il ne me dit pas le nom. À 8h, j’assiste au Mois de Marie à la cathédrale et à la procession.
Vendredi 3 mai 1901
Papa rentre de Niort à 1h du matin ; il a très bien visité la ville grâce à l’amabilité de M. Nivart, qu’il a rencontré et qui s’est mis à sa disposition pour lui faire visiter Niort. À 2h, je vais à la bibliothèque municipale.
Samedi 4 mai 1901
Leçon d’allemand ; cours de greffage.
Dimanche 5 mai 1901
Le matin, je vais à la messe de 8 heures ; puis je fais de la photographie. L’après-midi, je vais au patronage Saint-Serge ; puis je visite, avec Maillefer, les greniers de l’église Saint-Serge.
Semaine du 6 au 12 mai 1901
Lundi 6 mai 1901
Je passe mon après-midi aux assises ou j’assiste au jugement et à la condamnation à 4 ans de prison d’un carrier de Trélazé qui en avait tué un autre d’un coup de carabine. Le soir, Conférence Saint-Louis.
Mardi 7 mai 1901
L’après-midi, je vais à la bibliothèque. À 5h, conférence d’économie politique. À 8h ½, j’assiste à la salle du cirque à une conférence donnée par MM. Syveton[50] et Noilhan[51] de « la Patrie française ». François Coppée[52], qui devait venir présider la conférence, en a été empêché par la maladie. La salle du cirque est comble. M. Syveton nous fait part des regrets de Coppée de n’avoir pu venir ; Monsieur Noilhan nous lie le discours qu’il devait prononcer et qui est un réquisitoire contre le gouvernement. Puis M. Syveton nous retrace l’histoire du néfaste ministère Waldeck-Rousseau, qui nous opprime depuis deux ans ; le seul lien qui unit des hommes d’origine aussi diverses que l’ancien modéré Waldeck et le collectiviste Millerand est l’amour de Dreyfus, la haine de l’armée française. Contre ces bandits, tous les Français, quelle que soit leur opinion politique – royalistes, bonapartistes républicains – doivent s’unir sur le terrain, qui nous est cher à tous, de la liberté et du patriotisme. Il termine son magnifique discours par le cri de « Vive la Patrie française ».
Ce discours est fréquemment interrompu par quelques cris hostiles proférés par des socialistes et des anarchistes, mais les applaudissements et les acclamations de l’auditoire patriote les couvrent. Un anarchiste ayant crié « Vive la Sociale », toute la salle se lève et le conspue en criant : « à la porte », et plusieurs patriotes le saisissent, le jettent dehors. Même sort pour un interrupteur qui a crié « Vive l’Internationale », tout le monde lui crie : « en Prusse !!! » et « quarante sous ! ». Un moment, l’anarchiste, qui a été expulsé, rentré dans la salle ramenant plusieurs camarades ; ils ont plusieurs fois interrompu le discours ; quelques coups de poing ont été échangés ; mais il n’y a pas eu de désordre grave. M. Noilhan, succédant à M. Syveton, répond à certains interrupteurs. À la fin, un ordre du jour est noté par 2500 citoyens présents dans la salle, environ ; il souhaite un prompt rétablissement à Coppée, et appelle l’union des Français, pour jeter bien loin la bande de Juifs, de Francs-maçons et de Cosmopolites aux élections de l’année prochaine.
Mercredi 8 mai 1901
Cours de viticulture et de greffage ; Maman rentre ce soir de Neuilly. Marie-Thérèse est moi allons l’attendre à la gare.
Jeudi 9 mai 1901
J’assiste à la cour d’assises à la condamnation à quinze ans de travaux forcés d’un nommé Morin pour tentative d’assassinat avec commencement d’exécuter à Cholet.
Leçon d’escrime à 5 heures. Le soir, congrégation.
Vendredi 10 mai 1901
J’assiste à la cour d’assises aux débats de l’affaire de 3 voleurs dont l’un est défendu par Joseph Vachez, à qui l’on a confié d’office cette rude tâche, car son client a 22 vols à son actif dont plusieurs dans des églises. Les plaidoiries auront lieu demain. À 5h, leçon d’escrime.
Samedi 11 mai 1901
Je vais à la Cour d’assises ou j’entends la plaidoirie de Vachez et où je vais voir le sergent de Marsaguet[53]. L’accusé le plus coupable, le client de Vachez, a 10 ans de travaux forcés ; l’autre en a 8 et la femme, leur complice, a 2 ans de prison. À 5 h, dernier cours de greffage. Le soir à 8h ¼, j’assiste à l’Université à la belle conférence de Ferdinand Brunetière[54] sur les services rendus par les Congrégations. L’éminent académicien montre que chacune des congrégations est l’épanouissement d’une vertu particulière de l’Évangile ; les congrégations sont aussi le lien qui unit les diverses églises entre elles et chaque église au pape. Enfin, les services rendus par les congrégations à l’Église et le clergé séculier sont si grands que les deux clergés sont solidaires et que toute atteinte à la liberté de l’un est une atteinte à celle de l’autre. Mgr Rumeau et Mgr Augouard assistaient à la conférence ; après la conférence, punch d’honneur à la bibliothèque de l’Université.

Dimanche 12 mai 1901
À 8 h ½, je prends part avec plusieurs élèves de l’école d’agriculture à un grand concours de greffage à l’école des Beaux-Arts. Le soir à 4 heures, je vais faire en compagnie de Joseph Vachez une promenade à bicyclette à la Pyramide, la Daguenière, la Bohalle, Brain-sur-l’Authion, et retour par Trélazé.
Semaine du 13 au 19 mai 1901
Lundi 13 mai 1901
Le soir, conférence Saint-Louis.
Mardi 14 mai 1901
Le matin, j’assiste à la procession du jubilé. L’après-midi, je vais travailler à la bibliothèque. Le soir, à 5 h, conférence de droit romain. À 8 h, je vais passer la soirée et prendre le thé chez Jacques Hervé-Bazin. Il y a, en même temps que moi, Mme des Loges, Jacques des Loges et Henri Bonnet.
Mercredi 15 mai 1901
Le matin, j’assiste à la procession du jubilé. Au cours de viticulture à 2 h, M. Bouchard me remet le diplôme de maître-greffeur que m’a valu le concours de dimanche. Le matin, j’avais déjà vu mon nom dans la liste publiée par Le Maine-et-Loire.
Jeudi 16 mai 1901
C’est aujourd’hui l’Ascension ; mais un fort rhume de cerveau, qui a une tendance à passer à la gorge, m’empêche de sortir de toute la journée ; je vais seulement à la messe. Je profite de ma réclusion forcée pour faire de la photographie, de l’allemand et aussi pour lire Le Correspondant.
Vendredi 17 mai 1901
Mon rhume va mieux ; à 8 h, je vais au cours en voiture ; ensuite, je sors comme d’ordinaire ; je vais à la bibliothèque en sortant des cours. L’après-midi, conférence de droit civil.
Samedi 18 mai 1901
Je vais matin et soir à la bibliothèque. L’après-midi, j’ai aussi une leçon d’allemand.
Dimanche 19 mai 1901
Je passe l’après-midi au patronage. J’y apprends le départ d’Angers de Maurice Beaufreton, si lancé dans les œuvres et qui s’occupait tant de la Ligue antialcoolique ; il avait volé des quantités de livres à la bibliothèque de l’Université ; sans ressources aucunes, il ne subsistait qu’en vendant ces livres. Pour éviter un scandale, on a étouffé l’affaire ; il erre de ville en ville cherchant une position qu’il ne peut trouver car on refuse de l’employer dès qu’on a reçu des renseignements d’Angers sur son compte ; il est actuellement en Belgique. Qui aurait pu se douter de cela de la part d’un bon étudiant de l’Université catholique, qui avait fondé le Patronage de Saint-Serge et qui s’occupait d’une foule d’œuvres, en apparence avec dévouement ?
Semaine du 20 au 26 mai 1901
Lundi 20 mai 1901
Le soir, je vais à l’escrime à 5 heures ; et à 8 heures, Conférence Saint-Louis. Très intéressante conférence de René Lucas sur la navigation de la Basse-Loire et la nécessité d’aménager le port de Saint-Nazaire, qui est, du continent, le plus rapproché de l’Amérique et qui pourrait devenir l’un des plus importants de l’Europe.
Mardi 21 mai 1901
Matin et soir, je vais travailler à la bibliothèque. À 4 h, Maman et moi allons faire une visite à Mme Hervé-Bazin ; nous ne la trouvons pas et nous laissons nos cartes. À 5 h, conférence d’économie politique. Le soir, nous allons à la musique au Mail.
Mercredi 22 mai 1901
Le matin et l’après-midi, je vais travailler à la bibliothèque. Le soir à 4 h, en sortant de la bibliothèque, je vais à la caserne Desjardins inviter le sergent de Marsaguet à venir voir samedi le concours hippique de nos fenêtres.
Jeudi 23 mai 1901
À 1 h, je prends une leçon de mandoline de 2 heure. À 5 h, conférence de droit civil.
Vendredi 24 mai 1901
Après le second cours, je rentre vite déjeuner à la maison ; puis je prends avec le Père Vétillart, Daniel Dauge et De Ponnat le train de Saumur ; arrivés à la gare, nous prenons une voiture qui nous mène à la pépinière départementale à Chacé où Monsieur Bouchard, directeur, nous fait admirer tous les plans de vigne possibles et imaginables ; nous allons ensuite à Varrains où nous visitons les vignes et surtout les caves à 25 m sous le sol de M. Duran, négociant champagniseur, qui expédie dans tous les pays un million de bouteilles par an. Enfin, nous allons chez le marquis de Dreux-Brézé[55], à Brézé ; nous visitons une de ses vignes, dont nous admirons l’ordre et la propreté, puis ses caves. Nous dégustons ses vins, blancs et rouges, qui sont excellents. Nous quittons Brézé à 7 h ½ et nous arrivons à 8 h ¼ à l’hôtel Budan à Saumur où nous attend à un excellent dîner. Nous partons de Saumur par le train de 10 h 48 et nous arrivons à Angers à 11 h 57. Charmante et instructive journée !
Samedi 25 mai 1901
Je passe mon après-midi à la fenêtre d’une chambre du second où je vois le concours hippique en compagnie de quelques amis (les 2 Vachez, Hervé-Bazin, De Marsaguet et Roger Follenfant). Le soir, conférence Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 26 mai 1901
Je vais au concours hippique où on reprend un exercice de chasse inauguré à Paris au Grand Palais, et qui consiste en ce que le cavalier ouvre une porte, une première fois en descendant de cheval et une seconde fois, sans quitter son cheval. Affluence de la société-ultra élégante dans les tribunes. Le soir, je vais au Mois de Marie à la cathédrale.
Semaine du 27 au 31 mai 1901
Lundi 27 mai 1901
Je pars par le rapide de 10 h 25 pour le Mans où je vais voir Philomène au Sacré-Cœur, et où j’assiste à la réunion des anciens élèves au Collège Sainte-Croix. On joue Le fils de Ganelon, qui n’est autre chose que La fille de Roland d’Henri de Bornier, moins les rôles de femme ; la pièce est fort bien jouée. À 6 h, banquet dans la cour d’honneur. Nous repartons – De Bréon[56], Hervé-Bazin, Des Loges et moi –, par le train de 9 h 42 et nous arrivons à Angers à minuit passé.
Mardi 28 mai 1901
À 2 heures de l’après-midi, nous assistons à la salle des Quinconces à une séance de charité ou Botrel[57] et sa femme chantent plusieurs chansons de la composition de Théodore Botrel ; ils sont toujours chaleureusement applaudis, surtout quand vient la note royaliste ou quand ils attaquent les Anglais !
Mercredi 29 mai 1901
Matin et soir, je vais travailler à la bibliothèque. À 6 h, je porte aux pauvres les bons de Saint-Vincent-de-Paul.
Jeudi 30 mai 1901
Matin et soir, je vais travailler à la bibliothèque. Papa obtient de M. Baugas des renseignements sur Beaufreton qui prouvent que ce jeune homme n’est pas aussi coupable qu’on l’avait dit tout d’abord. Au sujet des livres, il s’est rendu coupable d’indélicatesses, il est probable qu’il y a eu vol, mais l’enquête de l’abbé Delahaye n’a pas prouvé absolument le vol. Enfin, au sujet de rapports inavouables que Beaufreton aurait entretenus avec des enfants du Patronage Saint-Serge, il n’y a ni preuve, ni présomption.
Vendredi 31 mai 1901
Matin et soir, je vais travailler à la bibliothèque. Nous recevons une invitation à un dîner mardi soir chez M. et Madame Georges de la Villebiot[58] ; nous acceptons.
Juin 1901
Semaine du 1er au 2 juin 1901
Samedi 1er juin 1901
Le matin, je vais à la bibliothèque ; l’après-midi leçon d’allemand et leçon d’escrime ; le soir, Conférence Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 2 juin 1901
Le matin à 8 heures, j’assiste avec Papa, dans la chapelle de l’externat Saint-Maurille, à la première communion d’Alfred de Soos[59]. L’après-midi, je vais au patronage Saint-Serge. Le soir, nous allons à la musique au Mail.
Semaine du 3 au 9 juin 1901
Lundi 3 juin 1901
Je vais à l’escrime à 5 h. Le soir à 7 heures, Papa qui est invité par le comte de Saint-Pern[60] et moi, allons à la Conférence Saint-Louis. Je lis un travail sur « Le côté moral de la colonisation » et sur la manière dont les peuples colonisateurs modernes l’ont compris dans leurs rapports avec les indigènes. Puis M. René Bazin nous lit quelques passages de son roman sur l’Alsace[61].
Mardi 4 juin 1901
Je vais voir M. Pinguet professeur de musique et m’entendre avec lui pour les heures de mes leçons de mandoline car le départ de Mme Edouard Fischer pour Châteaubriant a rendu nécessaire le choix d’un nouveau professeur. À 7 heures, nous allons dîner chez M. de La Villebiot ; nous ne sommes que 10 à table ; en dehors de nous, il y a M. de Grehaulme[62] et M. de Pontbriand[63]. Nous prenons le thé à 10h00.
Mercredi 5 juin 1901
Je me lève à 3 heures et demie (ce qui ne fait guère de sommeil puisque je me suis couché hier soir à plus de onze heures) pour aller voir le lancement sur la Loire d’un pont de bateaux et le passage sur ce pont de la garnison d’Angers, qu’on nous a annoncés pour 5 heures. Aussitôt levé, je vais à l’Université où m’attendent plusieurs étudiants et, à 4 h ½, nous partons pour la Pointe, à bicyclette ; nous y arrivons à 5 h ¼ pour assister au commencement de la construction du pont par le 6e génie ; comme l’opération sera assez longue et que les troupes ne passeront que vers 9 heures, nous partons à la rencontre du 77e de ligne qui doit arriver de Cholet ; de Rochefort, nous entendons des feux de salves qui doivent nous annoncer son approche ; malheureusement, au moment où nous quittions Rochefort, un de mes compagnons de route vient se buter dans ma bicyclette et me casse 3 rayons ; par bonheur, il se trouve à Rochefort-sur-Loire un mécanicien qui me l’arrange. Après la réparation, nous cherchons vainement le 77e et, ne le rencontrant pas, nous nous décidons à partir pour Denée où est la tête du pont ; quand nous y arrivons, le 135e de ligne levait le bivouac pour commencer le passage, le sergent de Marsaguet, qui m’aperçoit, m’indique un bon endroit pour assister au passage ; le passage, commencé à 9 h moins le quart, s’est terminé vers 9 h 20 (environ 35 minutes pour le 135e infanterie et le 25e dragons). Après le passage, nous repartons dans la direction de Mûrs, où nous nous rafraîchissons puis nous rentrons à Angers pour par les Ponts-de-Cé ; nous arrivons à Angers à 11 h ¼. L’après-midi, je vais prendre un bain pour me reposer car il faisait très chaud pendant la promenade. À 6 h ½, nous avons la visite de l’abbé de Falguières[64] qui est venu passer quelques jours à Angers.
Jeudi 6 juin 1901
Je suis invité à aller porter le dais à la procession des Dominicains aujourd’hui ; j’accepte. Je commence à faire circuler dans la rue Joubert la pétition qu’on m’a confiée ; pour aujourd’hui, résultat nul, personne ne veut mettre son nom le premier sur la liste ; un huissier me répond que ; bien que partisan de la liberté d’association ; il n’ose pas, étant officier ministériel, signer la pétition ; je lui dis que je n’avais pas cru l’office d’huissier incompatible avec l’indépendance politique et la liberté de pensée ; un magistrat, pour me refuser sa signature, m’allègue sa qualité de fonctionnaire (quelle indépendance ! quel courage !), je continuerai demain. À 5 h, je vais à la procession chez les Dominicains ; je porte le dais avec Hervé-Bazin, De Bréon et Roques. Après la procession, qui est fort courte, le Père Supérieur nous réunit dans la bibliothèque avec Mgr de Kernaëret[65] et nous offre du vin blanc d’Anjou. Le soir après la Congrégation, le Père Caron nous réunit, nous offre des rafraîchissements et nous fait approuver quelques mesures pour lutter contre la loi d’association ; on décide d’afficher dès cette nuit des affiches de protestation et d’équiper le plus tôt possible des hommes-sandwiches, etc.
Vendredi 7 juin 1901
M. Follenfant[66] met le premier son nom sur ma pétition ; je recueille aujourd’hui 6 signatures. À 5 h, conférence de M. Jac. Le soir en nous promenant nous rencontrons des Roussillonnais de passage à Angers ; nous causons un moment avec eux en français et en catalan.
Samedi 8 juin 1901
Je recueille aujourd’hui neuf signatures ; on a commencé, il suffit : les moutons de Panurge suivent ; la plupart des personnes chez lesquelles je me présente sont hostiles à la loi contre les associations ; mais beaucoup craignent de se compromettre en signant la pétition. À 3 h ½, leçon d’allemand ; à 5 h, nous allons faire une visite de digestion à Madame de La Villebiot, nous ne la trouvons pas ; ensuite, leçon d’escrime. À 8 h, Conférence Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 9 juin 1901
Je vais à la messe à 8 h à Saint-Joseph ; à 9 h ½, je vais à la salle synodale de l’évêché ; c’est de là que je pars avec quelques membres de la Conférence Saint-Louis et l’Université pour le tertre Saint Laurent avec la procession générale du Saint-Sacrement ; le temps étant superbe et malgré la chaleur, la procession est très belle. À l’aller où elle est la plus complète, elle a mis presque une heure à défiler sur un point donné ; les décorations des maisons sont, en général, très réussies, surtout à la rue de la Roë où il y a beaucoup de dômes allant d’une maison à une autre par-dessus la rue. On est de retour à la cathédrale à midi trois quarts et nous rentrons à la maison à 1 heure. À 4 heures, je vais chez Jacques Hervé-Bazin, qui reçoit quelques amis que Mme Hervé-Bazin présente à Mlle de Bréon[67]. Mlle de Bréon est venue passer deux jours à Angers chez Mme Hervé-Bazin pour voir la procession. On s’amuse bien ; il y avait : Mlle de Kergaradec[68], Jacques des Loges, Roger de Bréon, M. de Beauregard et moi. Le soir, nous allons à la musique au Mail.
Semaine du 10 au 16 juin 1901
Lundi 10 juin 1901
Papa part à midi pour Angoulême où il va présider le concours des collèges catholiques de l’Ouest. Marie-Thérèse va passer l’après-midi chez Madame René Bazin à sa campagne de Saint-Barthélemy. À 11 h, Je vais prendre une leçon de mandoline chez M. Pinguet. À 5 h, leçon d’escrime.
Mardi 11 juin 1901
À 5 h, conférence d’économie politique.
Mercredi 12 juin 1901
Nous recevons une dépêche de Trouillas nous annonçant la mort de Paul Torrent-Ricard, le régisseur de nos vignes de Trouillas, dont la famille est depuis 150 ans sur nos propriétés. Il n’avait pas plus de 45 ou 46 ans, mais à son passage à Trouillas au moment de son avant-dernier voyage en Roussillon, Papa l’avait trouvé très fatigué. J’envoie une dépêche de condoléances à sa fille Mathilde qui nous a annoncé la mort. Paul Torrent laisse un père âgé de 70 à 80 ans, sa femme est morte depuis longtemps et ses 3 enfants vont se trouver seuls avec leur grand-père. Son fils doit avoir à peine 15 ans ; il va falloir prendre de nouvelles dispositions pour la propriété de Trouillas. Maman, qui est très fatiguée depuis ce matin, est obligée de se mettre au lit vers 4 heures. À 5 h, je vais prendre une leçon de mandoline chez M. Pinguet. Je vais commander une voiture pour papa qui arrivera à minuit 29.
Jeudi 13 juin 1901
En l’honneur de la Saint Antoine, nous allons à la messe de 7 heures chez les Jésuites et nous communions. Au retour, nous trouvons Papa arrivé cette nuit ; il me souhaite la fête ; nous lui annonçons la mort de Paul Torrent. L’après-midi, je vais avec Papa voir Mgr Pasquier, nous ne le trouvons pas ; j’écris plusieurs lettres en réponse à celles que je reçois à l’occasion de ma fête. Je reçois 10 fr. de Bonne Maman ; deux jolis livres de géographie de l’Oncle Paul (l’un Henri Turot sur l’insurrection crétoise et la gare gréco-turque, l’autre du comte Henri de La Vaulx sur un voyage en Patagonie). Papa me donne 10 fr ; Maman aussi ; et Marie-Thérèse me fait cadeau d’une jolie épingle de cravate ; tout cela me constitue de jolis cadeaux de fête. Le soir à 9 h, nous allons à la procession du Saint-Sacrement à la cathédrale et à l’Adoration nocturne qui précède la fête du Sacré-Cœur. Nous y restons jusqu’à 11 h ¼.
Vendredi 14 juin 1901
Je vais à la messe de 7 heures chez les Pères Jésuites. À 5h, conférence de droit civil de M. Jac. J’invite De Bréon et De Fontenailles[69] à venir prendre le thé mardi soir. Le soir, De Fontenailles vient pour jouer de la mandoline avec moi ; nous jouons un peu et surtout nous causons beaucoup, il annonce son mariage à Papa et Maman, il repart à 10 h.
Samedi 15 juin 1901
J’invite Hervé-Bazin pour mardi soir. À 5 heures, leçon d’escrime ; le soir, Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 16 juin 1901
Le matin à 7 heures, je vais au pèlerinage de l’Université à la Madeleine. À 9 h ½, je suis avec le Patronage Saint-Serge la procession de cette paroisse ; les rues étaient fort bien décorées ; nous avons décoré nos deux façades de la rue Joubert et du Champ-de-Mars. L’après-midi, je regarde passer plusieurs processions, puis je vais inviter Madame De La Villebot pour mardi. Le soir, nous allons à la musique.
Semaine du 17 au 23 juin 1901
Lundi 17 juin 1901
À 5 h, leçon d’escrime. De La Villebiot accepte mon invitation.
Mardi 18 juin 1901
À 11 h, je vais me faire couper les cheveux chez Normandin. Le soir à 8 h ½, nous offrons un petit thé à quelques invités : d’abord, de mes camarades, Roger de Bréon, Jacques Hervé-Bazin, Jacques des Loges, Olivier et Roger Follenfant, René de La Villebiot, Joseph de Soos[70] ; Charles de Fontenailles, appelé par dépêche auprès de son père malade, n’a pu venir. Il y a aussi Mme et Mlles Blanc, Mme et Mlles de Soos et M. de Falguières. Nous jouons à divers petits jeux ; on chante un peu etc. ; finalement, on s’amuse bien.
Mercredi 19 juin 1901
Sur le désir exprimé par Xavier, Maman écrit à Mme de Becdelièvre[71] pour la prier d’engager son frère, le vicomte de Rouault, à s’adresser directement à lui s’il se décide à acheter une voiture Mars (M. de Rouault avait écrit chez Mars, manifestant l’intention de commander une automobile). À 5 h, leçon de mandoline.
Jeudi 20 juin 1901
Papa et moi, nous partons par le train de 11 h 44 pour la Ménitré, avec le P. Vétillart s.j. et M. Moreau professeur de chimie agricole à l’École supérieure d’agriculture. Nous franchissons la Loire sur une barque et nous nous trouvons à la porte de l’abbaye de Saint-Maur appartenant aux Bénédictins. Nous trouvons là De Ponnat venu d’Angers à bicyclette. Le Père Dom Vannier[72], qui s’occupe spécialement des vignes et qui est d’ailleurs conseiller municipal (!), nous fait visiter les caves, creusées dans le roc, où on fait du vin mousseux. Nous voyons aujourd’hui la première partie de l’opération dont nous avons vu la fin le 24 mai chez MM. Tapin et Duvau à Varrains ; en renversant l’ordre, je me rends très bien compte de l’opération. Voici en quoi elle consiste : le vin récolté sur place ou acheté (celui de Saint-Maur pèse environ 12 degrés alcooliques au moment de la récolte fin octobre ou commencement de novembre, si on a eu soin de laisser se développer sur la grappe la pourriture grise qui donne du degré au vin) est mis dans des tonneaux où il se clarifie pendant l’hiver et perd un peu de degré. Vers le mois de mars, on change le vin de tonneau, on y on y introduit une levure spéciale (venue de Champagne ordinairement) dans une proportion rigoureusement déterminée, et on met le vin ainsi additionné en bouteille. Cette levure sécrète une diastase qui, dans la bouteille, va transformer le sucre du vin el alcool (s’il n’y avait pas assez de sucre dans le vin au moment de la mise en bouteille, on y a ajouté du sucre candi). Les bouteilles sont mises au repos pendant plusieurs mois pour laisser s’accomplir la fermentation puis, pendant un mois, avant de les déboucher, on les secoue une ou 2 fois par jour afin de reporter tout le dépôt sur le bouchon. Ensuite, on les débouche, on jette le bouchon sur lequel s’est formé le dépôt et on ajoute du vin vieux ou du cognac ou un mélange de différentes liqueurs fortes, dans une proportion variable (entre 5 et 12% par litre). On bouche alors à nouveau les bouteilles et le Champagne est fait, prêt à être expédié. Les bouteilles sont en verre très résistant, car elles ont à supporter parfois des pressions égales à 10 kg pendant la fermentation. Dans tout le Saumurois, il se fait un grand commerce de vin blanc mousseux. MM. Duvau et Tapin, qui comptent parmi les plus grands champagniseurs du pays, avec M. Inkerman, M. Bouvet, etc., en expédient plus d’un million de bouteilles par an dans tous les pays ! Ce Champagne est aussi bon que du Champagne d’Epernay.

Nous visitons aussi les vignes de l’abbaye de Saint-Maur qui sont très bien tenues, l’alambic, les pressoirs, l’appareil qui élève l’eau de la Loire au sommet du côteau pour l’arrosage de la vigne, etc. Nous assistons ensuite aux vêpres des Pères. Puis nous visitons les fouilles faites en 1898 par le jésuite de la Croix, qui ont mise à jour une villa romaine et un nymphée sur l’emplacement desquelles l’abbaye fut fondée par Saint-Maur au VIe siècle ; nous voyons aussi le sarcophage du saint retrouvé par le P. de la Croix, beaucoup de céramiques trouvées dans les fouilles, etc. L’abbaye a été détruite six fois ; les constructions actuelles datent du XVIIe siècle, elles ne sont pas très curieuses. À 7 heures nous dînons dans le réfectoire des Pères au milieu d’eux ; avant et après le repas, ils psalmodient des prières. Nous repartons à 7 h ½ et arrivons à Angers à 9 heures, enchantés de notre excursion si instructive et du charmant accueil qui nous a été fait.
Vendredi 21 juin 1901
Je vais à la messe de 7 h chez les Pères Jésuites à cause du 7e anniversaire de ma première communion. À 11 h, pour nous préserver de l’épidémie de variole qui sévit à Angers, et conformément à l’avis du maire affiché en ville, le Dr Sourice vient nous vacciner tous. À 5 h, conférence de droit civil.
Samedi 22 juin 1901
À 11 h, je vais prendre une douche froide car le temps est très chaud. L’après-midi, je vais acheter des livres de droit chez Lachèse. À 5 h, leçon d’escrime ; à 8 h, Conférence Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 23 juin 1901
Je passe une partie de l’après-midi au Patronage où les enfants s’exercent à une petite pièce « Les pupilles de la garde » qu’ils joueront dimanche prochain devant Mgr Rumeau. Le soir à 8 h ¼, nous allons à une audition offerte par les élèves de mon professeur de musique M. Pinguet, salle Courcier-Bourigault. Le programme, qui est très chargé, est admirablement exécuté. Un duo d’Hamlet, exécuté par un sergent du génie et par une demoiselle, soulève les applaudissements de l’auditoire, tant il est bien chanté.
Semaine du 24 au 30 juin 1901
Lundi 24 juin 1901
J’apprends à la Faculté que la loi sur les associations a été votée samedi soir, ou plutôt dimanche matin à 1 heure par le Sénat, c’est fait, le crime est consommé ; les Congrégations sont maintenant à la discrétion complète du gouvernement. Et voilà ce qu’on appelle la liberté, l’égalité ! Je passe toute l’après-midi à revoir les matières de mon examen.

Dans l’après-midi, j’ai deux conférences : une d’économie politique de M. Baugas à 1 h 1/2, ; une autre de droit romain de M. Coulbault à 5 h. Je suis interrogé aux deux ; entre les deux, je travaille à la bibliothèque de l’Université.
Mardi 25 juin 1901
C’est aujourd’hui qu’est célébré à Saint-Augustin le double mariage de mes cousines de Roig : Antoinette, avec M. de Lavaur de Laboisse (de la Gironde) ; et Marie-Louise, avec M. du Cos de Saint-Barthélemy, le frère de Jeanne de Barescut (de Toulouse)[73].
Mercredi 26 juin 1901
Je passe une bonne partie de la matinée, en-dehors des cours, à la bibliothèque de l’Université. Dans l’après-midi, je revois du droit romain et du code civil. À 5 heures, leçon de mandoline.
Jeudi 27 juin 1901
Je passe la plus grande partie de l’après-midi à revoir le droit civil. À 5 h ½, je vais faire une petite promenade à bécane. Avrillé, la Baratonière, et je reviens par la route de Saint-Georges (10 à 12 kms).
Vendredi 28 juin 1901
Je passe toute la matinée à l’Université pour le concours de droit civil ; nous avons de 7 h à midi ; le sujet à traiter est difficile : « De la transcription », je le traite moyennement. Je passe mon après-midi à travailler.
Samedi 29 juin 1901
Je vais à 7 heures à la composition de droit romain ; comme hier, nous ne sommes que 6 à composer (4 de première année et 2 de seconde année). Ne trouvant pas grand-chose à mettre sur le sujet, je m’en vais sans composer. L’après-midi, je travaille jusqu’à 5 h ½, puis je vais tirer quelques coups de fleuret chez Bickel ; de là, je vais à bicyclette chez M. Brossard à Saint-Jacques où je suis surpris par un fort orage ; je suis obligé de laisser ma bécane et de rentrer en tram. Le soir, Conférence Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 30 juin 1901
Je vais à la messe de 8 heures et je travaille toute la matinée ; idem pour l’après-midi jusqu’à plus de 6 heures. Maman avait invité Miss Peary à venir déjeuner aujourd’hui avec nous, puis elle l’avait complètement oubliée ; à midi passé, nous avions plus qu’à moitié déjeuné lorsque Miss Peary arrive ; Maman se lève de table affolée et, en dix minutes, improvise un nouveau déjeuner ; dix minutes après, nous nous mettons à table avec Miss Peary et nous recommençons un nouveau déjeuner sans qu’elle se doute du trouble qu’elle nous a causé. Par exemple, en nous remettant à table, nous avions fort à faire pour ne pas partir tous d’un même éclat de rire !
Le soir à 8 h, au Patronage Saint-Serge, j’assiste à une séance donnée en l’honneur de Mgr Rumeau qui préside ; on commence par l’inauguration du buste de M. Bachelot, ancien curé, puis on joue les « Pupilles de la Garde » et on récite monologues et chansonnettes ; malheureusement, à cause de la maladie d’un des principaux acteurs, on ne peut pas jouer le « Pater » de François Coppée, qui était annoncé.
Juillet 1901
Semaine du 1er au 7 juillet 1901
Lundi 1er juillet 1901
M. Gavouyère nous distribue nos feuilles d’examen ; je passerai le 18 juillet à Caen. J’apprends le prochain mariage de mon cousin Van den Zande, de Bordeaux, avec Mlle de Rolland[74]. Je passe l’après-midi à travailler.
Mardi 2 juillet 1901
Monsieur Baugas fait un cours supplémentaire à 2 heures. Je passe le reste de l’après-midi à travailler. Il pleut toute la journée et il fait froid. À 3 h de l’après-midi un thermomètre ne marquait que 12 centigrades.
Mercredi 3 juillet 1901
A 5 h leçon, de mandoline. Jusque-là, je revois mon examen. Pendant le dîner, M. Follenfant vient annoncer que son fils Olivier, dont le nom n’avait pas paru sur la liste publiée il y a quelques jours au Journal officiel (par erreur sans doute) est sous-admissible à Saint-Cyr[75]. À 8 h, Nous allons attendre à la gare Maman qui est allée passer la journée au Mans pour voir Philomène. Au retour, je travaille encore jusqu’à près de 11 heures.
Jeudi 4 juillet 1901
À 1 h ½, je vais passer à la Faculté l’examen semestriel. Je suis interrogé sur l’histoire du droit et le droit constitutionnel par M. de la Bigne de Villeneuve, il me demande d’abord ce qu’étaient les lois sous l’Ancien régime, puis me fait exposer le pouvoir législatif sous toutes les constitutions depuis celle de 1791 jusqu’à la charte de 1830 inclusivement, j’obtiens une blanche. Pour Monsieur Jac (droit civil) qui m’interroge d’abord sur la maxime « en fait de meubles possession vaut titre » (art. 2279 C. civ.), puis sur les diverses catégories d’incapables, et enfin sur les immeubles par destination et par suite de l’objet auquel ils s’appliquent, je mérite une rouge. M. Coulbault (droit romain), qui m’interroge sur les constructions faites sur un terrain avec les matériaux d’autrui ou sur le terrain d’autrui avec ses propres matériaux, me donne une blanche-rouge. Idem pour Monsieur Baugas, qui, m’interrogeant (économie politique) sur l’influence du change sur les émissions de billets de banque et sur la théorie des bullionistes et des inflationnistes, me donne une blanche-rouge (avec une certaine indulgence). J’ai donc une blanche, deux blanches-rouges et une rouge ; c’est bien plus qu’il nous faut pour être admis puisque la moyenne de rouge suffit, et que l’on peut même passer avec 3 rouges et une rouge-noire ! Ce résultat nous donne beaucoup d’espoir, deux semaines avant l’examen définitif. À 5 h ½, pour me détendre l’esprit, j’enfourche ma bécane et je refais à rebrousse-poil la promenade de jeudi dernier. Le soir, nous allons à la musique.
Vendredi 5 juillet 1901
L’après-midi, conférence de droit civil. Le matin, M. Maurice Gavouyère nous remet ses notes de conférence des deux semestres qu’il va envoyer à Caen si nous les trouvons assez bonnes. J’ai : pour le droit civil : dans le premier semestre 8/10, dans le second 7/10, pour le droit romain 8/10 et 7/10, pour l’économie politique 8/10 et 8/10. En résumé 4 x 8 et deux 7 ; ce sont de bonnes notes ; je dis à M. Gavouyère de les envoyer à Caen ; elles ne peuvent que m’aider dans mon examen. Le soir, nous nous promenons avec la famille Buston et nous rencontrons Mme de Lagérie et ses enfants[76] ; ils sont venus passer quelques jours à Angers.
Samedi 6 juillet 1901
L’après-midi, cours supplémentaires d’économie politique et dernier cours de cette matière. À 5 h, je vais à l’escrime. Le soir, Conférence Saint-Vincent-de-Paul.
Dimanche 7 juillet 1901
Je vais à la messe de 8 h ; et je passe tout le reste de la journée à travailler jusqu’à 6 h ½ de l’après-midi où je vais à la bénédiction chez les Pères Jésuites. Le soir, nous allons à la musique. Maman, un peu fatiguée, garde le lit.
Semaine du 8 au 14 juillet 1901
Angers, lundi 8 juillet 1901[77]
Je passe l’après-midi à travailler. Le soir, nous allons nous promener avec M. et Mlle Buston que nous rencontrons. À la fin de notre promenade, nous assistons à une rixe sur le boulevard ; comme la chose tournait à l’aigre, je vais avec M. Buston prévenir la police au poste de la Mairie, pendant que papa garde Mlle Buston et Marie-Thérèse sur le boulevard. On amène au violon un des combattants ; l’autre s’est enfui je crois.
Angers, mardi 9 juillet 1901
Le matin, j’assiste encore aux deux cours ; je travaille toute l’après-midi. Le soir, Papa, Marie-Thérèse et moi, nous assistons dans la salle des fêtes de l’Hôtel de ville à une conférence de l’abbé Cros sur la « colonisation par les orphelins ». L’abbé Cros recueille des orphelins des deux sexes, les élèves dans des orphelinats, soit en France, soit aux colonies, leur apprend : l’anglais, ou une autre langue, des notions de comptabilité, l’agriculture (spécialement les cultures coloniales) et même du droit international. Les jeunes filles reçoivent une éducation presque aussi soignée que celle des garçons et, en plus, on leur apprend à bien tenir un ménage, en résumé, éducation très pratique et pleinement adaptée aux besoins de la colonisation. Malheureusement – est-ce par crainte de l’auditoire ? – l’abbé Cros laisse complètement de côté la question de l’éducation morale chrétienne, qu’il ne néglige certainement pas dans les orphelinats ; cela paraît étrange de la part d’un missionnaire. Néanmoins, l’œuvre est essentiellement bonne et patriotique car l’abbé Cros n’envoie ces orphelins aux colonies que lorsqu’il les a mariés et les a pourvus d’un pécule de 5000 francs recueilli au moyen de placements. Cette œuvre peut avoir des résultats féconds pour le peuplement de nos vastes colonies !
Angers, mercredi 10 juillet 1901
Je travaille toute l’après-midi. Le soir à 9 h, quand nous revenions d’une petite promenade, Papa reçoit une dépêche de l’agence Benguet à Biarritz lui demandant s’il veut louer la villa du 15 août au 15 octobre 2400 francs. Papa s’empresse de répondre qu’il accepte. C’est un fort joli prix et cela Nous permet d’aller passer 3 semaines à Biarritz avant l’entrée des locataires, ce que nous désirons vivement. Une lettre de tante Josepha nous apprend que le colonel qui a été frappé de 8 jours d’arrêts par l’infâme ministre de la guerre, général André, parce qu’il avait puni un soldat qui avait fait du scandale dans une église à l’occasion de l’enterrement de son père qu’il voulait faire enterrer civilement, est notre cousin le colonel comte de Franclieu[78] ; ce n’est pas la première injustice que cette canaille d’André commet à son égard ; l’année dernière, il l’avait déjà empêché de passer colonel, bien qu’il fût inscrit au tableau. Quel triste sire que ce ministre ! Et quelle honte pour l’armée française d’avoir un pareil personnage pour chef ! Il est vrai que la Triple Alliance s’en réjouit ! Enfin, supportons tout, nous sommes en République ! Pour cette inestimâââble bienfait, les Français doivent souffrir les humiliations les plus dures.
Angers, jeudi 11 juillet 1901
Je travaille matin et soir ; à 5 h, je vais porter les bons aux pauvres. À 8 h, nous allons à la musique au Mail.
Angers, vendredi 12 juillet 1901
Une lettre de l’oncle Xavier, qui vient de passer quelques jours en Roussillon, nous apprend que lors de son passage à Trouillas, il a vérifié les registres de notre régisseur Paul Torrent qui est mort il y a un mois. De son examen, il ressort que ce malheureux nous volait depuis plusieurs années d’une façon indigne ! Il s’attribuait une part de récolte plus grande que celle à laquelle il avait droit et réduisait d’autant la nôtre ; l’oncle Xavier est allé vérifier à la régie les quantités de vin sorties de Trouillas, là, nouvelle confirmation des désordres de Paul Torrent. Il va falloir faire une vérification complète. C’est bien triste pour un métayer dont la famille était depuis plus de 150 ans sur nos terres. À 5 h, je vais visiter M. Delahaye à venir dimanche matin, 14 juillet, assister à la revue de la garnison, de nos fenêtres. Je reçois une lettre de Jacques des Loges m’invitant à dîner demain soir.
Angers, samedi 13 juillet 1901
Papa reçoit une lettre de l’agence Benguet à Biarritz disant que la location à laquelle la dépêche de mercredi soir nous avait fait croire n’est pas faite ; que c’était un simple renseignement qu’on nous demandait. C’est très ennuyeux, car nous avions échafaudé notre plan de vacances sur cette location, qui nous permettait de passer 3 semaines à Biarritz à la villa. À midi, Monsieur Baugas, mon professeur d’économie politique, collègue de Papa, qui est en ce moment à la campagne avec sa famille, et qui est revenu ce matin tout exprès pour nous faire un cours, déjeune avec nous. Le soir, à 7 h, je vais dîner chez M. et Mme des Loges pour fêter le succès de Maurice des Loges qui vient d’être reçu bachelier ès sciences. C’est un dîner de jeunes gens. Il y a : M. et Mme des Loges, Jacques et Maurice des Loges, leur cousin Étienne de Place, leur ami M. de Bermont, Henri Bonet, de Beauregard, Hervé-Bazin, de Bréon et moi. Madame des Loges me fait l’honneur de me mettre à sa droite. Après le dîner, nous formons une véritable colonne et allons attendre sur la place du Ralliement la retraite en musique et aux flambeaux des 2 régiments. Au moment où elle paraît, nous la saluons de formidables cris de « Vive l’armée ! » pendant plusieurs minutes. Nous la suivons un moment en criant « Vive l’armée ! ». Puis nous formons un monôme et parcourons la rue d’Alsace et les boulevards en continuant à acclamer l’armée ; quelques étudiants se joignent à nous. Il se forme derrière nous une deuxième bande qui crie aussi « Vive l’armée ». Enfin, nous rentrons époumonées. Par moments, il y a eu aussi quelques cris hostiles.
Angers, dimanche 14 juillet 1901
Je vais à la messe de 7 h chez les Jésuites, puis je rentre vite pour assister à la revue de la garnison qui a lieu sous nos fenêtres, place du Champ de Mars. Quelques amis profitent de notre balcon pour voir la revue : M. et Mme Maurice Gavouyère, M. Delahaye mon ancien professeur et son petit garçon, Jacques et Maurice des Loges, Jacques Hervé-Bazin, Henri Bonet et Roger de Bréon. Le 135e de ligne étant dans un camp pour les écoles à feu, la revue est assez maigre ; il n’y a que le 6e génie et le 25e dragons. L’après-midi, il y a toutes sortes de réjouissances pour célébrer la fête prétendue nationale. Je ne sors que pour faire une visite à Mme Hervé-Bazin et pour aller au salut. Le soir, nous voulons essayer de voir les illuminations qui sont assez réussies, mais nous sommes chassés des rues par la foule grouillante et par les voyous qui hurlent la « Marseillaise », cet hymne sanguinaire qu’on a décoré de titre d’hymne national, comme si le génie français n’était capable que de produire des champs d’orgie ! Nous ne sommes pas tentés d’aller au feu d’artifice qui nous assourdit, cependant, jusqu’à minuit.
Semaine du 15 au 21 juillet 1901
Angers, lundi 15 juillet 1901
C’est aujourd’hui la Saint Henri, anniversaire autrement « national » que celui de la prise de la Bastille ont célébré hier, puisque c’était la fête du bon roi Henri IV et du regretté comte de Chambord. C’est aussi la fête de Papa ; c’est donc une fête de famille. L’après-midi, Papa, Maman et moi allons faire une visite à Mme des Loges. Papa et Maman font sa connaissance ; ils font aussi la connaissance de sa mère, Mme de Place, qui était dans son salon.
Caen, mardi 16 juillet 1901
Nous sommes partis d’Angers par le train de 5 h 3, et nous arrivons à Caen à 10 h 54 par Le Mans et Surdon. Maman m’a accompagné pour passer mon examen ; nous descendons à l’hôtel d’Angleterre.
Caen, mercredi 17 juillet 1901
Nous nous promenons dans Caen qui est une assez vieille ville, et curieuse bien qu’un peu sale. Nous visitons la belle église Saint-Pierre. Nous rencontrons Gohier, étudiant d’Angers, qui vient de passer avec succès la 1ère partie de son examen de 2e année de droit. Nous apprenons qu’Hervé-Bazin a été reçu hier, mais que De Bréon a échoué (on s’y attendait un peu). L’après-midi, je vais déposer des cartes, suivant l’usage, chez les professeurs qui m’interrogeront demain ; j’écoute quelques examens à la Faculté de droit. Puis, à 5 h 35, Maman et moi nous prenons à la gare Saint-Martin un train de la Compagnie « Caen à la mer », qui nous mène à Délivrande où il y a un sanctuaire connu sous le nom de Notre-Dame de Délivrande. Nous allons y prier pour mon examen ; puis nous dînons et nous reprenons le train à 8 h 34, nous arrivons à Caen à 9h ½. La plaine qui s’étend autour de Caen n’est pas très accidentée ; il y a beaucoup de céréales et quelques bosquets dont les arbres ne sont pas très élevés. Mais, grâce au voisinage de la mer, l’air y est très pur.
Caen, jeudi 18 juillet 1901
Le matin, nous allons faire la sainte communion à l’église Saint-Pierre, à l’intention de mon examen ; puis nous rentrons à l’hôtel ou je revois quelques questions d’examen. Je passe mon examen à 3 h ¼. Je mets une robe d’avocat, comme tout le monde. Je le passe dans la même salle que La Prada, Gazeau et Fortin. Je suis interrogé par Monsieur Villey (économie politique) sur la législation monétaire française et sur notre système monétaire, puis sur quelques unités monétaires étrangères. Il me met une blanche. M. Aron[79] (histoire du droit), un Juif, m’interroge ensuite sur la « justice retenue ». J’obtiens une rouge. M. Guillouard (droit civil), qui m’interroge sur les servitudes et sur la loi de 1898 sur cette matière, me met une blanche. Enfin, M. Debray (droit romain) me demande ce que c’est que la « collatio emancipati »[80] ; je suis incapable de lui répondre là-dessus, car c’est dans la partie que M. Coulbault a passée à cause de son mariage et qu’il n’a vue que très rapidement à la fin de l’année. Je lui réponds mieux sur la « querela inofficiosi testamenti »[81]. Il nous pose à tous la même question sur la collatio. Seul un dispensé de cours, Fortin, lui répond. Nous lui expliquons alors ce qui en est. Dans la délibération des professeurs, on s’en occupe et on nous fait demander de nouvelles explications par le secrétaire ; on nous fait dire qu’on en tiendra compte ; en effet j’ai une rouge. À la proclamation, les 8 étudiants d’Angers sont reçus, sauf 2, Gazeau et Ross. Je suis content du résultat de son de mon examen : deux blanches et deux rouges, alors qu’une moyenne de 3 rouges et d’une rouge-noire suffit, c’est un bon examen. Je vais l’annoncer à Maman à Saint-Pierre ; puis nous envoyons des dépêches, ensuite, nous allons nous promener en voiture. Le soir, j’écris à plusieurs personnes sur des cartes postales. Malheureusement, Maman – suite de la fatigue du voyage et de l’émotion, sans doute – a de fortes douleurs d’entrailles. Je crains qu’elle ne soit malade. Peut-être ne pourrons-nous pas partir demain ? Vers 9 heures, nous recevons une dépêche de Papa me félicitant et nous annonçant que la villa de Biarritz est louée du 18 juillet au 25 octobre pour 2500 francs. Voilà qui va modifier le plan de nos vacances.
Trouville, vendredi 19 juillet 1901
Maman se sentant remise, nous partons pour Trouville par le train de 8h14 ; auparavant, je vais à la faculté voir si je trouve mon scapulaire que je pense y avoir perdu ; je le retrouve au vestiaire ; je l’avais sans doute laissé tomber en mettant une ma robe avant l’examen.
Nous passons la journée à visiter Trouville ; je me baigne ; Trouville a une fort belle plage très animée et très élégante. Toutefois, je donne la préférence à Biarritz comme aspect et comme pittoresque et aussi pour ses villas et ses châteaux. Avant de repartir, nous visitons en voiture Deauville, nouvelle station créée à côté de Trouville il y a une quarantaine d’années par le duc de Morny sur des terrains reconquis sur la mer. Les rues sont tirées au cordeau ; on y voit de somptueuses villas entourées de magnifiques jardins dont les massifs ressemblent à des mosaïques. Nous repartons par le train de 6h19. Nous dînons à la gare de Caen et nous prenons à Caen le train de 10h22 qui, par Mézidon et Le Mans, nous mènera à Angers samedi à 4h4 du matin. Dans le même train, voyage Testard-Vaillant qui a passé son examen aujourd’hui en même temps que Roussier ; ils ont été ajournés tous les deux ; donc, il y a déjà 5 étudiants d’Angers ajournés en 1ère année.
Angers, samedi 20 juillet 1901
La température est accablante ; j’ai vu un bon thermomètre marquer à l’ombre près de 38° centigrades. Nous sommes arrivés à 4h ce matin et nous avons dormi jusqu’à près de 10 heures. L’après-midi. je fais quelques courses ; je vais voir M. Jac, mon professeur de droit civil, M. l’abbé Brossard. À 5h, je vais à l’escrime ; à 8h, conférence Saint-Vincent-de-Paul, la dernière de l’année avant les vacances.
Angers, dimanche 21 juillet 1901
Je vais à la messe de 8 heures. L’après-midi je fais quelques visites ; le soir, nous allons à la musique.
Semaine du 22 au 28 juillet 1901
Angers, lundi 22 juillet 1901
Le matin, je vois le 135e de ligne rentrer du camp du Ruchart. Ensuite, je vais à bicyclette faire une visite à M. Baugas dans la propriété qu’il a louée à la Meignanne. Je ne le rencontre pas. L’après-midi, à 5h, leçon d’escrime. Ensuite, je vais à la Faculté voir les dépêches qui ont dû arriver de Caen. Bonet, de Broc et Piron sont reçus, mais comme on ne dit rien de Turquet de Beauregard et de Porcaro, j’en conclus qu’ils sont refusés (c’était prévu).
Angers, mardi 23 juillet 1901
En allant voir Bonet, j’apprends qu’il a été reçu avec 2 blanches une blanche-rouge et une rouge. En première année, les 3 meilleurs examens sont donc ceux de 3 anciens élèves de Sainte-Croix : Hervé-Bazin avec 2 blanches et 2 rouges ; Bonet et moi, avec deux blanches et 2 rouges. J’apprends aussi que De Porcaro[82] a été refusé avec 3 noires (!) et une rouge, et De Beauregard avec 3 rouges-noires et une rouge. Je pars à cinq heures pour Le Mans où je dois aller prendre Philomène que j’amènerai à la gare à minuit rejoindre Maman, et nous partirons tous les 3 pour Roscoff, dans le Finistère, où nous allons passer quelque temps au bord de la mer. Au moment où j’achevais de dîner au buffet du Mans, je suis abordé par De Maquillé[83], qui était aussi au buffet et que je n’avais pas vu. Il vient de Saint-Vincent de Rennes où il a été reçu à son baccalauréat ès sciences, et il va à Morannes (près Angers) dans sa famille. Comme il a deux heures à perdre, je lui propose de venir dans ma voiture, nous irons à Sainte-Croix ; nous y allons, nous voyons le Père Cisterne dans le parc, le Père Carré, M. Quid’beuf, etc. Je l’y laisse avec son cousin De Quatrebarbes, et je vais chercher Philomène au Sacré-Cœur. Je vais avec elle voir tante Lucas[84], puis nous allons à la gare à dix heures. À minuit, le train d’Angers arrive et nous retrouvons Maman. Nous partons pour Roscoff.
Roscoff, mercredi 24 juillet 1901
Nous sommes arrivés à Roscoff à 9 heures et descendus, après des recherches, à l’hôtel des bains de mer ; comme on ne nous avait donné que des chambres au 3e à cause de l’encombrement, nous allons nous installer à l’hôtel du Palmier où nous sommes mieux. Roscoff est une vieille petite ville bretonne ; il y a des maisons du XVIe siècle, l’église a un clocher fort curieux ; presque tous les habitants portent le costume breton et, entre eux, ils parlent le breton. Le site est très beau, avec plusieurs îlots sur la Manche en avant de la plage ; Roscoff est le port d’embarquement d’une quantité de petits bateaux qui font l’exportation des primeurs du pays de Léon, d’un climat très doux à cause du voisinage du gulf-stream jusqu’en Angleterre.
Roscoff, jeudi 25 juillet 1901
Il pleut presque toute la journée ; il fait presque froid. Nous ne pouvons sortir que de courts instants ; nous en profitons pour lire et pour mettre à jour notre correspondance. J’écris à M. de la Bigne de Villeneuve, qui est en villégiature à Saint-Jacut (Ille-et-Vilaine) pour lui annoncer le succès de mon examen.
Roscoff, vendredi 26 juillet 1901
Le temps étant un peu plus doux, Philomène et moi nous nous baignons. Maman, qui souffre un peu de la gorge, attend à un autre jour. La plage n’est pas agréable ; elle est trop plate ; on peut aller très loin sans avoir plus d’eau qu’à mi-corps ; donc, il est presque impossible de nager. L’après-midi, je vais à bicyclette à Saint-Pol-de-Léon pour faire réparer mon lorgnon qui a un verre brisé. Chemin faisant, on me propose de visiter des dolmens ; j’accepte ; il y en a 4 à la file ; deux sont intacts, deux autres sont écroulés, ils paraissent authentiques. À Saint-Pol, pas d’opticien, quel pays ! Je visite la cathédrale qui contient plusieurs tombeaux d’anciens évêques, car Saint-Pol était un évêché avant la Révolution.
Roscoff, samedi 27 juillet 1901
Il fait absolument froid, il n’y a pas plus de 10 à 12 degrés ; Philomène et moi nous nous baignons tout de même, mais nous avons de la peine à faire la réaction.
Roscoff, dimanche 28 juillet 1901
Nous allons à la grand’messe ; l’église est remplie de monde, il y a beaucoup d’hommes, tout le monde chante, le curé lit le prône et prêche en breton. Le temps est beaucoup plus doux ; nous nous baignons l’après-midi.
Semaine du 29 au 31 juillet 1901
Roscoff, lundi 29 juillet 1901
Temps superbe. Le matin, je vais prendre quelques vues avec l’appareil 13×18 ; l’après-midi, nous nous baignons.
Roscoff, mardi 30 juillet 1901
À 9h10, nous allons attendre Papa à la gare ; il vient passer 3 ou 4 jours avec nous avant d’aller à Cauterets avec Marie-Thérèse. Celle-ci, qui déteste le chemin de fer, a préféré rester à Angers et être pensionnaire à l’externat de Bellefontaine pendant l’absence de Papa, que de le suivre à Roscoff. L’après-midi, Papa et Maman vont à Saint-Pol-de-Léon ; Philomène et moi restons sur la plage, nous nous baignons.
Roscoff, mercredi 31 juillet 1901
L’après-midi, nous allons à l’île de Batz. À l’aller, à cause du vent et du courant, nous sommes obligés de louvoyer et nous mettons une grande heure, bien qu’il n’y ait pas plus de deux kilomètres, en ligne droite, entre Roscoff et l’île. L’île de Batz, peuplée de 1400 à 1500 habitants, est plus longue que large ; elle a 3 lieues de tour, et pas plus de 500 à 600 mètres dans sa plus grande largeur. La plupart des habitants sont pêcheurs ; mais une partie de la population s’adonne aussi à la culture du blé ou des pommes de terre, etc. ; on recueille les varechs de la mer pour fumer les champs. Nous passons une heure environ dans l’île, puis nous rentrons à Roscoff en 35 minutes. Au retour, nous nous baignons.
Août 1901
Semaine du 1er au 4 août 1901
Roscoff, jeudi 1er août 1901
Nous passons presque toute la journée sur la plage, nous nous baignons. Le matin, papa va visiter Morlaix qui est, nous dit-il, une ville très fatigante à cause de ses pentes terribles.
Roscoff, vendredi 2 août 1901
À cause du premier vendredi du mois, nous allons à la messe de 7h ; puis je vais me baigner, et, Papa et moi, nous partons par le train de 9h25 pour Brest. Nous avons deux heures à passer à la gare de Morlaix ; nous en profitons pour visiter la ville, ce qui est vite fait, et pour déjeuner ; la chose la plus curieuse de Morlaix est, à mon avis, le viaduc du chemin de fer qui domine la ville de 50 ou 60 mètres. Nous arrivons à 2 heures à Brest ; nous passons l’après-midi à visiter notre grand port militaire. La ville, aux rues droites et aux maisons élevées, est resserrées entre les remparts et n’a pas de monuments. Mais le coup d’œil de la rade vue du château est féerique ; le pont national, pont tournant qui fait communiquer la ville proprement dite avec le faubourg de Recouvrance, par-dessus le port militaire, est très remarquable. Nous apercevons du haut du pont deux cuirassées déjà vieux, « l’Amiral Baudin » et le « Neptune », et deux garde-côtes. Le reste de l’escadre du Nord est en ce moment aux manœuvres de la Méditerranée. Le cours Dajot est encombré par une exposition que nous n’avons pas le temps de visiter. Nous repartons à 7h35. De Morlaix à Roscoff, nous voyageons avec deux demoiselles nous avions vues il y a juste deux ans sur le pont du « Victoria » à notre retour de Jersey et avec qui nous avions causé ; elles sont actuellement à Roscoff avec leur famille. On a raison de dire qu’il y a que les montagnes qui ne se rencontrent pas. Nous arrivons à Roscoff à 9h56.
Roscoff, samedi 3 août 1901
Nous passons la plus grande partie de la journée sur la plage ; l’après-midi, nous nous baignons.
Roscoff, dimanche 4 août 1901
Nous allons à la grand’messe. L’après-midi, Papa va à Saint-Pol-de-Léon ; je reste avec Philomène pour me baigner ; mal m’en prend, car le temps étant devenu presque froid, nous ne pouvons nous baigner. Maman, qui a une forte migraine, se met au lit après la messe de 8h et y reste toute la journée.
Semaine du 5 au 11 août 1901
Roscoff, lundi 5 août 1901
Je vais me baigner le matin. À 6h53 du soir, nous accompagnons Papa à la gare ; il repart pour Angers.
Roscoff, mardi 6 août 1901
Nous nous baignons à 11 heures. L’après-midi, nous restons sur la plage. Il fait très mauvais temps.
Roscoff, mercredi 7 août 1901
Je me baigne le matin ; l’après-midi, je fais une assez jolie promenade à bécane. Je visite de nouveau Saint-Pol-de-Léon ; puis j’arrive à un village qui porte le nom de Sibiri ; je vois aussi le village de Plougoulm ; je traverse un cours d’eau à bicyclette, en passant dans l’eau, à cause de l’absence de pont ; ensuite, je reviens à Roscoff à travers bois, et par des chemins invraisemblables où je suis obligé de porter ma bécane. Je remarque que les clochers des églises sont, en général, très jolis : la plupart sont à jour. Dans la campagne, on voit assez souvent d’énormes pâtés de rochers accumulés et couverts en partie de végétation. Quand je veux me faire indiquer mon chemin, il ne faut pas que je m’adresse aux grandes personnes ; elles ne parlent que le breton, les enfants, au contraire, qui vont à l’école, parlent passablement le français.
Roscoff, jeudi 8 août 1901
J’apprends qu’un grave accident s’est produit au chantier de l’institut marin ; un ouvrier est tombé sur le sol, d’une hauteur de 15 mètres et s’est tué ; chose curieuse, je n’en avais pas entendu parler et je l’ai appris par la lecture du Petit Journal. L’après-midi, je vais à l’île de Batz ; je prends une photo du phare, que je visite ensuite ; puis je vais me baigner sur une petite plage au-dessous du phare. Il n’y a pas de cabine, et je suis obligé de me déshabiller en public… heureusement que le public est absent. Au retour, je m’amuse à ramer presque tout le temps.
Roscoff, vendredi 9 août 1901
Je reviens me baigner à l’île de Batz ; mais à une autre plage ; j’y vais et j’en reviens sur un tout petit bateau à voile manœuvré par deux enfants d’une quinzaine d’années ; heureusement, la distance n’est pas grande.
Roscoff, samedi 10 août 1901
Le temps étant à la pluie, je ne reviens pas à l’île de Batz, comme j’en avais l’intention. L’après-midi, je révèle des plaques photographiques ; la plupart sont manquées, cela provient d’un déplacement de la lentille de mon appareil, survenu probablement en voyage.
Roscoff, dimanche 11 août 1901
En l’honneur de Sainte Philomène et de Sainte Suzanne, dont c’est aujourd’hui la fête, nous allons à la messe de 8h, où nous communions. L’après-midi, nous allons à vêpres ; ensuite, je me baigne. Je jette un coup d’œil sur les régates, qui ont lieu aujourd’hui ; n’étant pas initié, je n’y comprends pas grand-chose ; d’ailleurs, un fort vent d’ouest me contrarie. Le soir, nous allons voir un bal populaire en plein air ; nous espérions qu’on y danserait des danses bretonnes, notre attente est déçue, on y danse des polkas, des valses, bref, tout ce qu’il y a de plus banal. Nous apprenons ensuite qu’il n’y a eu, dans le bal même, une rixe entre les partisans des danses du pays et ceux qui voulaient des danses françaises. Ils avaient trop fêté la dive bouteille en l’honneur des régates !
Semaine du 12 au 18 août 1901
Roscoff, lundi 12 août 1901
Un fort vent d’ouest m’empêche de retourner à Batz me baigner ; je suis obligé de me contenter d’un seul bain, ce qui ne fait que 20 pour la saison. Nous sommes toute la journée dans les malles. Le soir, nous causons longuement avec Mme François Miron[85] qui est à l’hôtel du Palmier avec ses deux petits garçons, mais qui ne tardera pas à le quitter, tant elle est peu satisfaite de l’hôtel (je le comprends) !
Angers, mardi 13 août 1901
Partis à 6h38 du matin de Roscoff, nous sommes arrivés ici à 5 heures du soir. À la Brohinière (près Rennes) une déception m’attendait. François de La Touche[86] m’ayant dit dans sa dernière lettre qu’il voulait venir me voir à la Brohinière au passage du train, je lui avais écrit à quelle heure j’y passais ; je comptais l’y trouver et causer avec lui pendant les 6 minutes d’arrêt de l’express ; à mon grand étonnement, il n’y était pas, il aura eu sans doute un empêchement.
Angers, mercredi 14 août 1901
Je fais des commissions toute la journée ; j’écris plusieurs lettres, notamment une carte de félicitation à Charles de Fontenailles à l’occasion de son mariage avec Mlle Marie Anne Le Bouvier, qui a lieu le mardi 20 août à l’église Notre-Dame[87] ; je ne pourrai pas y assister puisque nous repartons le samedi 17 août. La future vicomtesse de Fontenailles apporte, paraît-il, une très jolie dot qui viendra très à propos redorer le blason de son mari. Peut-être est-ce plus le sac que la jeune fille qu’épousera mardi De Fontenailles ?
Angers, jeudi 15 août 1901
Je vais à la messe de 8 heures, puis à la grand’messe. L’après-midi, j’accompagne Philomène voir les dames de Bellefontaine. Nous voyons passer la procession, qui est bien médiocre à cause de la pluie ; puis je vais voir Henri Bonnet. Le soir, je vais à la musique.
Angers, vendredi 16 août 1901
Nous sommes toute la journée dans les bagages. L’après-midi, J. des Loges vient me voir. Le soir, je vais voir M. Delahaye.
Angers, samedi 17 août 1901
Nous quittons Angers Maman, Philomène et moi, accompagnés de Jean qui nous suit jusqu’à Bordeaux par le train de 11h38. Nous arrivons à Bordeaux à 8h14. D’Angers à Bordeaux, nous avons fait route tout le temps avec la famille de Maquillé. Antoine[88], avec qui je cause presque tout le temps dans le couloir de notre wagon, me dit qu’ils vont comme nous à Lourdes, en s’arrêtant une journée à Bordeaux, et, coïncidence curieuse, ils descendent comme nous à la villa Béthanie ; nous serons donc ensemble pendant le pèlerinage national. À Bordeaux, nous quittons les Maquillé. Jean part, à 10h50, pour Vinça, et nous, à 11h20, pour Lourdes.
Lourdes, dimanche 18 août 1901
Nous arrivons à Lourdes à 6h du matin, c’est-à-dire avec une heure de retard. Après des incidents de malles à la gare, nous arrivons à la ville Béthanie à 7h ; nous allons à une messe de 8h à l’église du Rosaire ; puis je rentre à la villa faire ma toilette, tandis que Maman se baigne à la piscine. L’après-midi, nous nous promenons avec Tata Mimi Civelli et, grâce à la recommandation du R.P. de Raymond-Cahuzac[89], s.j., j’y obtiens dès aujourd’hui des bretelles de brancardier ; je serai attaché à l’Hôpital des sept douleurs.
Semaine du 19 au 25 août 1901
Lourdes, lundi 19 août 1901
Je suis à mon service dès 6h ½ à l’Hôpital de Notre Dame des sept douleurs. Toute la journée, je transporte des malades à la grotte ou j’en ramène. Dans mon équipe, qui est la 4e, et qui est commandée par le comte de Bonvouloir[90], nous sommes 90 brancardiers volontaires. Il s’y trouve précisément un étudiant d’Angers, Denner, et le marquis de Dax d’Axat[91], d’Ille (!). Force m’est de cause avec ce dernier, avec lequel nous étions depuis de longues années en rapports plutôt aigres, et pour cause…
Lourdes, mardi 20 août 1901
C’est aujourd’hui qu’arrive toute la fin du Pèlerinage national : la plus grande partie. Aussi, une équipe de brancardiers, détachée de la 4e, dans laquelle M. de Dax et moi, sous les ordres du vicomte de Sarret[92], assure-t-elle le service dès 2h30 du matin à la gare. Dire ce que j’ai débarqué de malades de 3h du matin à 11h, heure à laquelle je suis rentré en ville, serait impossible ! Malheureusement, il nous arrive un incident : Philomène qui est venue avec Maman pour assister à l’arrivée du train blanc, et qui, pas plus que Maman, ne peut pénétrer dans l’intérieur de la gare, est prise d’une sorte d’épuisement, et tombe d’une façon si malheureuse qu’elle se blesse à la lèvre et se couvre de sang. Nous la raccompagnons dans sa chambre et Maman la couche. Cela ne sera pas grand-chose : elle en est quitte pour une écorchure à la lèvre et au visage. L’après-midi, je transporte un grand nombre de malades de l’hôpital à la grotte, j’assiste à la procession du Saint-Sacrement où il y a, je crois, quelques guérisons. Je rencontre aujourd’hui une foule de personnes de connaissance : M. et Mme Rivals avec Mlle de Baichis[93], Xavier de Chateaurocher[94], René le Jariel[95], Charles de la Messezière[96], André (étudiant à Angers), le P. Emmanuel de Chefdebien[97], la famille de Maquillé, de Lavaur, et j’en oublie ; hier, j’avais déjà rencontré M. et Mme Geoffroy de La Villebiot. Le soir à 6h, Bonne Maman, Tante Josepha et Nénette arrivent de Cauterets.
Lourdes, mercredi 21 août 1901
Toute la journée, je transporte des malades ; nous avons ordre d’être à l’hôpital dès 5h45. L’après-midi, Papa et Marie-Thérèse viennent de Cauterets pour passer la journée. Nous assistons ensemble et avec M. Enlart à la procession du Saint-Sacrement. Le soir, ils repartent pour Cauterets, emmenant Philomène.
Lourdes, jeudi 22 août 1901
Dès que je vois Tata Mimi, elle m’annonce la naissance de sa petite-fille, qu’elle a apprise hier soir par dépêche. La fille de Xavier et de Margot s’appellera Marie Madeleine, en souvenir de Marie Madeleine des Cordes, sœur de Margot, qui s’est faite religieuse il y a deux ans. L’après-midi, à la procession, je vois un miracle : un homme, boiteux, jette tout à coup ses béquilles et se met à courir dans la direction du dais !!! C’est un miracle splendide.
Lourdes, vendredi 23 août 1901
Ce Matin, Maman rencontre M. de Dax, qui la salue et va au-devant d’elle ; la glace est définitivement rompue ; Tata Mimi quitte Lourdes aujourd’hui pour être à temps au baptême de sa petite-fille dont elle est marraine, à Saint-Emilion chez M. des Cordes. Maman et moi partons de Lourdes pour Cauterets à 5h38 ; nous arrivons à l’Hôtel de France à Cauterets, à 7h ½. J’ai été encore fort occupé aujourd’hui ; je suis arrivé à l’hôpital dès 5h du matin, suivant la recommandation de M. de Bonvouloir ; mon dernier voyage consiste à porter à la garde, sur un brancard, avec l’aide de 3 autres brancardiers, une femme qui a un cancer au ventre ; il s’en exhale une odeur épouvantable, nous mettons plus de trois quarts d’heure à faire le trajet, car il faut aller très lentement. Le matin, le baron de Fournas[98], de Toulouse, ancien camarade de Papa à Sainte-Marie, qui est brancardier dans la même équipe que moi, me présente le R. P. Huc, s.j., également ancien camarade de Papa. Nous causons beaucoup. J’ai rencontré pendant mon séjour à Lourdes une foule de personnes de connaissance : hier encore, j’ai rencontré Henri Brard[99], mon camarade de Sainte-Croix, avec qui je me promène un long moment.
Cauterets, samedi 24 août 1901
Je me lève tard. L’après-midi, nous écoutons la musique dans le parc ; je rencontre Briffaut, un étudiant d’Angers que j’avais déjà vu à Lourdes ; nous nous promenons ensemble, et nous causons de diverses choses, notamment du récent mariage de Fontenailles. Le soir, Maman se sent prise de douleurs d’entrailles ; de plus, elle est très enrhumée de la poitrine.
Cauterets, dimanche 25 août 1901
Il faut mauvais temps ; l’après-midi, nous entendons à l’église un sermon historique très intéressant sur Saint Louis, roi de France. Maman garde le lit.
Semaine du 26 au 25 août 1901
Cauterets, lundi 26 août 1901
Marie-Thérèse et moi nous faisons nos préparatifs pour partir ce soir à 3h20. Maman va bien mieux, elle se lève ; nous arrivons à Lourdes à 5h, nous allons à la grotte.
Vinça (Pyrénées-Orientales), mardi 27 août 1901
Nous nous levons à 5h, et allons à la messe avant de partir. Nous partons de Lourdes par le train de 7h53 ; à Toulouse, nous trouvons Bonne Maman et Nénette qui se joignent à nous et l’Oncle Paul et Tante Josepha venus les accompagner. À Narbonne, nous nous topons à l’infâme ministre de la guerre du cabinet Waldeck-Rousseau, le général André ; il vient de Rivesaltes où il a inauguré une ligne de chemin de fer, et va à Béziers ; il monte avec ses officiers d’ordonnance dans un wagon-salon qu’on accroche au train que nous venons de quitter. Sur le quai, le préfet de Carcassonne, le sous-préfet de Narbonne et quelques officiers, avec des agents de police, le tout en uniforme. Le ministre en grand uniforme fume une cigarette à la portière de son wagon ; nous pouvons l’examiner à loisir, il est grand, mais atrocement laid, avec son nez de corbeau et ses moustaches de travers. Un moment, je soulève dans mes bras Nénette qui veut le voir, il a l’audace de lui sourire ; aussitôt, je m’empresse de la redescendre. Quand le train part, environ deux douzaines d’individus claquent des mains ; deux ou trois crient : « Vive la République, à bas les Jésuites », je les soupçonne d’avoir été payés par la police pour jouer ce triste rôle. Marie-Thérèse et moi, nous crions « Vive l’armée ! », si fort que, certainement, le général André nous a entendus, car ces individus ont vite cessé de crier. Ensuite, dans toutes les gares, ce ne sont que gendarmes qui regagnent leur caserne. De Rivesaltes à Perpignan, préfet, sous-préfets et conseillers de préfecture prennent le même train que nous. Il y a avec eux plusieurs conseillers généraux parmi lesquels je reconnais Étienne Batlle[100] en habit qui fait des courbettes au préfet, comme il a dû en faire auparavant au ministre ! Nous nous promenons à Perpignan entre les deux trains, nous rencontrons l’oncle Albert. Nous arrivons à Vinça à 8h15 ; on nous attendait à la gare.
Vinça, mercredi 28 août 1901
Le matin, nous assistons à la messe de 7h qui est dite pour le pauvre Bon Papa à l’occasion de sa fête. Puis, nous voyons différentes personnes. Je vais avec Amiel et un négociant en pommes à la propriété de la Balme pour voir la récolte de pommes, elle est moyenne. Le marchand en offre un assez bon prix, nous vendons la récolte. L’après-midi, je vais avec Marie-Thérèse à Ille en voiture ; notre arrivée y fait littéralement sensation ; nous voyons une foule de personnes.
Vinça, jeudi 29 août 1901
Je passe la plus grande partie de la matinée à fouiller de vieux papiers de famille ; j’en trouve de très curieux, entr’autres le passeport donné à mon bisaïeul de Pontich-Sicart[101] émigré en Espagne pendant la Révolution, par un général espagnol ; un acte de cession en censive remontant au XIVe siècle. L’après-midi, je vais a Bouleternère voir nos vignes. La récolte est beaucoup moins abondante que l’an passé, mais par contre, la qualité s’annonce comme meilleure. En rentrant, je vais tirer quelques oiseaux au jardin avec une carabine Flobert ; j’en tue cinq.
Vinça, vendredi 30 août 1901
Le matin, je vais tuer quelques oiseaux au jardin, je tue aussi un lapin qui vivait en liberté dans les fourrés du jardin. L’après-midi, je vais à Ille avec M. Jules Sabaté[102] ; je vais à la métairie de Saint-Martin ; ensuite, je fais quelques recherches à la grande maison, j’y trouve les nominations de plusieurs de mes ancêtres à des grades militaires, avec les signatures de Louis XIV et de Louis XV, et des lettres du ministre d’Ormesson au marquis de Durfort au sujet d’une bourse accordée pour l’entrée à Saint-Cyr de sa mère Elisabeth de Curzay de Bourdeville, mon arrière-arrière-grand-tante[103].
Vinça, samedi 31 août 1901
Le matin, je m’exerce à tirer des oiseaux au vol ; j’en tue plusieurs. Je passe l’après-midi à consulter de vieux papiers dans le cabinet de Bon Papa ; il y en a de fort curieux, par exemple la légitimation d’une certaine Catherine Barrera[104] par le roi d’Espagne Philippe en 1597. En fouillant ces papiers, je réussis à pousser la généalogie de la famille de Pontich jusqu’à un sieur Pontich, citoyen noble de Perpignan, de Vinça, qui avait épousé la noble demoiselle de Guanter[105]. C’était le quatrième aïeul de mon bisaïeul Antoine de Pontich-Sicart.
Septembre 1901
Semaine du 1er septembre 1901
Vinça, dimanche 1er septembre 1901
Nous avons plusieurs visites, notamment celle de M. de Guardia[106], rédacteur au Roussillon, journal conservateur de Perpignan ; je lui demande des renseignements sur les démarches à faire pour entrer dans la ligue de la « Jeunesse royaliste » ; il me promet d’en prendre auprès de M. Despéramons[107], directeur du Roussillon, et de me les rapporter dimanche.
Semaine du 2 au 8 septembre 1901
Vinça, lundi 2 septembre 1901
L’après-midi, je vais à Ille à bicyclette ; je rentre par le train de 8h car la petite réparation que j’ai fait faire à ma bicyclette a demandé plus de temps que je ne pensais, je l’aurai demain seulement. Je rentre dans le même compartiment que Maman et Philomène, qui reviennent de Cauterets et viennent à Vinça ; je croyais y trouver Papa, mais Maman me dit que, convoqué par le recteur de l’Université d’Angers pour le Congrès eucharistique qui se tient dans cette ville, il s’est décidé hier seulement à s’y rendre. Il est parti de Cauterets et, après un arrêt à Bordeaux, arrivera mercredi matin à Angers.
Vinça, mardi 3 septembre 1901
Je suis occupé toute l’après-midi à préparer avec Jacques et Amiel deux anciens cochers de Bon Papa, ce qui me sera nécessaire ces jours-ci pour mes promenades à cheval. Bonne maman me loue en effet un cheval pour les vacances. Je choisis une jument baie de 1m55 de haut et âgée de 4 ans. Elle est très douce. L’ancienne jument de mon grand-père, que nous attelons encore de temps en temps, est trop vieille pour la selle.
Vinça, mercredi 4 septembre 1901
Je fais dans l’après-midi ma première promenade à cheval. La jument est douce.
Vinça, jeudi 5 septembre 1901
Je monte à cheval à 8 heures. Je prends le train de midi jusqu’à Saint-Féliu-d’Avail. Là, je vais à bicyclette jusqu’à Trouillas avec Joseph Echernier que j’ai rencontré avec la gare à Saint-Féliu. À Trouillas, on n’a pas encore commencé à vendanger, mais je visite les vignes qui sont assez belles. La vendange commencera demain soir ou samedi et durera vraisemblablement toute la semaine prochaine. Au retour, je m’arrête à la métairie des Echernier près de Saint-Féliu ; ils me font visiter leur cave qui est fort bien organisée. Je repars par le train qui passe à Saint-Féliu à 7h33. J’y trouve mon oncle et ma tante Magué ; nous arrivons ensemble à Vinça à 8h15.
Vinça, vendredi 6 septembre 1901
Nous assistons le matin à la messe de la Ligue de l’Ave Maria, à l’occasion du premier vendredi du mois. L’après-midi, nous allons nous promener, l’oncle Paul, M. Dalverny[108] et moi, à l’usine électrique Bartissol[109] qui fournit la lumière électrique à Perpignan et la force motrice aux tramways Perpignan-Canet. Grâce à l’amabilité du premier surveillant M. d’Arx[110], nous pouvons tout visiter en détail et même descendre au fond des puits où tombe l’eau qui actionne les turbines.
Vinça, samedi 7 septembre 1901
Le matin, je monte à cheval. L’après-midi, nous allons tous à Rodès voir nos cousins Cornet de Bosch qui y sont en ce moment ; nous les trouvons tous : tante Isabelle, Joseph, Pierre et Marie[111].
Vinça, dimanche 8 septembre 1901
Nous allons à grand’messe et à vêpres ; l’après-midi, nous avons quelques visites.
Semaine du 9 au 15 septembre 1901
Vinça, lundi 9 septembre 1901
Nous avons à déjeuner l’oncle Louis Lutrand et tante Thérèse Lutrand[112] ; ils arrivent à midi et repartent à 3h. Après leur départ, Marie-Thérèse et moi allons à Finestret voir Mme Noëll[113]. Le matin, de 8h à 10h, promenade à cheval jusqu’à Sainte-Anne.
Vinça, mardi 10 septembre 1901
Le matin à 8h, l’oncle Paul et moi allons à cheval à Marquixanes ; Amiel suit sur un troisième cheval. À 3h, nous allons à la gare attendre l’oncle Hector de Pontich[114] et M. l’abbé Sarrète[115]. Le premier arrive de Vincennes, le second de Palau-de-Cerdagne. M. Sarrète a fait route avec l’évêque de Perpignan, Mgr de Carsalade du Pont[116], qui revient à Perpignan après un séjour de plusieurs mois en Cerdagne. Sa Grandeur m’a fait l’honneur de me faire demander, par lettre de M. Sarrète, de me trouver à la garde au moment de son passage. J’y vais avec mon oncle Magué ; M. Sarrète me présente à Monseigneur que je trouve très affable et très distingué. M. Sarrète et l’oncle Hector descendent à la maison. Dans la soirée nous avons la visite de nos cousins Cornet de Bosch.
Vinça, mercredi 11 septembre 1901
Le matin, je vais à Ille à cheval. L’après-midi, nous allons nous promener à la propriété de la Balme avec Papa, arrivé à 11h.
Vinça, jeudi 12 septembre 1901
Je vais à Rodès à cheval voir mes cousins Cornet avant leur départ pour Perpignan. L’après-midi, nous allons nous promener dans la campagne.
Vinça, vendredi 13 septembre 1901
Je vais à Marquixanes à cheval. Ensuite, avec l’oncle Hector et l’oncle Paul, nous essayons de photographier le tableau de Mgr de Pontich[117] ; la photographie est mauvaise, nous recommencerons. L’après-midi, nous allons nous promener à Nossa[118]. L’abbé Sarrète nous quitte aujourd’hui.
Arles-sur-Tech (Pyrénées-Orientales), samedi 14 septembre 1901
Mon onclé Magué, mon oncle de Pontich et moi, nous sommes partis de Vinça à midi et, après un arrêt d’une heure et demie à Elne pour visiter le cloître, sommes arrivés à Arles vers 4 heures. Nous visitons le soir cette gentille petite ville entourée de montagnes, et son église où se trouve le tombeau des saints Abdon et Sennen, but de nombreux pèlerinages.
Le Perthus (Pyrénées-Orientales), dimanche 15 septembre 1901
Nous avons quitté Arles ce matin après la messe ; une voiture nous a amenés à Amélie-les-Bains. Nous visitons la station, et, en particulier l’hôpital militaire reconstruit par mon grand-père Estève lorsqu’il était directeur du génie à Perpignan[119]. Une seconde voiture nous porte à Céret, que nous visitons, puis au Perthus en passant par la route qui longe la vallée de la rivière de Rome : cette rivière est ainsi nommée parce que l’ancienne route romaine des Gaules en Espagne y passait aussi ; c’est encore cette vallée que suivit Hannibal dans son passage des Pyrénées. Chemin faisant, nous voyons sur deux collines en face l’une de l’autre de chaque côté de la route, à droite en regardant au sud, l’autel de César, et à gauche les trophées de Pompée, vieilles ruines romaines que nous visiterons demain. À peine arrivés au Perthus, ville frontière dont certaines maisons sont françaises et d’autres espagnoles, nous grimpons au fort de Bellegarde où nous sommes très bien reçus par un lieutenant d’artillerie qui a connu autrefois l’oncle Hector à Douai. De la terrasse du fort, on a un superbe point de vue sur la France et sur l’Espagne. Le soir, nous allons nous promener en Espagne, puis nous assistons à un bal qui est donné dans notre hôtel ; j’y prends même part un moment.
Semaine du 16 au 22 septembre 1901
Vinça, lundi 16 septembre 1901
Nous sommes partis du Perthus ce matin à 8h ; nous sommes allés à pied aux ruines des trophées de Pompée ; nous les visitons en détail ; cet examen nous convainc de l’exactitude de l’assertion de l’archéologue Freixe[120], qui assure que ces trophées, dont on ignorait la place, sont bien les ruines que nous avons sous les yeux ; nous visitons aussi les ruines d’un château féodal situé, comme les trophées, au hameau de l’Écluse haute. Des ruines des trophées, nous plongeons sur les ruines de l’autel de César que nous examinons à loisir, et sur la voie romaine dont on voit nettement des restes près de la rivière (on voit encore les ornières faites sur les dalles par les roues des chars). Nous déjeunons à l’établissement thermal du Boulou, et nous repartons, l’Oncle Hector et l’oncle Paul pour Cerbère, et moi pour Perpignan où je passe l’après-midi ; nous nous retrouvons à la gare de Perpignan pour le train de 7h et nous arrivons à Vinça à 8h15.
Ille, mardi 17 septembre 1901
Nous allons aujourd’hui nous installer à Ille. Papa, Maman, Marie-Thérèse et Philomène partent par le train de 3h35 ; je pars après eux, mais à bicyclette et j’arrive une dizaine de minutes après eux. Les bagages sont chargés sur le chariot. Maman emploie la fin de l’après-midi à s’installer dans la maison à Ille.
Ille, mercredi 18 septembre 1901
Le matin, nous allons tous à une grand’messe à l’église paroissiale ; l’après-midi, je fais d’abord des recherches dans les papiers de la maison de Bosch ; puis je vais à Corbère savoir avec le fermier à quel moment on commencera à vendanger dans nos vignes. Je visite les vignes, la quantité est assez faible, mais la qualité est bonne pour peu que le beau temps continue ; aussi, ne se pressera-t-on pas de vendanger de façon à laisser au raisin le temps de gagner encore en qualité.
Ille, jeudi 19 septembre 1901
Nous avons pris le train de midi qui nous a menés à Perpignan à 1h ; l’Oncle Paul était avec nous pour voir des panneaux d’armoire à réparer. Ensuite, nous faisons quelques commissions, une visite à M. et Mme Vassal[121], puis nous allons chez tante Bonafos[122], l’oncle et la tante Lutrand[123], où nous attendent Mme et Mlle de Llamby[124]. On nous sert un excellent five-o-clock. Nous revenons à la gare pour le par le train de 7h ; chemin faisant, nous rencontrons l’oncle Albert et mes deux cousines, Suzanne et Madeleine de Lazerme[125] ; il nous accompagne à la gare. Nous arrivons à 8h.

Ille, vendredi 20 septembre 1901
Nous allons dans l’après-midi à Bouleternère voir finir les vendanges ; nous y rencontrons Bonne Maman, l’oncle Hector, l’oncle Paul, tante Josepha et Nénette, à qui nous avions donné rendez-vous.
Ille, samedi 21 septembre 1901
Je vais à Vinça prendre dans le cabinet de Bon Papa une notice sur la baronnie du Pouget contenant des renseignements très précis sur la famille de las Hermes[126], de laquelle descend la famille Lazerme ; le nom s’est modifié et mon oncle Joseph, l’aîné de la famille, qui a voulu reprendre l’ancienne forme, est en ce moment en Cassation pour cette affaire ; j’espère que ce document va lui servir ; je vais l’envoyer à M. Dorel, avoué de Perpignan, qui s’occupe de cette affaire. J’espérais pouvoir revenir à Ille à cheval, la pluie m’en empêche et je rentre en chemin de fer.
Ille, dimanche 22 septembre 1901
Nous allons à tous les offices. L’après-midi, je vais avec Papa faire deux visites : à la marquise de Dax d’Axat et à Mme Terrats d’Aguillon[127] ; Maman, fatiguée, ne peut les faire avec nous.
Semaine du 23 au 29 septembre 1901
Ille, lundi 23 septembre 1901
J’accompagne Marie-Thérèse et Philomène à Vinça par le train de 10h30 ; je rentre à cheval.
Ille, mardi 24 septembre 1901
Je pars pour Vinça par le train de 10h30, j’arrive tout juste pour assister à la messe de mariage de M. d’Arx, ingénieur électricien, avec Mlle Rouire[128]. Je repars à cheval en passant par Bouleternère ; je fais même une pointe jusqu’à La Ferrière où je vais saluer ma tante et mes cousines de Barescut[129]. Marie-Thérèse et Philomène reviennent en chemin de fer.
Ille, mercredi 25 septembre 1901
Nous avons la visite de notre tailleur, M. Charouleau, qui vient essayer nos costumes d’hiver. Il nous annonce le départ des Pères Cisterciens de Fontfroide pour l’Espagne où ils vont s’établir ; il a assisté ce matin au départ de 12 d’entre eux. Conséquence de la misérable loi d’association élaborée par le cabinet Waldeck-Rousseau !
Ille, jeudi 26 septembre 1901
Dans la matinée, je vais fouiller les vieux papiers de la maison de Bosch. À midi, nous recevons à déjeuner Bonne Maman, l’oncle Paul, tante Josepha, l’oncle Hector et Nénette ; l’après-midi, après leur avoir fait visiter les curiosités d’Ille, nous allons avec eux à Millas où nous allons voir nos cousins Ferriol et à La Ferrière, voir nos cousins de Barescut. Bien que nous fassions ces visites dans le grand omnibus attelé de 2 chevaux, nous rentrons très tard.
Ille, vendredi 27 septembre 1901
Le matin, je continue mes recherches à la vieille maison. L’après-midi, nous allons, avec Papa, aux vendanges de Corbère.
Ille, samedi 28 septembre 1901
Le matin, je fais des recherches parmi les papiers de la grande maison. L’après-midi, je vais à bécane à Vinça pour voir l’oncle Paul avant son départ pour Toulouse ; je le vois à Bouleternère où il est pour affaire avec l’oncle Hector.
Ille, dimanche 29 septembre 1901
L’après-midi, nous avons une foule de visites : la famille Roca d’Huytéza[130], Mlle Trainier[131], mon oncle, ma tante et ma cousine de Barescut, le marquis, la marquise et Henri de Dax d’Axat[132], le lieutenant et Mme Naugès. Le soir, je vais avec Papa chez les demoiselles Matthieu pour assister de chez elles au dépouillement du scrutin pour les élections de 8 conseillers municipaux qui a eu lieu aujourd’hui, et qui promet d’être orageux. Le dépouillement est terminé quand nous y arrivons, et nous apprenons le succès de la liste du Dr Etienne Batlle[133], qui est la moins avancée, mais à la place, nous assistons au bal en plein air qui a lieu sous leurs fenêtres. Marie-Thérèse, qui se sent fatiguée, est obligée de se coucher de bonne heure, et Maman fait appeler le Dr Trainier qui constate une fatigue d’estomac. Quand nous rentrons de chez les demoiselles Matthieu, nous trouvons à la maison mon ancien précepteur, M. l’abbé Latour, qui nous arrive pour plusieurs jours, espérons-le, du moins !
Semaine du 30 septembre 1901
Ille, lundi 30 septembre 1901
Je passe la matinée et l’après-midi à fouiller de vieux papiers à la grande maison, à cause de la pluie qui m’empêche de me promener dans la campagne.
Octobre 1901
Semaine du 1er au 6 octobre 1901
Ille, mardi 1er octobre 1901
Le matin, je sers la messe à M. l’abbé, puis je fouille de vieux papiers sur la famille de Corneilla, dans la maison que nous habitons[134]. L’après-midi ; je vais avec papa à Bouleternère pour plusieurs affaires.
Ille, mercredi 2 octobre 1901
Bonne Maman, tante Josépha, Nénette et l’oncle Hector arrivent de Vinça à 10 ½, et à midi ½, nous partons en omnibus malgré la pluie Bonne Maman, tante Josepha, l’oncle Hector, M. l’abbé, Maman, Papa et moi pour Bélesta ; là, avec le curé, M. Badrignans, nous allons visiter le Château de Caladroer[135] situé à 1 heure environ de Bélesta. Du vieux château féodal, il ne reste plus que deux tours qui ont été un peu restaurées, mais, à côté, la famille Delebart (richissimes industriels de Lille) a bâti une splendide villa moderne avec de magnifiques salons. L’abbé Badrignans, curé, nous présente à Mme Delebart[136] qui nous fait les honneurs du Château avec une exquise amabilité ; la cour d’entrée est encore enguirlandée en l’honneur de Mgr de Carsalade du Pont, évêque de Perpignan, qui est venu bénir la chapelle avant-hier. Quand nous rentrons à Bélesta, un goûter somptueux nous attend chez le curé. Nous quittons Bélesta à 6h, et nous arrivons à Ille à plus de 7 heures ; il fait nuit noire et il pleut. Les chevaux étant trop fatigués pour rentrer à Vinça, coucheront à Ille et Bonne Maman, avec ses hôtes, regagne Vinça par le train de 8h15.
Ille, jeudi 3 octobre 1901
Le matin, je vais dans la campagne avec Papa, puis à la grande maison. L’après-midi, nous allons tous sauf Marie-Thérèse, qui est encore fatiguée, chez les Barescut. Je fais la connaissance de ma cousine Jeanne, qui est mariée depuis le 9 août 1898 avec mon cousin le capitaine Maurice de Barescut.
Ille, vendredi 4 octobre 1901
Papa et Maman partent pour Perpignan par le train à 3h pour Vinça avec nos cousines Ferriol[137] qui sont venues nous voir à Ille et qui, de là, vont voir Bonne Maman. À Vinça, je vais voir la vigne de Rigarda où l’on achève la vendange. Je Rentre à Ille avec les Ferriol ; M. l’abbé reste à Vinça.
Ille, samedi 5 octobre 1901
Nous avons à déjeuner M. le curé d’Ille et nos cousins Joseph et Pierre Cornet de Bosch. Nos cousins partent pour Perpignan par le train de 4h, en même temps que M. l’abbé qui va à Toulouse.
Ille, dimanche 6 octobre 1901
Dans la journée, nous assistons aux offices de l’Église ; à vêpres, on chante « Ave Maria Stella » sur l’air de l’ancien hymne national catalan « Montanas regaladas ». Le soir, nous quittons Ille par le train de 8h et nous arrivons à Vinça à 8h15.
Semaine du 7 au 13 octobre 1901
Ille, lundi 7 octobre 1901
Ce matin à Vinça nous avons assisté, à 8h, au service célébré pour le 6e anniversaire de la mort de mon grand-père de Lazerme. Nous repartons pour Ille par le train de 6h30.
Vinça, mardi 8 octobre 1901
Nous devrions tous repartir pour Vinça par le train de 3h ; mais Marie-Thérèse, qui était sortie trop tôt après ses accès de fièvre de la semaine dernière, se trouve très fatiguée ; elle a une forte fièvre dès le matin. Le Dr Trainier, appelé, craint une fièvre muqueuse. Aussi, Maman me fait partir par le train de 10h30. L’après-midi, je vais à cheval à Prades et je retourne à Vinça à 5h ½.
Vinça, mercredi 9 octobre 1901
L’après-midi, nous allons tous à Finestret faire deux visites, les dames et l’oncle Hector sont en voiture ; je les suis à cheval. Le matin, Papa est venu d’Ille et nous a donné des nouvelles de Marie-Thérèse dont l’état paraît s’améliorer.
Vinça, jeudi 10 octobre 1901
L’après-midi, je vais avec l’oncle Hector à Bouleternère où l’on pressure la vendange. Nous y trouvons Papa, qui y est venu d’Ille. Il nous donne des nouvelles rassurantes de Marie-Thérèse.
Vinça, vendredi 11 octobre 1901
L’après-midi, je vais à cheval à Ille avec Jacques, je trouve Marie-Thérèse levée et en bien meilleure santé. Je pousse jusqu’à La Ferrière voir nos cousins de Barescut ; quand je rentre à Vinça, il fait nuit.
Ille, samedi 12 octobre 1901
Je quitte Vinça par le train de midi ; je déjeune à Ille et j’assiste aux vêpres de l’adoration perpétuelle. À quatre heures, nous avons tout à coup la bonne surprise de voir arriver mon cousin Maurice Estève qui a obtenu une permission de quinze jours et qui vient passer ce temps en Roussillon. Il habite la maison contiguë à la métairie de son père, mais il va venir prendre tous ses repas à la maison. Je me promène avec lui.
Vinça, dimanche 13 octobre 1901
Je suis resté à peu près toute la journée avec Maurice, qui produit un effet épatant avec son uniforme de maréchal des logis de hussards et son superbe shako à plumet. Je rentre à Vinça par le train de 8 heures du soir.
Semaine du 14 au 20 octobre 1901
Ille, lundi 14 octobre 1901
À l’occasion du double anniversaire de ma naissance (19e) et de ma guérison en 1889 (12e), nous voulions entendre la messe et communier ; mais le curé est malade et le vicaire est absent, nous sommes obligés de remettre ces dévotions à demain. Je pars avec Philomène par le train de midi pour Perpignan, Papa nous rejoint à Ille et nous allons tous les trois déjeuner à Perpignan chez ma tante Cornet de Bosch ; toute l’après-midi, nous nous promenons avec Joseph, Pierre et Marie, qui sont pleins d’attention pour nous. Nous rentrons à Vinça par le train de 8h ¼.
Vinça, mardi 15 octobre 1901
Je vais à Ille à midi ; je vais chasser avec Maurice, mais nous ne trouvons pas un seul oiseau ; je rentre à Vinça à 8h15.
Vinça, mercredi 16 octobre 1901
L’oncle Hector nous quitte aujourd’hui ; il part pour Cette où il va voir un parent avant de rentrer à Paris. Maurice arrive à 3h ½, il vient passer la nuit ici, de façon à être prêt à partir de meilleure heure demain pour Rodès.
Vinça, jeudi 17 octobre 1901
Malgré le temps menaçant et même un peu de pluie, nous partons, Maurice et moi, pour Rodès, où nous attend Joseph Cornet. Il nous fait visiter le vieux château en ruines de Rodès où ses ancêtres, gouverneurs de Rodès sous la domination espagnole, se sont défendus pendant 3 jours contre les assauts des Français. À la suite de ce brillant fait d’armes, le roi d’Espagne leur donna des lettres de noblesse ; mais les Cornet qui restèrent en France ne purent s’en prévaloir, le gouverneur français du Roussillon, le fameux Sagarre, le leur ayant interdit ; au contraire, ceux qui émigrèrent en Espagne s’en prévalurent et entrèrent dans l’armée espagnole. Après déjeuner, nous partons pour la forêt de Canahettes ; cette forêt, qui a plus de 200 hectares, appartient toute entière à Joseph ; elle est située sur la montagne qui sépare Serrabonne de Domanova. La ferme la plus élevée est à près de 1000m d’altitude. La forêt a été mise par Joseph en coupes réglées ; en ce moment, des charbonniers qui lui ont acheté ses chênes verts, ou yeuses, en font du charbon ; il y a aussi un assez grand nombre de chênes lièges et beaucoup de bruyères surtout. Il y a un peu de gibier ; chemin faisant, nous rencontrons 3 salamandres. Nous rentrons à Vinça, dans la voiture de Joseph ; nous arrivons vers 6h du soir.
Vinça, vendredi 18 octobre 1901
Je pars pour Perpignan par le train de 5h45 du matin ; Maurice part avec moi, mais il s’arrête à Ille. À Perpignan, je fais diverses commissions ; je visite la bibliothèque où je fais quelques recherches ; je vais déjeuner chez ma tante Bonafos. L’après-midi, je vais faire ma visite de digestion chez ma tante Cornet de Bosch, que je ne rencontre pas, et je devais faire une visite à Madame de Llamby, mais je la rencontre dans la rue, ce qui m’en dispense ; j’ai rencontré aussi M. Dalverny, Mme Terrats d’Aguillon, René de Chefdebien[138], Charles de Guardia et son père[139]. Je rentre à Vinça à 8h ¼. Je trouve Maman au lit ; une légère fatigue l’a empêchée de se lever ce matin. Je trouve aussi deux lettres de faire-part, l’une de décès, l’autre d’un mariage ; la première annonce la mort de la sœur de Jacques Hervé-Bazin, en religion sort de l’Agnus dei, décédée en Belgique où sa congrégation avait émigré par suite de la loi si injuste sur les associations (j’écrirai demain à Hervé-Bazin pour lui présenter mes condoléances). La seconde annonce le mariage de mon cousin, M. Léon van den Zande[140], à Bordeaux, avec Mlle Édith de Roland, fille du comte de Rolland ; voici comment je suis parent avec M. van den Zande : mon bisaïeul Antoine de Pontich, père de ma grand-mère de Lazerme, était fils d’une demoiselle de Sicart de Taqui ; il avait un cousin germain nommé de Sicart d’Aloigny qui a épousé une demoiselle de Miquel de Riu ; de ce mariage naquit Adèle de Sicart d’Aloigny qui épousa le baron d’Appat. Du mariage du baron d’Appat avec Mlle de Sicart d’Aloigny sont issus : Jules d’Appat, enseigne de vaisseau, qui a épousé Mlle de Linois, fille de l’amiral, et Mlle d’Appat, qui est devenue Mme van den Zande, celle dont le fils s’est marié le 30 septembre. Mme van den Zande a aussi une fille, Marthe van den Zande.
Vinça, samedi 19 octobre 1901
Le temps est sombre et froid, je ne fais qu’une courte promenade.
Vinça, dimanche 20 octobre 1901
Il pleut, nous n’allons qu’aux offices ; je reçois une carte de ma tante Cornet m’invitant à aller déjeuner demain chez elle à Perpignan ; décidément, ils me comblent !
Semaine du 21 au 26 octobre 1901
Vinça, lundi 21 octobre 1901
Je pars pour Perpignan par le train de 5h50. À Ille, je suis rejoint par Maurice qui est invité aussi chez les Cornet. Nous passons la matinée à visiter Canet, ou plutôt la plage de Canet où nous sommes venus au moyen du tram électrique, et les abords de l’étang de Saint-Nazaire sur les bords duquel est construit, au milieu d’un grand vignoble, le château de l’Espardoux[141] qui appartient à la famille Sauvy. Le domaine de l’Espardoux appartenait autrefois à mon oncle Henri de Lazerme, père de Bon Papa. C’est lui qui l’a vendu au Sauvy et ceux-ci y ont construit le château. Nous déjeunons à midi, et nous passons l’après-midi à nous promener avec Joseph et Pierre jusqu’à l’heure du départ. J’arrive à Vinça à 8h ¼.
Vinça, mardi 22 octobre 1901
Le matin, je vais à bicyclette, d’abord à Rigarda pour réclamer à Garrigue le cheval que nous lui avons loué, puis à Ille ; pendant l’après-midi, je prends avec Maurice des vues dans la garrigue, côteaux sablonneux, au nord d’Ille ; je rentre à Vinça à 5h à bicyclette.
Vinça, mercredi 23 octobre 1901
Je vais à Ille à cheval, je passe la plus grande partie de l’après-midi à mettre en ordre, avec Jean et Papa, les papiers qui courent par terre dans les chambres de la grande maison. Je rentre à Vinça par le train à 8h ¼, après avoir fait mes adieux à Maurice qui part demain matin à 6h pour Montauban, Paris et Verdun.
Vinça, jeudi 24 octobre 1901
Je vais à Ille à cheval. Nous attendions les experts qui devaient venir de Perpignan pour évaluer la grande maison. Joseph Cornet, qui est venu pour les voir, déjeune chez nous, mais les experts n’arrivent pas ; une dépêche de Pierre Cornet nous apprend qu’ils n’ont pas pu venir aujourd’hui, mais qu’ils seront à Ille demain. Papa invite Joseph à revenir déjeuner demain. Je repars à cheval à 4h ½ et j’arrive à Vinça vers 5h ½.
Ille, vendredi 25 octobre 1901
Joseph Cornet arrive à Ille vers 11 heures ; Maman et Marie-Thérèse en voiture et moi à cheval nous sommes arrivés à 9h ½ ; après le déjeuner, les experts visitent la grande maison[142], ils l’évaluent 27.000 francs ; c’est 10 à 12.000 francs de plus que nous ne pensions ; comme Papa n’en a que les 9/20 et que pour nous y installer il faudrait indemniser les autres cohéritiers de l’oncle Victor, il est à craindre que ce prix élevé soit un obstacle à notre installation dans cette maison lors de notre retour à Ille.
Ille, samedi 26 octobre 1901
Le matin à 9 heures, nous assistons au mariage de Mlle Joséphine Trainier, fille du Dr Trainier, d’Ille, avec M. Albert Batlle, de Vinça[143]. Maman repart pour Vinça par le train de 10h30 avec Marie-Thérèse, moi je reste jusqu’à lundi. L’après-midi, je vais avec Papa du côté de notre ancienne vigne de Régleille qui a disparu depuis le phylloxéra. Cette vigne qui est sur un côteau au-dessus de la rivière de la Tet, subit une diminution de superficie à chaque crue de cette rivière et les voisins en profitent pour planter des prairies et des jardins sur les terrains que nous enlève la rivière. Papa a l’intention, non de les chasser de ces terrains, mais de les obliger à reconnaître par un écrit son droit de propriété et à se considérer comme ses fermiers.
Vinça, dimanche 27 octobre 1901
Nous assistons à tous les offices ; après vêpres, nous allons nous promener jusqu’aux Escatllas, nous passons la soirée chez les demoiselles Mathieu.
Semaine du 28 au 31 octobre 1901
Vinça, lundi 28 octobre 1901
Le matin je vais prendre une photographie des ruines de Régleille, puis je vais avec Papa à la Mairie prendre le calque du territoire de Régleille sur le cadastre ; nous nous apercevons que le point du territoire où se trouve notre ancienne vigne ne s’appelle pas Régleille mais bien « Portal de la Sal ». L’après-midi, je vais avec Papa, Dominique Valé, notre fermier de Casenove, et un géomètre, M. Domenach, sur cette vigne ; M. Domenach la mesurera plus tard afin de se rendre bien compte si les nouvelles prairies sont bien chez nous ; en attendant, il vient prendre une première idée des lieux. Nous voyons le plan d’une nouvelle prairie qui a été tracé sur un terrain abandonné par la rivière et qui nous appartient ; c’est un individu qui l’a tracé avec des pierres ; Dominique Valé enlève le tracé et inscrit sur une pierre ces mots : « Défense d’y touché (sic) sans permission » aux applaudissements de Mlle Trésine Mathieu qui le voit opérer de sa propriété. L’ex-futur planteur sera bien attrapé ! Et une autre fois, avant de tracer le projet d’une prairie sur le terrain d’autrui, il viendra demander la permission au propriétaire. Je rentre à Vinça par le train de 8h15.
Vinça, mardi 29 octobre 1901
Nous devions aller à Prades, mais la pluie qui dure toute la journée nous en empêche. Je vais vérifier sur le cadastre la contenance de la propriété de « Bente farines » où nous devons faire une plantation de chêne-liège. J’écris à Margot une lettre de condoléances à l’occasion de la mort de son frère, M. Frédéric des Cordes, un jeune homme de 25 ou 26 ans, mort il y a quelques jours en mer pendant un voyage à Saint-Pierre-et-Miquelon ; son cadavre a été débarqué à Lisbonne où il a été inhumé. Pauvre garçon ! Et dire qu’il y aura demain un an du mariage de Xavier où il était garçon d’honneur avec Marie-Thérèse !
Vinça, mercredi 30 octobre 1901
La pluie continue presque toute la journée, aussi nous ne pouvons pas aller à Domanova comme nous en avions fait le projet ; à peine une éclaircie nous permet-elle de nous promener un moment après déjeuner.
Vinça, jeudi 31 octobre 1901
Il pleut encore toute la journée. Nous nous confinons dans la maison. Le matin, nous déballons avec Maman les anciennes tentures Louis XV qui étaient au salon d’Ille, car Maman veut en emporter une partie à Angers.
Novembre 1901
Semaine du 1er au 3 octobre 1901
Ille, vendredi 1er novembre 1901
C’est aujourd’hui la fête de la Toussaint. Le matin, nous assistons à la grand’messe à Vinça ; à midi, malgré une pluie battante, nous partons pour Ille où nous assistons aux vêpres ; la pluie dure jusqu’à 3 heures de l’après-midi, puis elle s’arrête assez brusquement. Il était temps, car depuis quatre jours, il est tombé 137 millimètres d’eau ! Et les rivières sont très fortes ; si la pluie avait continué un jour de plus, on aurait eu à déplorer un désastre.
Vinça, samedi 2 novembre 1901
Le matin, j’assiste avec Papa à l’office des morts à Ille, puis je vais me promener ; l’après-midi, procession au cimetière, on m’invite à porter un des quatre glands d’un drap mortuaire, Papa en tient un autre. Après la procession, Papa, M. Truillès[144] et moi allons à Bouleternère pour mesurer la bande de terrain que Papa vend à un de nos voisins M. Coste. M. Truillès dresse l’acte que Papa et M. Coste signent séance tenante. Le prix est de 3,75 francs le mètre carré, car cette bande qui touche aux maisons de Bouleternère est considérée comme terrain à bâtir. Nous rentrons à Ille à pied et je rentre à Vinça par le train de 8h15.
Vinça, dimanche 3 novembre 1901
Nous assistons à la grand’messe et à vêpres ; après les vêpres, on va processionnellement au cimetière. Papa y vient avec nous, car il est arrivé par le train de 3h30, porteur de l’acte fait hier à Bouleternère, il le fait signer à Maman, la bande de terre vendue étant détachée d’une propriété de Maman, qui est un bien dotal, cette signature était nécessaire.
Semaine du 4 au 10 novembre 1901
Vinça, lundi 4 novembre 1901
Le matin, je vais me promener à cheval jusqu’à Espira ; l’après-midi, je vais avec Amiel et un marchand de bois nommé Clottes à Bentefarines ; ce Clottes choisit 35 oliviers, pris parmi ceux qui ne produisent rien ; il les abattra la semaine prochaine en nous en donnera 100 francs. Cet argent paiera les frais de la plantation des chênes lièges.
Vinça, mardi 5 novembre 1901
Le matin, je vais me promener à cheval sur la route de Velmanya ; l’après-midi, nous allons tous à Prades. Nous allons voir ma tante et mes cousines de Saint-Jean que nous rencontrons. Voici comment nous sommes parents avec les De Saint-Jean : une demoiselle Lazerme, sœur de mon bisaïeul, épousa le marquis d’Argiot de Lafferrière ; ils eurent une fille qui épousa M. Balalud de Saint-Jean ; du mariage de Mlle de Lafferrière avec M. de Saint-Jean, naquit un fils, M. de Saint-Jean, décédé, qui a épousé Mlle de Romeu[145], actuellement vivante, et que nous sommes allés voir aujourd’hui ; elle a 3 garçons, Hyacinthe, Emmanuel et Joseph, et deux filles, Thérèse, qui a épousé M. Felip, décédé, dont elle a un fils, Xavier Felip, et Marguerite qui n’est pas encore mariée. Nous voyons en même temps que ma tante Thérèse, Marguerite et Emmanuel ; Hyacinthe et Joseph sont absents. Nous voyons aussi à Prades notre cousin M. Emile Marie et sa femme, qui est une demoiselle Sèbe-Boluix, c’est par elle que nous sommes parents[146]. Maman voit ici la nièce de son ancienne nourrice, Mlle Pejouan. Nous rentrons à Vinça à 7h.


Vinça, mercredi 6 novembre 1901
Le matin à 8h ½, je pars pour Ille à cheval, Jacques me suit avec la voiture ; à Ille, Papa monte en voiture et nous allons, toujours dans le même équipage, à Corbère-les-Cabanes où nous allons voir le champ de l’Aire que Papa a acheté lundi à Pierre Cornet. Nous rentrons à Ille pour déjeuner, l’après-midi, nous faisons différentes commissions, puis, à 4h, je repars pour Vinça à cheval, Jacques me suit avec la voiture qui porte la malle de Papa. Maman a quitté Vinça par le train de midi ; elle sera ce soir à 8h de Toulouse où elle passera un jour chez tante Josepha ; nous irons l’y retrouver pour quelques heures, demain soir.
Vinça, jeudi 7 novembre 1901
Dans la matinée, je fais quelques visites d’adieu ; j’assiste aussi à une partie de l’audience à la justice de paix ; nous déjeunons à 10h ½ et nous partons par le train de midi, Papa, Marie-Thérèse, Philomène et moi. Bonne Maman, Philomène grande, Amédée et Mimi Jocaveil nous accompagnent à la gare. À Perpignan où nous avons plus de deux heures à perdre, nous faisons quelques commissions, et nous visitons l’église Saint-Jacques, l’église Saint-Mathieu et le cimetière où nous allons prier sur la tombe qui contient les restes de mon grand-père et de ma grand-mère Estève, de ma tante Rose Estève et de mon oncle Gaëtan Civelli. Nous arrivons à Toulouse à 7h40 ; un excellent dîner nous attend chez mon oncle le colonel Magué où nous retrouvons Maman ; nous passons chez mon oncle et ma tante une charmante soirée et, à onze heures, nous les quittons pour regagner la gare d’où nous repartons à 11h55 pour Bordeaux.
Angers, vendredi 8 novembre 1901
Nous arrivons à Bordeaux à 5h22 du matin ; Papa et moi nous en repartons dix minutes plus tard pour Saintes où nous devons nous arrêter. Maman, Marie-Thérèse et Philomène attendent le train de 8h50. Nous arrivons à Saintes à 8h36. Aussitôt, nous nous mettons à la recherche de la rue Saint-Eutrope où habite l’abbé Bourdé de Villeliné, à qui nous allons faire une visite et dont nous allons faire la connaissance, car Papa correspond avec lui depuis 10 ans sans le connaître. Il nous attendait ; il nous fait visiter la belle basilique romane Saint-Eutrope, puis il nous accompagne à la gare pour le train de 11h5 avec la plus grande amabilité ; nous le trouvons très distingué. À la gare, nous rejoignons Maman et mes sœurs et nous faisons route ensemble pour Angers où nous arrivons à 4h35 ; nous trouvons la température très basse comparativement à celle du Roussillon.
Angers, samedi 9 novembre 1901
Le matin, je vais aux cours de droit romain (M. Coulbault) et de droit administratif (Papa). C’est le premier cours de Papa auquel j’assiste. L’après-midi, je fais différentes courses en ville. Je vais voir le P. Vétillart, jésuite, qui habite une maison en ville et qui met sur ses cartes « l’abbé Vétillart » depuis que la compagnie s’est dispersée par suite de la loi du 3 juillet dernier sur les associations (C’est un bon tour joué au gouvernement ! Les Jésuites ne forment plus une association puisqu’ils ne vivent pas ensemble, mais ils n’en continuent pas moins à diriger leurs œuvres). Je m’entends avec le P. Vétillart au sujet du cours de l’École d’agriculture que je pourrai suivre ; j’en aurai 5 par semaine (4 d’agriculture par M. Lavallée, et un de météorologie par M. Couette). Le soir, après dîner, conférence de Saint-Vincent-de-Paul.
Angers, dimanche 10 novembre 1901
Le matin, je vais à la grand’messe en musique de l’église Notre-Dame où l’on célèbre la fête de l’adoration. L’après-midi, j’assiste au Patronage Saint-Serge à une pièce de Brisebarre et Nus Les pauvres de Paris[147], fort bien jouée par les jeunes gens du Patronage, mais fort mal choisie à mon avis, car elle met en scène un banquier qui file avec sa caisse, qui fait faillite en emportant l’argent de ses clients et qui, réhabilité plus tard, persécute encore ceux qu’il a ruinés. Une telle pièce, d’une haute portée sociale, ne devrait pas être jouée devant des enfants du peuple, incapables pour la plupart de raisonner froidement ; elle risque de les exciter contre la société en mettant sous leurs yeux un de ses plus mauvais côtés.
Semaine du 11 au 17 novembre 1901
Angers, lundi 11 novembre 1901
Le matin, un assez fort mal de gorge, qui avait déjà commencé hier, m’empêche d’aller aux cours, je garde le lit jusqu’à onze heures et demis. Papa part pour Le Mans où il va accompagner Philomène au Sacré-Cœur par le train de 1h11. À 5h, je vais au cours d’agriculture de M. Lavallée.
Angers, mardi 12 novembre 1901
Le matin, mon rhume étant guéri, je vais aux cours, l’après-midi, après diverses commissions, je vais au cours d’agriculture, le soir à 8h, j’assiste avec Papa à une conférence donnée à la Salle des Quinconces par M. Renault[148], directeur du nouveau journal La Délivrance sur « Le rôle des Protestants sectaires, associés aux Juifs et aux Francs-maçons, dans la politique actuelle ». L’orateur, auteur du Péril protestant, a fondé La Délivrance et a entrepris une campagne de conférences dans toute la France pour mettre en relief la place beaucoup trop considérable occupée par les Protestants, qui ne sont que 500.000 en France en face de 37.000.000 de catholiques, dans toutes les administrations ; cette prédominance est un danger pour la religion catholique et pour la nationalité française car les Protestants ont leurs attaches et leur idéal chez nos ennemis, les Allemands et les Anglais. En terminant, l’orateur flétrit comme il convient le ministère « trois fois infâme » de défense républicaine. M. Renauld, jeune, grand, à la figure avenante, est nerveux et très énergique ; il n’avance rien sans preuves ; aussi la campagne qu’il a entreprise est-elle appelée, selon toutes prévisions, à un grand succès.
Angers, mercredi 13 novembre 1901
Le matin, cours de droit ; l’après-midi, il n’y a pas de cours d’agriculture, j’en profite pour faire diverses commissions ; je vais à l’escrime notamment, où je retrouve, à peu de chose près, les mêmes personnes que l’année dernière : de Charnacé, Cochin, etc. ; j’apprends que mon ancien professeur, M. Delahaye, y vient tous les soirs.
Angers, jeudi 14 novembre 1901
Le matin, cours de droit ; il paraît que pendant les cours, l’abbé Bosseboeuf, candidat blackboulé aux élections législatives de 1898 et probablement futur candidat pour 1902, est venu prendre une inscription de doctorat ; on la lui a refusée, alors il est venu avec deux témoins faire constater le refus. Cette démarche semble indiquer chez l’abbé Bosseboeuf l’intention de ne pas quitter Angers ; c’est précisément ce qui lui a fait refuser l’inscription. Car Mgr Rumeau, évêque d’Angers, craignant avec raison que la candidature de l’abbé Bosseboeuf ne soit de nature à diviser le parti catholique et conservateur et à assurer le triomphe du candidat radical et franc-maçon, comme en 1898, a obtenu de l’archevêque de Tours qu’il rappelât l’abbé Bosseboeuf dans le diocèse de Tours d’où il est venu ; l’abbé a été nommé curé d’une paroisse d’Indre-et-Loire, mais il n’a pas encore rejoint son poste et sa démarche de ce matin semble faire croire qu’il n’obéira pas à son archevêque. Mgr Rumeau, qui avait deviné les projets de l’abbé Bosseboeuf, avait sans doute donné l’ordre au secrétaire de la Faculté de refuser l’inscription.
Dans l’après-midi, je vais faire une visite à M. Coulbault, professeur de droit romain, que je rencontre, à M. Jac, professeur de droit civil, que je ne rencontre pas ; je vais voir aussi M. Delahaye que je rencontre. À 5h, Papa et moi nous allons à la Faculté des sciences assister à un cours de météorologie par M. Couette. Le soir à 8h, à la salle de la rue Rabelais, réunion préparatoire de la Jeunesse catholique ; j’y vais.
Angers, vendredi 15 novembre 1901
Le matin, cours à la Faculté. L’après-midi, je vais faire une visite à M. Jac, puis, à 5h ½, cours d’agriculture. À 8h, à la salle de la rue Rabelais, réunion préparatoire de la Conférence Saint-Louis, nous procédons aux élections des dignitaires : le comte Henry de Saint-Pern[149] est élu président en remplacement de M. Normand d’Authon, qui ne se représentait pas ; M. Couteau est élu premier vice-président en remplacement de M. de Saint-Pern, élu président ; M. de Monti de Rezé[150] est élu second vice-président ; Jacques Hervé-Bazin est élu secrétaire en remplacement de Couteau élu vice-président ; enfin M. de Monsabert[151] est élu trésorier en remplacement de M. de Berthois qui a quitté Angers. Ce sont de bons choix ; la première séance de la Conférence aura lieu le lundi 25 novembre.
Angers, samedi 16 novembre 1901
Le matin, cours de droit. L’après-midi, à 2h cours d’agriculture ; puis, je vais faire une visite à M. René Bazin ; je vais me confesser au curé de Saint-Jacques, et à 5h ½, je vais à l’escrime. Le soir, à 8h, Conférence de Saint-Vincent-de-Paul.
Angers, dimanche 17 novembre 1901
Le matin, je vais à la messe de 8h à Saint-Joseph où je communie ; je vais ensuite à la grand’messe à Notre-Dame. L’après-midi, je fais plusieurs visites, je ne rencontre personne. À 4h, j’assiste à un lâcher de pigeon sur la place de Lorraine ; il est organisé par la Société colombophile de Maine-et-Loire. Je vais au salut à 6h ½ dans l’ancienne chapelle des Pères Jésuites organisée en chapelle de secours pour l’église Saint-Serge.
Semaine du 18 au 24 novembre 1901
Angers, lundi 18 novembre 1901
Le matin, cours de droit (M. Bazin oublie de venir faire le sien). À 5h ¼, cours de botanique par l’abbé Noffray. À 8h ¼, a lieu dans la grande salle de conférences de l’Université la séance solennelle de rentrée ; elle est présidée par le cardinal Labouré, archevêque de Rennes[152], il y a aussi plusieurs des évêques protecteurs de l’Université. On distribue les médailles et les récompenses des concours. Puis Mgr Pasquier, recteur de l’Université, fait un rapport sur les travaux de l’année écoulée ; la séance se termine par une allocution du cardinal Labouré.
Angers, mardi 19 novembre 1901
Le matin, a lieu à la chapelle de l’internat la messe du Saint-Esprit célébrée par l’évêque d’Angoulême ; Mgr de Durfort[153], du Mans, prélat de la Maison de Sa Sainteté, y prend la parole. À dix heure un quart, dans la salle de la Conférence Saint-Louis, séance de rentrée de l’École supérieure d’agriculture ; elle est présidée par M. L. de Maillé, duc de Plaisance[154], président du Conseil supérieur de l’école. Après quelques paroles du duc, on entend un rapport du P. Vétillart, directeur de l’école ; on constate avec plaisir que le nombre des élèves s’est beaucoup accru (29 inscrits) et l’école a à peine trois ans d’existence ; cela fait bien augurer pour l’avenir. L’abbé Noffray, professeur, prononce ensuite un long discours sur l’idéal de « l’agriculteur chrétien ». À midi, Papa dîne à l’Évêché avec les professeurs de l’Université ; c’est un véritable banquet, nous dit-il, il y avait 58 convives ; en dehors des évêques et des professeurs, il y avait les professeurs de l’École d’agriculture, le duc de Plaisance, le Père Vétillart. Le soir à 8h, nous assistons au Cirque-théâtre à une conférence donnée par le jonkher Sandberg, aide de camp du généralissime boer Louis Botha ; il est présenté à la nombreuse assemblée (environ 1800 personnes de toutes conditions) par M. Joubert ; quand il paraît, en uniforme d’officier transvaalien, il est accueilli par un tonnerre d’applaudissements et par de frénétiques acclamations. C’est avec des larmes dans la voix qu’il nous dépeint les souffrances atroces auxquelles les femmes et les enfants des Boers sont soumis dans les camps de concentration où les Anglais les parquent et où ils meurent par milliers (le pourcentage de la mortalité est énorme !) ; le jonkher nous renseigne ensuite sur la manière dont les Anglais font la guerre : comme les Boers faisaient sauter souvent les trains militaires anglais, les généraux britanniques ont imaginé de placer sur la locomotive de leurs trains des femmes ou des enfants boers tirés des camps de concentration, et qui protègent ainsi par leur présence les trains de leurs ennemis ! D’autres fois, pendant les batailles, les Anglais font ranger devant eux des femmes boers et tirent à l’abri de leurs corps ; les Boers alors, pour ne pas tirer sur leurs femmes, sont obligés d’aller au combat à cours de crosse ; si les femmes boers veulent fuir du champ de bataille, les Anglais les y ramènent à coups de fusil ou de canon ! En un mot, les Anglais, qui sont 250.000 contre 20 ou 25.000 boers, font une guerre de lâches et de sauvages. M. Sandberg fait faire une quête pour venir en aide aux femmes et aux enfants enfermés dans les camps de concentration, qui manquent du nécessaire ; cette quête lui rapporte environ 450 francs. Ensuite, il montre de curieuses projections de photographies prises sur le théâtre de la guerre. M. Sandberg s’exprime en français d’une façon un peu embarrassée, mais très suffisante ; son discours est coupé par de frénétiques applaudissements ; pour donner une idée de la grandeur d’âme de ces Boers, comme l’assemblée criait souvent « À bas les Anglais », il nous a repris doucement en disant : « Ne maudissais pas nos ennemis, je vous en supplie ».
Angers, mercredi 20 novembre 1901
Le matin, cours ; l’après-midi, j’assiste, à la Cour d’assises, à la condamnation à 5 ans de prison d’un vagabond pris en flagrant délit de vol, la nuit, avec effraction. Ensuite, je vais faire la visite des pauvres de Saint-Vincent-de-Paul, puis je vais chez M. Gavouyère, doyen de la Faculté de droit, que je rencontre, puis chez Mlle Grieshaber, que je ne rencontre pas. Le soir, Papa et Maman assistent, au théâtre, à la représentation de Quo Vadis, la pièce tirée du fameux roman de Sinkierrickz, qui porte le même nom ; la pièce est jouée par des acteurs de la « Porte Saint-Martin », qui font une tournée en province.
Angers, jeudi 21 novembre 1901
Le matin, cours de droit ; l’après-midi, j’assiste au Palais de justice à la condamnation à deux ans de prison d’un ancien domestique de la famille d’Andigné qui a cambriolé le château des D’Andigné près de Beaufort ; la vieille marquise d’Andigné[155] et Mlle d’Andigné viennent témoigner ; plusieurs domestiques de la famille viennent aussi témoigner. Les circonstances atténuantes ayant été admises (je me demande pourquoi ?), le voleur ne peut plus être condamné que de 1 à 5 ans de prison ; la Cour lui donne deux ans de prison ; au lieu que, sans les circonstances atténuantes, il aurait eu de 5 à 20 ans de travaux forcés. À 5 heures ¼, j’assiste au cours de météorologie de M. Couette, et à 8h, dans la chapelle de la rue Rabelais, à une réunion de la Congrégation à laquelle tous les étudiants – congréganistes ou non – ont été invités.
Angers, vendredi 22 novembre 1901
Le matin, cours de droit ; l’après-midi, je vais à bicyclette à la ferme de la Sermonnerie, entre Avrillé et Montreuil-Beffroy ; c’est la ferme d’expérience de l’École d’agriculture ; nous sommes plusieurs élèves, et M. Lavallée nous montre des bestiaux d’abord, puis des champs nouvellement ensemencés. Le soir à 8h ½, nous assistons à la représentation du cirque Plège ; après divers exercices fort bien exécutés, on exécute une pantomime en 4 actes qui représente d’abord des scènes de la vie chinoise, des Européens implantés en Chine, puis une fête au Palais impérial, les massacres des Européens par les Boxers, enfin la prise de Pékin par les armées alliées et des danses exécutés par les soldats alliés dans le Palais impérial ; les costumes étaient très riches, et la couleur locale respectée.
Angers, samedi 23 novembre 1901
Le matin cours de droit. À 2 heures, cours d’agriculture de M. Lavallée ; ensuite, je vais, avec Marie-Thérèse, voir le curé de Saint-Jacques, l’abbé Brossard ; enfin, je vais à la leçon d’escrime. Le soir, conférence de Saint-Vincent-de-Paul.
Angers, dimanche 24 novembre 1901
Le matin, je vais à la messe de communion de 8 heures à Notre-Dame ; on célèbre la fête d’une société de secours mutuels, et le chanoine secrétaire prononce une allocution. L’après-midi, je vais au Patronage Saint-Serge. Puis je vais féliciter Roger Follenfant du succès de son examen de rhétorique.
Semaine du 25 au 31 novembre 1901
Angers, lundi 25 novembre 1901
Le matin, cours de droit ; l’après-midi, je vais faire une visite à M. Lavallée, que je ne rencontre pas, à M. Maurice Gavouyère, que je ne rencontre pas, et à Mlle Grieschaker, que je rencontre ; je décide avec elle que je vais reprendre mes leçons d’allemands tous les 15 jours, le mardi de 4 à 5 heures. Le soir, à la Conférence Saint-Louis, admission de plusieurs nouveaux membres ; Bonnet lit un travail sur l’impérialisme anglais ; il l’intitule « Edouard VII seigneur du Transvaal ».
Angers, mardi 26 novembre 1901
Le matin, cours de droit ; l’après-midi, je vais m’entendre avec M. Pinguet, professeur de musique, au sujet des leçons de mandoline ; nous nous mettons d’accord pour prendre la leçon le lundi de 3 à 4 heures de l’après-midi. À 4 h, je vais prendre la leçon d’allemand chez Mlle Grieschaker. À 5h ¼, cours d’agriculture ; ensuite, je vais voir, à l’internat, Normand d’Authon qui est un peu malade, et De Reviers.
Angers, mercredi 27 novembre 1901
Le matin, cours de droit. L’après-midi, à 5 heures, je vais à l’escrime. Avant, j’ai eu la visite de De Reviers. Maman, fatiguée, garde le lit.
Angers, jeudi 28 novembre 1901
Le matin, cours de droit ; l’après-midi, j’aurais dû aller au cours de météorologie, mais, comme je suis bien enrhumé et que le temps est très froid, Papa ne veut pas m’y laisser aller ; de même, je ne vais pas le soir à la réunion de la Congrégation ; je me fais excuser par De Bréon.
Angers, vendredi 29 novembre 1901
Le matin, cours de droit ; le soir, à 5h, cours d’agriculture.
Angers, samedi 30 novembre 1901
Le matin, je dois dans l’impossibilité d’assister au second cours, celui de Papa, je ne sais quel étudiant nous ayant enfermés Gazeau, De Bréon et moi, dans la chambre de Gazeau à l’internat ! Malgré nos appels, on ne vient nous délivrer qu’à 10h25, c’est-à-dire tout à fait à la fin des cours ; c’est une bien vilaine farce ! Maman part pour Neuilly par le train de 10h ½. L’après-midi, je vais me confesser à l’abbé Brossard à Saint-Jacques, puis à l’escrime ; le soir, à cause de mon rhume, je n’assiste pas à la conférence Saint-Vincent-de-Paul ; Papa y va seul et, à son retour, m’annonce qu’on m’a nommé secrétaire de la Conférence.
Décembre 1901
Semaine du 1er décembre 1901
Angers, dimanche 1er décembre 1901
Le matin, je vais à la messe de communion de 8h à Notre-Dame ; l’après-midi, après une promenade du côté de la route des Ponts-de-Cé, nous allons à vêpres à Saint-Joseph.
Semaine du 2 au 8 décembre 1901
Angers, lundi 2 décembre 1901
Voulant en finir avec mon rhume, je me décide à ne pas quitter la maison d’aujourd’hui, et de plusieurs jours si c’est nécessaire ; aussi, je ne me lève ce matin qu’à 11h ; l’après-midi, je prends une leçon de mandoline au petit salon d’où je ne bouge guère d’ailleurs. Heureusement, pour me distraire, j’ai la lecture de Quo vadis ; je ne sais ce qu’on doit admirer le plus dans ce roman : de l’antithèse continue qui fait ressortir, au regard de la cruauté et de la bassesse des mœurs païennes, la douceur et l’élévation des mœurs chrétiennes ; ou du coloris si vif, du style si vigoureux, qui montre la vie romaine, tant celle des Chrétiens que celle des Païens, avec une exactitude telle que le lecteur se croit au milieu des Pétrone et des Vicinius, des Pomponia et des Lygie. Le soir, je me fais excuser par De Saint-Pern pour la Conférence Saint-Louis où Roques doit parler sur « La question canadienne ».
Angers, mardi 3 décembre 1901
Aujourd’hui encore, je ne me lève qu’à 11h ; j’achève la lecture de Quo vadis. Je reprocherais une chose à ce roman, d’ailleurs remarquable, c’est d’avoir peut-être péché contre la vérité historique en représentant trop Néron sous les traits d’un artiste, ou d’un faux artiste, qui tirait, incendiant et torturant pour se procurer des jouissances artistiques, le plaisir d’assister à des drames véritables ; je crois que Sienkiewickz a un peu trop laissé de côté les calculs politique de ce monstre dont le nom
« … sera, dans la race future
Au plus cruel tyran, une cruelle injure ».
Angers, mercredi 4 décembre 1901
Ce matin, mon rhume étant en bonne voie de guérison, je vais aux cours, l’après-midi, j’assiste à la première conférence de droit civil.
Angers, jeudi 5 décembre 1901
Le matin à 8h, à la chapelle de l’internat Saint-Clair, messe suivie du sermon du R. P. Trophime dominicain ; c’est le premier jour de la retraite, qui finira dimanche. Le P. Trophime annonce les sujets de ses discours ; il parlera sur « l’âme » ; il commence aujourd’hui en traitant « des sens » ; c’est un vrai cours de psychologie. Après le sermon, les cours de droit ont lieu, mais abrégés. L’après-midi, à 5h ¼, cours de météorologie. Le soir à 8h, à cause de mon rhume, qui n’est pas encore fini, je ne vais pas au sermon. Nous apprenons le mariage d’un de nos cousins éloignés, le baron Henry de Descallar, avec Mlle Eulalie Nissimovich, fille de M. Charles Nissimovich, secrétaire général interprète du gouverneur de Tripoli ; le mariage a été célébré le 28 octobre dernier dans l’église catholique de Tripoli de Barbarie. Le baron Henry de Descallar est fils du comte de Descallar et de la comtesse, née de Clermont. Voici comment nous sommes parents avec les Descallar : le grand-père de mon bisaïeul de Pontich, M. de Pontich, avait épousé une demoiselle de Descallar, ou plutôt de Descatllard, d’après l’ancienne orthographe du nom ; avant cette époque, le nom s’était même orthographié « dels Catllard », ce qui signifie en catalan « des échelles », ou des échelons ; aussi, les Descallar sont une des plus vieilles familles de la Cerdagne et de l’Empurdan ; aujourd’hui, ils ont subi des revers de fortune qui leur ont enlevé beaucoup de leur ancienne splendeur.
Angers, vendredi 6 décembre 1901
Le matin, à 8h, messe et instruction à la chapelle de l’internat ; ensuite, cours de droit civil. L’après-midi, à 5h, cours d’agriculture. Le soir, je vais au sermon à l’internat.
Angers, samedi 7 décembre 1901
Le matin, messe et instruction ; suivies du cours de droit administratif. L’après-midi, à 2h, cours d’agriculture ; ensuite, Marie-Thérèse et moi allons nous confesser au curé de Saint-Jacques ; puis je vais à la leçon d’escrime ; le soir, sermon à la chapelle de l’internat. Papa fixe au lundi à 4h l’heure de la conférence de droit administratif. Le programme de ma semaine se trouve maintenant réglé ainsi :
Lundi :
matin : à 8h, cours de droit civil ; à 9h ½, cours de droit criminel
soir : à 4h, conférence de droit administratif ; à 5h ¼, cours d’agriculture ; à 8h, réunion de la Conférence Saint-Louis
Mardi :
matin : à 8h, cours de droit romain ; à 9h ½, cours de droit administratif
soir : à 4h, leçon d’allemand (tous les 15 jours) ; à 5h ¼, cours d’agriculture
Mercredi :
matin : à 8h, cours de droit civil ; à 9h ½, cours de droit criminel
soir : à 5h, conférence de droit civil
Jeudi :
matin : à 8h, cours de droit romain ; à 9h ½, cours de droit administratif
soir : à 2h, leçon de mandoline ; à 5h ¼, cours de météorologie (jusqu’au 1 janvier seulement) ; à 8h, réunion de la Congrégation de Notre-Dame de l’Annonciation
Vendredi :
matin : à 8h, cours de droit civil ; à 9h ½, cours de droit criminel
soir : à 5h ¼, cours d’agriculture ; de temps en temps, visite à la ferme de la Sermonnerie dans l’après-midi du vendredi. Souvent, à 8h, conférence publique dans la grande salle de l’Université
Samedi :
matin : à 8h, cours de droit romain ; à 9h ½, cours de droit administratif
soir : à 2h, cours d’agriculture ; à 5h, leçon d’escrime ; à 8h, réunion de la Conférence Saint-Vincent-de-Paul de la paroisse Saint-Serge, au presbytère de Saint-Serge
Dimanche :
tous les 15 jours (sauf empêchement), au Patronage Saint-Serge, je surveille les enfants.
Angers, dimanche 8 décembre 1901
Le matin, je vais avec Papa à la messe de communion qui clôture la retraite à la chapelle de l’internat. À 3h, à vêpres à la cathédrale, j’assiste à la procession de foi et au serment des professeurs de l’Université en robe ; enfin, le soir, à la salle de place Saint-Martin, à la réunion générale des conférences de Saint-Vincent-de-Paul
Semaine du 9 au 15 décembre 1901
Angers, lundi 9 décembre 1901
Le matin, cours de droit civil et de droit administratif (celui-ci à cause du cours de M. Bazin, qui est absent). Au cours de Papa, on fait beaucoup de tapage ; les principaux auteurs de ce tapage sont Roussier[156] et De Beauregard. Le soir, à 4h, conférence de droit administratif ; à 5h, cours d’agriculture ; et à 8h, réunion de la Conférence Saint-Louis où on entend une conférence de l’abbé Thomas sur « Les caisses rurales ». Je présente à la conférence Richard de Reviers de Mauny, qui sera reçu à la prochaine séance.
Angers, mardi 10 décembre 1901
Cours de droit romain et de droit administratif. Roussier, De Beauregard et Roques font énormément de bruit malgré les observations de Papa ; Papa est obligé de faire sortir Roussier ; il fait un rapport au doyen sur son cas. L’après-midi, à 4h, leçon d’allemand ; à 5h ¼, cours d’agriculture. Maman arrive de Neuilly par le train de 8h35.
Angers, mercredi 11 décembre 1901
Le matin, cours de droit civil et de droit administratif (toujours pour remplacer M. Bazin) ; De Beauregard ne vient pas au cours ; Roussier, qui arrive au milieu du cours, est mis à la porte immédiatement et prié de ne revenir qu’avec un mot du doyen. On cause moins que les jours précédents ; mais, malgré la défense expresse de Papa, on fait rouler des boules tout le temps du cours, si bien que Papa, après plusieurs observations très sévères, est obligé d’interrompre le cours ; c’est une situation intenable ! L’après-midi, à 5h, conférence de droit civil.
Angers, jeudi 12 décembre 1901
Ce matin, au cours de Papa, on s’est tenu un peu mieux, grâce à la précaution qu’a eue Papa d’expulser Roussier qui venait sans la permission du doyen ; cependant, vers le milieu du cours, éclate la sonnerie d’un réveil caché sous la tribune. L’après-midi, à 3h, leçon de mandoline ; à 4h ½, je vais prendre le thé chez De Reviers ; à 5h ¼, cours de météorologie.
Angers, vendredi 13 décembre 1901
Avant le cours de Papa, De Beauregard, Roques et Condoyer qui étaient en train de déranger la tribune, sont surpris par l’appariteur ; celui-ci, ayant voulu les obliger à la remettre en place, De Beauregard l’a insulté ; l’appariteur est allé alors chercher le doyen, qui a pris les noms des coupables ; ils auront sans doute une sévère punition qu’ils n’auront pas volée. Pendant le cours de Papa, il y a eu plus de calme à cause de l’absence de Roussier et de De Beauregard. L’après-midi, à 3h, je vais faire une visite à De Solis y Desmaisières[157], l’élève espagnol de l’école d’agriculture, je ne le rencontre pas. À 5h ¼, cours d’agriculture.
Angers, samedi 14 décembre 1901
Le matin, cours de droit (celui de Papa a lieu avec un calme parfait) ; à 11h, je vais me faire couper les cheveux chez Normandin. L’après-midi, à 2h, cours d’agriculture ; ensuite, je vais me confesser à Saint-Jacques ; à 5h, je vais à la salle d’escrime ; à 8h, conférence de Saint-Vincent-de-Paul, j’y donne lecture de la liste des familles secourues, que j’ai faite cette semaine.
Angers, dimanche 15 décembre 1901
Le matin, j’assiste, à 8h, à la messe de communion de la chapelle de la rue Rabelais ; je rentre vers 9h ½, et je ne ressors pas de toute la journée à cause de mon rhume qui m’a repris et qui m’empêche de respirer par le nez et me gêne beaucoup pour parler.
Semaine du 16 au 22 décembre 1901
Angers, lundi 16 décembre 1901
À cause de mon rhume, je ne me lève que vers 11h ; je ne quitte pas la maison, je me distrais par la lecture de diverses études du Correspondant, notamment une étude sur l’origine de la « Liberté de conscience et des cultures » du vicomte de Meaux ; une autre sur un recueil de lettres de Bismarck ; une 3e sur le « Monument de Turenne à Salsbach » ; une 4e enfin, sur le sauvetage des diamants de la couronne en mars 1815 au moment du retour de Napoléon. Une dépêche de l’oncle Xavier arrivée ce matin nous annonce son arrivée pour demain soir. Maman et Marie-Thérèse vont, à la salle de la rue des Quinconces, à un concert où on entendra Botrel et sa femme, au profit de l’achèvement de l’église Notre-Dame.
Angers, mardi 17 décembre 1901
Je ne quitte pas encore aujourd’hui la maison. L’oncle Xavier arrive ici (à 4h35), après avoir passé 3 semaines de permission en Roussillon pour ses affaires. Il reçoit une lettre lui annonçant que sa fille Madeleine est souffrante, ce qui va l’oblige à repartir dès demain, au lieu d’après-demain, comme il en avait l’intention.
Angers, mercredi 18 décembre 1901
Je vais au cours ce matin ; à 5h, nous accompagnons l’oncle Xavier à la gare ; il sera à Paris ce soir ; et il en repartira demain dans l’après-midi pour arriver à Verdun demain à 10h du soir.
Angers, jeudi 19 décembre 1901
Le matin, cours de droit ; l’après-midi, à 2h leçon de mandoline de M. Pinguet ; à 5h, cours de météorologie de M. Couette.
Angers, vendredi 20 décembre 1901
Le matin, cours de droit ; l’après-midi, à 5h ¼, cours d’agriculture.
Angers, samedi 21 décembre 1901
Le matin, cours de droit. L’après-midi, à 2h, cours d’agriculture ; à 8h, à l’Université dans la grande salle de conférences, séance solennelle de la Conférence Saint-Louis. M. Lerolle, député de Paris[158], vient la présider ; le programme était celui-ci : d’abord allocution du président, comte Henry de Saint-Pern ; rapport du secrétaire, Jacques Hervé-Bazin, sur les travaux de l’année dernière ; discours de M. René Bazin ; discours de M. Lerolle. Mais M. Lerolle, ayant manqué la correspondance au Mans, n’arrive que vers 9h ; aussi on commence par lire le rapport ; M. Lerolle arrive lorsqu’il en est à plus de la moitié ; M. de Saint-Pern lui souhaite ensuite la bienvenue ; puis M. René Bazin lit un fort joli discours sur les genres de travaux abordés aujourd’hui par les jeunes gens ; enfin, M. Lerolle prononce son discours ; il dit que les catholiques étant, en France, l’immense majorité, doivent reprendre la place qui leur es due, d’autant plus qu’eux seuls peuvent résister à la désagrégation de la société dont les assises – idées de patrie, de famille et de propriété – sont si fortement ébranlées aujourd’hui. M. Lerolle compte sur les jeunes gens pour réaliser cette œuvre de justice et de salut national. Ce discours a été vigoureusement applaudi.
Angers, dimanche 22 décembre 1901
Le matin, à 8h ½, dans la chapelle de l’externat Saint-Maurille, j’assiste à la première messe de M. l’abbé Joseph Henry, frère de l’enseigne de vaisseau Paul Henry mort l’année dernière à la défense du Peï-Tsang et fils de M. Henry, professeur à l’Université catholique. M. l’abbé Henry, ordonné hier par l’évêque de Saint-Brieuc, a voulu venir célébrer sa première messe dans la chapelle de l’externat où il a été élevé ; il a autour de lui beaucoup d’amis de sa famille. L’après-midi, j’assiste avec Papa à une séance du Patronage Saint-Serge ; on y joue une comédie, le Moulin du chat qui fume, et un drame Les mémoires du diable.
Semaine du 23 au 29 décembre 1901
Angers, lundi 23 décembre 1901
Le matin, cours de droit ; l’après-midi, à 1h ½, je vais me confesser à M. Brossard, à Saint-Jacques. À 3h moins le quart, je vais avec Maman faire une visite à Mme des Loges, puis chez Mme Gavouyère ; ensuite, je vais à la conférence de droit administratif, puis au cours d’agriculture. Le soir à 8 heures, à la Conférence Saint-Louis, conférence de Roger de Bréon sur « Les États-Unis d’Europe ».
Angers, mardi 24 décembre 1901
Le matin, à 7 heures, je vais à la messe à Notre-Dame où je communie ; ensuite, cours de droit. L’après-midi, malgré une véritable tempête, Maman, Marie-Thérèse et moi nous allons faire une visite à Mme Hervé-Bazin ; à 4h, leçon d’allemand ; à 5h ½, cours d’agriculture ; le soir, nous veillons en attendant l’heure d’aller à la messe de minuit à Saint-Joseph, nous y allons à 11h ¼ en voiture.
Angers, mercredi 25 décembre 1901 (Jour de Noël)
Après la messe de minuit, où nous avons communié, nous réveillonnons ; puis je me couche et je ne me lève qu’à 10 heures. Je reçois une lettre de Xavier me disant qu’il a appris que M. Lafarge, d’Angers, a l’intention d’acheter une voiture automobile Mars ; il me prie d’aller trouver M. Lafarge, de lui faire adresser la commande à lui ; il touchera ainsi une commission que nous partagerons ; je vais voir M. Lafarge à 2h, malheureusement, la commande est déjà fate par l’intermédiaire d’une maison d’Angers, j’en suis pour mes frais ! Nous allons à vêpres à Saint-Joseph.
Angers, jeudi 26 décembre 1901
Le matin, cours de droit. L’après-midi, à 2 heures leçon de mandoline. Par le courrier de 4 heures, Papa reçoit une lettre de M. Le Marois lui annonçant que la Chambre civile de la Cour de Cassation a cassé, mardi dernier, l’arrêt de la Cour de Montpellier qui nous était favorable, dans l’affaire en demande de rectification d’actes de l’État-civil de la famille Lazerme[159]. Il ne nous dit pas devant quelle cour d’appel l’affaire est renvoyée ; quoiqu’il en soit, et bien que cet arrêt ne tranche qu’une question de droit, il est bien ennuyeux d’avoir encore longtemps à nous préoccuper de cette affaire où nous ne sommes que partie jointe. Le soir, à 8h, j’assiste à la réunion de la Congrégation, rue Rabelais.
Angers, vendredi 27 décembre 1901
Le matin, cours de droit ; après les cours, examen d’agriculture par M. Lavallée, en présence du P. Vétillart, je m’en tire passablement. L’après-midi, à 5h ¼, cours d’agriculture. À 8h ¼, nous assistons à une conférence du Recteur des Facultés, Mgr Pasquier, sur « Les principaux étonnements d’un voyage autour du monde ». Mgr Pasquier qui, en sa qualité de supérieur général du Bon Pasteur, a fait l’an dernier le tour de la terre en passant par l’Inde, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis d’Amérique, pour inspecter les deux cents et quelques maisons de cet ordre qui sont répandues sur la surface du globe, nous lit un charmant travail, dans un style très doux et souvent émaillé de citations classiques sur les « principaux étonnements » que cet énorme voyage lui a fait éprouver. Mgr Rumeau assistait à la conférence ; Maman, fatiguée, avait été obligée de se coucher de bonne heure, et n’a pas pu y venir.
Angers, samedi 28 décembre 1901
Le matin, cours de droit, les derniers avant le jour de l’an, car c’est aujourd’hui que nous entrons en vacances. L’après-midi, à cinq heures, je vais à l’escrime ; à 8h, conférence de Saint-Vincent-de-Paul, où je propose d’admettre plusieurs familles de la part de M. Jac ou du P. Carron.
Angers, dimanche 29 décembre 1901
Le matin, nous allons à la grand’messe à Saint-Joseph ; l’après-midi, jusqu’à 5 heures, je reste au Patronage où je surveille les enfants. Je rentre ensuite et j’écris des lettres du jour de l’an jusqu’au moment de dîner.
Semaine du 30 au 31 décembre 1901
Angers, lundi 30 décembre 1901
Ce matin, je me lève tard, comme il convient quand on est, pour peu de temps, en vacances. Dans la journée, j’écris un grand nombre de lettres. Philomène arrive ce matin pour 5 jours.
Angers, mardi 31 décembre 1901
Je me lève encore assez tard ; j’écris quelques lettres. Le soir, je vais me confesser avec Marie-Thérèse, à Saint-Jacques. Le soir, au moment de dîner, vient le moment des étrennes ; Marie-Thérèse, Philomène et moi nous nous sommes cotisés pour offrir un petit objet à Papa et Maman. Nous voilà donc arrivés au terme de cette 1ère année du XXe siècle. Elle est navrante pour notre patriotisme et notre foi ! Un gouvernement de dictateurs sans vergogne et sans honneur s’est employé toute l’année à démolir l’esprit de discipline dans l’armée et a détruit la liberté des congrégations par la loi néfaste du 1er juillet, qui organise la liberté d’association pour tout le monde, sauf pour elles. La liberté d’enseignement, déjà atteinte par la loi sur le contrat d’association, est menacée d’être brutalement supprimée par différents projets d’initiative parlementaire. Ce n’est qu’à l’extérieur que nous avons eu quelques consolations, par le règlement de la question chinoise où les propositions de la France ont formé la base de l’accord des puissances, et par la démonstration contre la Turquie qui a montré que nous saurions faire respecter les droits de nos compatriotes et surtout notre protectorat religieux. L’année 1902, qui nous apportera les élections législatives, mettra-t-elle enfin, à la place de cette république dreyfusarde, un gouvernement honnête et patriote ? L’avenir nous le dira.
[1] Les conférences sont des cercles d’étudiants catholiques. La Conférence Saint-Louis a été fondée à Angers en 1886 par Ferdinand Hervé-Bazin (1847-1889), beau-frère du célèbre écrivain René Bazin (dont il sera question plus loin) pour accueillir les élèves des facultés catholiques. Elle organisait des lectures publiques et des conférences (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[2] Il s’agit de Jean Gavouyère (Rennes, 11 octobre 1839-Angers, 19 février 1909), doyen de la Faculté catholique de droit d’Angers, marié à Adrienne Chemin, et de son fils Maurice (Rennes, 6 décembre 1866-Les Ponts-de-Cé, 4 août 1951), avocat, secrétaire des Facultés catholiques de l’Ouest (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[3] Il s’agit très certainement de la famille de René Bazin (Angers, 26 décembre 1853-Paris, 20 juillet 1932), professeur de droit à la Faculté catholique d’Angers, romancier, membre de la Société d’agriculture, sciences et arts d’Angers en 1880, qui sera élu membre de l’Académie française en 1903. Il avait épousé en 1876 Aline Bricard (1855-1936), d’où 8 enfants. Il sera souvent question de cette famille ici (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[4] Élisabeth Bazin (Angers, 9 octobre 1879-Lyon, 13 décembre 1926), première fille de René Bazin dont il est question dans la note précédente, épousa le 5 janvier 1901 en l’église Saint-Laud de Tours l’architecte lyonnais Antoine Sainte-Marie Perrin (1871-1928), fils de Louis Perrin dit Sainte-Marie Perrin (1835-1917), auteur notamment de la basilique de Fourvière. Ils n’eurent pas de postérité (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[5] Joseph Rumeau (Tournon-d’Agenais, 11 janvier 1849-9 février 1940), évêque d’Angers de 1898 à sa mort (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[6] René Ferdinand Nicolas Marie Bazin (devenu René-Bazin en 1922 ; Angers, 11 mai 1877-23 mai 1940), fils aîné de l’auteur René Bazin évoqué dans une note plus haut. Polytechnicien (1897), il fut industriel dans l’électrécité. Son épouse Madeleine Gain, née à Angers en 1880, était la fille de Louis Gain, bâtonnier de l’ordre des avocats de cette ville et procureur de la République (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[7] Alphonse Pierre Marie Favier du Perron (Marsannay-la-Côte, Côte d’Or, 22 septembre 1837-Pékin, 4 avril 1905), prêtre lazariste, missionnaire à Pékin depuis 1862, vicaire apostolique de Pékin en 1898. ’est lui qui négocie le décret impérial du 15 mars 1899 sur les relations des évêques avec les autorités civiles chinoises. Il assiste à la révolte des Boxers et dirige la défense du quartier du Pé-Tang lors du siège du 13 juin au 16 août 1900 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[8] Le Pé-Tang ou Beitang (chinois : 北堂 ; litt. « cathédrale du nord »), de son nom officiel cathédrale de Xishiku (chinois traditionnel : 西什庫天主堂 ; chinois simplifié : 西什库天主堂), également connue sous le nom de cathédrale Saint-Sauveur ou église Saint-Sauveur (chinois : 救世主堂), est une ancienne cathédrale du Pékin impérial de la fin du XIXe siècle. Il est situé à l’intérieur de l’enceinte de la Cité impériale. En 1900, lors de la révolte des Boxers, il a été assiégé du 6 juin au 16 août, au cours de violents combats. L’édifice est affecté désormais à l’organisation chinoise de l’association patriotique qui n’est pas reconnue par Rome. (Wikipédia ; note de l’éditeur, S. Chevauché).
[9] Paul Henry (Angers, 11 novembre 1876-tué lors de la défense de la cathédrale du Pé-Tang le 30 juillet 1900). René Bazin a rédigé une plaquette en son hommage, publiée à Tours en 1900 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[10] La reine Victoria est décédée le 22 janvier 1901. Son fils Édouard VII lui succède comme roi d’Angleterre, jusqu’à sa propre mort en 1910 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[11] Il s’agit probablement d’Arthur de Lancrau, comte de Bréon (1843-1903), capitaine d’artillerie, marié à Marthe de Certaines (1857-1914), dont le fils Roger de Lancrau de Bréon (1882-1934) était de la même génération qu’Antoine d’Estève de Bosch. Famille vivant à Bréon, commune de Marigné-Peuton, Mayenne, à 48 au nord d’Angers (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[12] Certainement Jacques Hervé-Bazin (Angers, 22 juillet 1882-Le Kremlin-Bicêtre, 10 septembre 1944), fils de Ferdinand Hervé et de Marie Bazin et neveu de l’écrivain René Bazin, souvent cité ci-dessus. De la même génération qu’Antoine d’Estève de Bosch, il fut lui-même magistrat et professeur à l’Université catholique d’Angers. Marié en 1909 à Paule Guilloteaux, ils sont les parents du célèbre écrivain Jean-Pierre Hervé-Bazin dit « Hervé Bazin » (1911-1996) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[13] Charles Guillaume Buston (né à Bordeaux le 18 juillet 1848), professeur à la Faculté catholique de droit d’Angers, marié dans cette ville le 14 septembre 1878 avec Marie Marthe Belleuvre. Leur fils, Paul Buston (Angers, 25 août 1879-1964) fut colonel d’artillerie (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[14] Il s’agit très certainement de la Congrégation de la Très Sainte-Vierge. L’année 1901 fut marquée par d’âpres débats sur les congrégations, donnant lieu à une loi au mois de juillet – dont il sera question plus loin – puis, plus tard, sur la fameuse loi de 1904 interdisant les congrégations en France (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[15] Il s’agit peut-être de Marie Bouvier (Angers, 25 mars 1849-14 octobre 1929), mariée le 18 avril 1871 à Angers avec Valentin Huault-Dupuy (Angers, 30 octobre 1844-23 novembre 1912), membre de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts d’Angers, avocat et propriétaire terrien (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[16] Il s’agit du discours prononcé à la Chambre par Pierre Waldeck-Rousseau (1846-1904) en février 1901 au moment de la présentation de sa loi sur les congrégations, qui sera votée en juillet de la même année (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[17] Peut-être Louis Vachez (Déols, Indre, 5 avril 1884-Nantes, 6 mai 1969), fils d’Alfred Vachez et Valentine Moulin, qui sera architecte et épousera en 1925 à Angers Marthe Bigot (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[18] André de Joly (Paris, 26/1/1857-6 avril 1934), chef de cabinet de différents ministres de la IIIe République, fut nommé en 1893 préfet de la Creuse, puis de la Vendée (1895), de Saône-et-Loire (1899), du Maine-et-Loire (1900) puis des Alpes-Maritimes (1904) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[19] Très certainement Marie Le More (Chantenay, Sarthe, 21 mai 1855-Le Mans, 11 juin 1923), mariée le 22 novembre 1877 à Chantenay avec Charles Loir-Mongazon (Cholet, 9 juillet 1848-Paris, 17 février 1887), professeur à l’Université catholique d’Angers. Leurs deux filles, mentionnées plus haut lors d’un bal – voir 17 janvier 1901 –, Cécile et Thérèse, épouseront respectivement MM. Chassin du Guerny et de Sars (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[20] Ce journal de tendance républicaine, intitulé Le Patriote. Journal démocratique de l’Ouest, parut à Angers de 1870 à 1917 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[21] Henri de Saint-Pern (Angers, 12 octobre 1874-16 janvier 1945), fils d’Henri de Saint-Pern et de Sophie Espivent de La Villesboisnet, marié le 16 avril 1907 à Paris avec Gabrielle de Robien. Propriétaire agricole et châtelain de la Bourgonnière, il sera conseiller général et élu député du Maine-et-Loire en 1936 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[22] Plusieurs membres de cette famille pourraient correspondre à ce personnage. Il s’agit peut-être de René de Monti de Rezé (Rezé, Loire-Atlantique, 30 juillet 1848-Saint-Aubin-le-Cloud, Deux-Sèvres, 22 octobre 1934), ancien zouave pontifical et auteur de souvenirs sur le comte de Chambord (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[23] En 1901, le directeur de ce journal était Henry Jagot (1858-1933), qui écrira en 1914 un livre sur les origines de la guerre de Vendée (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[24] Certainement Raoul du Réau de La Gaignonnière (château de Barot, Montevrault-sur-Èvre, Maine-et-Loire,30 septembre 1855-Angers, 1er novembre 1855), fils de Zacharie, comte du Réau de La Gaignonnière, ancien zouave pontifical, et de Marie-Thérèse de Quatrebarbes. Licencié en droit, il publia en 1901 un livre intitulé L’Anjou et la défense du Saint Siège en 1860 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[25] Prosper Philippe Augouard (Poitiers, 16 septembre 1852-Paris, 3 octobre 1921), ancien zouave pontifical, missionnaire français de la Congrégation du Saint-Esprit, second évêque responsable du Congo français et de l’Oubangui (1890-1921). Il est une figure importante de l’alliance entre le pouvoir civil et religieux dans l’entreprise de colonisation républicaine, et a été surnommé « l’apôtre du Congo » (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[26] Paul Normand d’Authon (Grenoble, 21 février 1873-Angers, 25 novembre 1932), administrateur d’hospices et historien amateur. Il avait épousé en 1902 Gabrielle Hervé (1872-1945), fille de Ferdinand Hervé et de Marie Bazin, et nièce de René Bazin cité plus haut (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[27] Voir plus haut note du 6 janvier 1901. Maurice Gavouyère (Rennes, 6 décembre 1866-Les Ponts-de-Cé, Maine-et-Loire, 4 août 1951), avocat et secrétaire des Facultés catholiques de l’Ouest, avait épousé le 23 janvier 1889 à Rennes Mathilde Beaufils (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[28] Il s’agit peut-être d’Antoine de Ponnat (Gueugnon, Saône-et-Loire, 12 juin 1840-Rigny-sur-Arroux, même département, 30 septembre 1905), écrivain, mais il est surprenant que ce personnage ait participé à la Conférence Saint-Louis car il était libre penseur et anticlérical (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[29] Il doit certainement s’agir de Jeanne Guillemot de La Villebiot (Chevillé, Sarthe, 23 juillet 1881-Bazougers, Mayenne, 14 février 1953), fille de Georges Guillemot de La Villebiot, capitaine d’infanterie, et de Marie Lemonnier de Lorière, qui épousera le 27 octobre 1902 à Angers Louis-Marie de Guibert (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[30] Paul Baugas (Saint-Denis-la-Chevasse, Vendée, 19 octobre 1861-Banneville-la-Campagne, Calvados, 10 août 1948), professeur à l’Université libre d’Angers, membre titulaire de la Société d’agriculture, sciences et arts d’Angers (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[31] Léonce Gontard de Launay (né à Nantes le 2 décembre 1859), issu de la noblesse angevine et vendéenne, généalogiste, membre de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts d’Angers, auteur de plusieurs ouvrages de généalogie angevine. Il avait épousé en 1883 Yvonne de Bruc de Montplaisir, dont il divorcera en 1906 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[32] Il s’agit de l’un de ses plus célèbres ouvrages : Les Oberlé, publié en 1901 chez Calmann-Lévy, qui fut vendu à 18.000 exemplaires à sa sortie, et ouvrit à son auteur les portes de l’Académie française (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[33] Jacques Dodard des Loges (Doué-la-Fontaine, Maine-et-Loire, 28 décembre 1881-Angers, 10 décembre 1954), fils de Louis Dodard des Loges et de Madeleine de Place. Il épousera en 1907 Gersinde Le Beschu de Champsavin (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[34] Il s’agit de la loi du 1er juillet 1901, qui régit encore à l’heure actuelle le statut des associations en France. Les débats à la Chambre, très houleux portaient sur les statuts des congrégations, devant devenir des associations religieuses (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[35] Il s’agit de sa grand-mère maternelle, Antoinette de Pontich (1835-1924), veuve d’Auguste Lazerme. Voir supra notes de la partie introductive (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[36] Paul Féron-Vrau (1864-1955), issu d’une famille de Lille, journaliste dans la presse catholique de sa région natale, reçut La Croix des mains des Assomptionnistes en 1900, à l’issue de l’Affaire Dreyfus, et fut étroitement mêlé aux rapports entre le Vatican et la IIIe République (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[37] Etienne Lamy (Cize, Jura, 2 juin 1845-Paris, 9 janvier 1919), avocat, journaliste et homme politique, ancien député du Jura, à la fois catholique et républicain. Il sera élu membre de l’Académie française en 1905 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[38] Marie Estève (1853-1926), mariée à Gaëtan Civelli (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[39] Il s’agit d’un catalanisme pour « arquimesa », un meuble équivalent à un cabinet (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[40] Henry des Cordes (1877-1949), fils de Georges des Cordes et de Nathalie d’Auberjon, était le frère aîné de Marguerite-Marie des Cordes (1879-1952), qui avait épousé en 1900 Xavier Civelli de Bosch, comme cela a été indiqué dans la partie introductive du journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[41] Joseph de Lazerme (1846-1922), cousin germain de la mère d’Antoine d’Estève de Bosch, avait engagé une procédure pour ajouter une particule à son nom et faire reconnaître en France le titre de comte de Lazerme qui lui avait été attribué par le prétendant carliste au trône d’Espagne. Cette affaire est largement documentée dans le Fonds Lazerme des Archives départementales des Pyrénées-Orientales (cote 57J).
Pierre Le Marois (1854-1918), avocat au Conseil d’État et à la Cour de Cassation, avait épousé en 1879 Fernande de Jacomel de Cauvigny, cousine germaine de Joseph de Lazerme par sa mère née Delon de Marouls (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[42] Il s’agissait d’une fabrique d’automobiles où travaillait Xavier Civelli, cousin germain d’Antoine d’Estève de Bosch (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[43] Il s’agit d’Albert Lazerme (Sisteron, 24 octobre 1856-Paris, 21 septembre 1913), fils d’Henri Lazerme et d’Amélie Fichet, et cousin germain de Suzanne Lazerme, Mme d’Estève de Bosch. Albert Lazerme, entré à Saint-Cyr en 1875, sous-lieutenant puis lieutenant d’infanterie, fera sa carrière dans le contrôle de l’armée, terminant administrateur de 1ère classe au Ministère de la Guerre. Il avait épousé le 7 mai 1888 à Perpignan Jeanne Génin (1864-1927), dont il eut quatre enfants : Suzanne Lazerme (née en 1889), Madeleine (née en 1891), Amélie (1894-1900) et Jean (né en 1902), dont il sera question par ailleurs dans le journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[44] Joseph Cornet (Rodès, 10 avril 1885-Perpignan, 27 avril 1953), fils aîné de Joseph Cornet et d’Isabelle Ribes. Son père était le fils de Rosalie de Bosch, sœur de Sophie de Bosch, grand-mère de l’auteur du journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[45] Léon de Barescut (1825-1907), ancien directeur de l’enregistrement, était le cousin issu de germains de Sophie de Bosch, citée dans la note ci-dessus. Il eut neuf enfants, parmi lesquels Maurice de Barescut (1865-1960), futur général (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[46] Maurice d’Estève de Bosch (Perpignan, 14 octobre 1878-disparu au combat de Deir Koush, Syrie, 8 janvier 1921), chef d’escadrons de cavalerie, fils de François-Xavier d’Estève de Bosch (1851-1938) et de Marie de Terrats (1855-1939), cousin germain d’Antoine, dont il sera question à de nombreuses reprises dans le journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[47] Armand de Terrats (Bordeaux, 4 février 1851-Paris 9e, 11 juin 1907) était le fils d’Antoine de Terrats et d’Emma Jaume, morte dans l’incendie du Bazar de la charité en 1897. Sa sœur Marie de Terrats avait épousé François-Xavier d’Estève de Bosch. Armand de Terrats fut artiste peintre à Paris et mourut célibataire. Il est cité dans certaines revues d’art contemporain mais ses productions semblent perdues (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[48] Joachim du Plessis de Grenédan (Rennes, 31 janvier 1870-Bégrolles-en-Mauges, Maine-et-Loire, 1er septembre 1951), dit le comte du Plessis de Grenédan, fils de Charles du Plessis de Grenédan et de Marie-Caroline Frilet de Châteauneuf, d’abord avocat à Rennes, fit l’essentiel sa carrière comme professeur de droit à l’Université catholique d’Angers, dont il fut le doyen. Marié en 1889 à Louise Louërat, il rentra dans les ordres après son veuvage (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[49] Il s’agit de Paul Magué (1849-1912), commandant du génie et futur général de brigade, époux de Joséphine Lazerme. Voir chapitre introductif du journal supra. (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[50] Gabriel Syveton (Boën, Loire, 21 février 1864-Neuilly, 8 décembre 1904), professeur agrégé d’histoire, fondateur avec Jules Lemaître et François Coppée de la Ligue de la patrie française, dont il est trésorier. Élu député nationaliste de Paris en 1902, il participe à créer le groupe républicain nationaliste. En 1903, il défend les congrégations et, en 1904, joue un grand rôle dans la révélation du scandale des fiches, affaire de fichage politique et religieux des militaires. Il est célèbre pour avoir souffleté le général André, ministre de la guerre en 1904. Il décide, cette même année, que la Ligue de la patrie française rompra ses liens avec Edouard Drumont, considérant que l’antisémitisme était dommageable au mouvement nationaliste. Sa mort, par intoxication au monoxyde carbone, sera considérée comme suspecte (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[51] Pierre Noilhan (Geaune, Landes, 15 décembre 1952-Paris, 25 juillet 1902), avocat à la cour d’appel et journaliste, secrétaire de la Ligue de la patrie française (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[52] François Coppée (Paris, 26 janvier 1842-23 mai 1908), poète, dramaturge et romancier, célèbre pour ses poésies sur la vie parisienne populaire, membre de l’Académie française en 1884. Revenu à l’Église catholique, il fut le président d’honneur de la Ligue de la patrie française (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[53] Il s’agit très certainement de Roger du Rieu de Marsaguet (Angers, 24 avril 1880-Marseille, 28 novembre 1939), fils d’Alexandre du Rieu de Marsaguet, docteur en droit et professeur à la Faculté catholique d’Angers, ancien gouverneur des princes d’Orléans (ducs de Vendôme, de Montpensier et d’Alençon) et de Jane Stafford-Henderson. Il épousera en 1918 Bérangère Delpature (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
Il pourrait aussi s’agir de ses frères Henri (1877-1912), directeur des Mutuelles du Mans, ou Gonzague (1883-1929), bien qu’ils ne soient pas tout à fait de la même génération qu’Antoine d’Estève de Bosch (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[54] Ferdinand Brunetière (Toulon, 19 juillet 1849-Paris, 9 décembre 1906), historien de la littérature et critique littéraire, directeur de la Revue des Deux Mondes, membre de l’Académie française en 1893. Antidreyfusard mais pas antisémite, il s’opposa à Edouard Drumont (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[55] Henri de Dreux-Brézé (Paris, 22 mars 1826-13 janvier 1904), marquis de Dreux-Brézé, fils d’Emmanuel et de Marie-Charlotte de Boisgelin, marié en 1850 à Marie des Bravards d’Eyssat. Propriétaire du château de Brézé (Maine-et-Loire, au sud de Saumur), il en continua les travaux d’embellissement, sous la houlette de l’architecte angevin René Hodé (élève de Viollet-le-Duc) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[56] Voir note supra du 27 janvier 1901.
[57] Théodore Botrel (Dinan, 14 septembre 1868-Pont-Aven, 26 juillet 1925), auteur-compositeur-interprète, connu pour avoir composé La Paimpolaise (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[58] Voir supra note du 8 mars 1901.
[59] Alfred Gardey de Soos (né le 27 juin 1891 à Angers), fils de Louis Gardey de Soos (1850-1921), d’une famille originaire du Gers, et de Blanche de Falguière (1854-1908), pour sa part originaire de Toulouse. Cette famille s’était installée à Angers comme administrateur des chemins de fer. Alfred de Soos sera père jésuite (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[60] Voir supra note du 21 février 1901.
[61] Les Oberlé, voir supra note du 11 mars 1901.
[62] Bertrand de Gréaulme (né en 1857), dit le comte de Gréaulme, fils d’Alfred de Gréaulme, issu de la petite noblesse de l’Indre, et d’Ane Gaultier, avait épousé en 1884 Valérie Pintedevin du Jardin. Il avait eu trois enfants, nés entre 1886 et 1889 à Angers (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[63] Henri du Breil de Pontbriand (Rennes, 16 février 1851-Candé, Maine-et-Loire, 13 février 1929), fils d’Henri du Breil de Pontbriand et d’Adélaïde Brossays du Canfer, d’une vieille famille de la vieille noblesse bretonne. Engagé en 1870 aux Éclaireurs des volontaires de l’Ouest, il épousa en 1872 à Angers Marie Guibourd, d’une famille de propriétaires d’Angers, dont il eut cinq enfants nés à Angers entre 1873 et 1883 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[64] Jules de Falguière (né à Toulouse en 1860), fils de Louis de Falguière et de Jeanne Ledoux, chanoine, aumônier de l’hôpital militaire et de la prison militaire de Toulouse, frère de Jeanne de Falguière, Mme Gardey de Soos (voir notes du 2 et du 18 juin 1901) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[65] Jude Chauveau de Kernaëret (1841-1927), dit « Monseigneur », professeur à la Faculté des lettres d’Angers, membre de l’Académie d’Angers, fils de Joseph Chauveau de Kernaëret et de Félicité de Tredern (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[66] Albert Follenfant (né le 15 janvier 1854 à Angers), fils d’Alexandre Follenfant et d’Adèle Charon, épousa le 5 octobre 1881 à Angers Marie-Louise Poirier du Lavouër. Il était avocat à la Cour d’appel d’Angers et eut trois enfants, dont Roger Follenfant, cité plus haut (25 mai 1901) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[67] Il s’agit soit de Claire (née en 1880) ou d’Isabelle de Lancrau de Bréon, sœurs de Roger de Lancrau de Bréon (1882-1934), tous fils du comte Arthur de Lancrau de Bréon, et de Marthe de Certaines (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[68] Sabine Le Jumeau de Kergaradec (Angers, 21 octobre 1883-La Motte-Beaumanoir, Pleugueneuc, Ille-et-Vilaine, 13 juillet 1914), fille de Camille Le Jumeau de Kergaradec et d’Henriette de Place. Elle épousera en 1913 le vicomte Paul de Lorgeril (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[69] Charles Armand Marie Gilles de Fontenailles (né à Orléans le 2 mai 1880), fils de Raymond Gilles de Fontenailles (1856-15 août 1901) et de Blanche Longuet de La Giraudière. Il épousera le 27 août 1901 à Angers Marie Anne Lebouvier (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[70] Voir supra note du 2 juin 1901. Joseph Gardey de Soos (Nohic, 18 octobre 1887-Angers, 24 janvier 1942), fils de Louis Gardey de Soos et de Blanche de Falguière. Il épousera en 1912 à Angers Jeanne de Richeteau de La Coudre (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[71] Marguerite de Rouault (Poitiers, 5 août 1867-Chalandray, Vienne, 15 mars 1944), fils de Louis Alfred de Rouault et de Marie-Victoire de Pidoux, tous deux issus de familles nobles de la vielle. Elle épousa Léonce de Becdelièvre (1863-1942). Elle avait deux frères : Henry (1864-1948) et Armand (né en 1866) de Rouault.
[72] Pierre Paul Vannier (Baumé, 16 mars 1860-Canada, 30 novembre 1904). Bénédictin, moine de Solesmes, il fait partie en 1890 du groupe chargé de restaurer l’ancienne abbaye de Saint-Maur-sur-Loire, où, en tant que cellérier, il développe la culture de la vigne. Les lois de 1901 forcent les moines de Saint-Maur à émigrer en Belgique puis au Luxembourg, et de nouveau en Belgique. Il se fixe au Canada en 1912 et fonde le monastère bénédictin Saint-Benoît-du-Lac. Voir une excellente biographie : https://www.biographi.ca/fr/bio/vannier_pierre_paul_14F.html (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[73] Les Roig descendent du mariage (1764) de Thomas de Roig Dotres et de Marie de Pontich Descallar, dont le frère François de Pontich Descallar (1741-1830) est le grand-père d’Antoinette de Pontich (1835-1924), grand-mère maternelle d’Antoine d’Estève de Bosch, qu’il appelait « Bonne Maman ». Le grand-père des demoiselles mariés en 1901 était donc le cousin issu de germains de cette dernière. Les demoiselles, respectivement nées en 1879 et 1881, était les filles de Charles de Roig et de Thérèse Lacordaire (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[74] Il s’agit de Léon van den Zande (Metz, 9 mars 1865-Bussunarits-Sarrasquette, Pyrénées-Atlantiques, 2 décembre 1921), fils de Louis Ferdinand van den Zande, inspecteur des douanes, et d’Adélaïde d’Apat. Cette dernière était la fille de Clémence Sicart d’Alougny, elle-même petite-nièce de Marie-Antoinette de Sicart, épouse de François de Pontich et grand-mère de Marie-Antoinette de Pontich, grand-mère maternelle d’Antoine d’Estève de Bosch. Cette parenté est expliquée plus loin par ce dernier. Léon van den Zande épousa le 28 septembre 1901 à Bordeaux Édith de Rolland (1874-1966), fille d’Albert de Rolland et de Jeanne de Baritault (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[75] Olivier Follenfant (Angers, 12 août 1882-mort pour la France au Touquet le 22 mai 1940), saint-cyrien et colonel de cavalerie, fils d’Albert Follenfant et de Marie-Louise Poirier du Lavouër, épousera en 1938 à Paris Claire Devicque (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[76] Il peut s’agir de Berthe Lepiller, mariée en 1887 à Angers avec Gaston Jeauffreau de Lagérie, avocat, ou de sa belle-sœur Denise Thoré, mariée en 1887 à Angers avec Raoul Jeauffreau de Lagérie, colonel, membre de l’Académie des Sciences, Belles Lettres et Arts d’Angers (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[77] À partir de ce jour, Antoine d’Estève de Bosch note tous les jours le lieu où il se trouve.
[78] Georges Pasquier de Franclieu (El Biar, Algérie, 1er janvier 1847-Puymaurin, Haute-Garonne, 24 mars 1929), saint-cyrien, colonel d’infanterie. Fils de Camille Pasquier de Franclieu et de Victorine Rouher de Julliac, il avait épousé en 1882 Léonie Dougnac de Saint-Martin, dont la grand-mère paternelle, Anne Cécile Conil, était la demi-sœur de Thérèse Sérane, mère d’Auguste Lazerme, grand-père maternel d’Antoine d’Estève de Bosch (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[79] Il doit s’agir de Gustave Aron (1870-1935), juriste distingué, père du célèbre philosophe Raymond Aron (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[80] La collatio emancipati est une ancienne pratique juridique romaine qui obligeait les descendants émancipés à rapporter à la masse héréditaire les biens qu’ils avaient acquis après leur émancipation pour pouvoir participer à la succession de leur père. Elle visait à rétablir l’égalité entre les héritiers émancipés (qui n’étaient plus sous l’autorité paternelle) et les descendants non émancipés restés sous cette tutelle, car ils n’avaient pas acquis de biens en leur propre nom (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[81] La querela inofficiosi testamenti est une procédure de droit romain par laquelle les héritiers légitimes les plus proches peuvent contester un testament qui ne respecte pas leurs parts successorales minimales, en demandant sa nullité (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[82] René de Porcaro (Saint-Jouan-des-Guérets, Ille-et-Vilaine, 16 janvier 1880-Paris, 29 janvier 1922), fils de René Marie, comte de Porcaro, et d’Alix Moucet. Il épousera en 1912 Marthe de Léonard de Juvigny (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[83] Antoine du Bois de Maquillé (Morannes, Maine-et-Loire, 13 juin 1883-Angers, 23 août 1972), fils de René du Bois de Maquillé et de Marguerite de Quatrebarbes. Il épousa en 1957 Clotilde Chouviat puis en 1964 Jeanne Vinmer (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[84] Marguerite Marie Pares, épouse d’Élie Lucas. Voir note au sujet de la famille Lucas dans la partie introductive de ce journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[85] Il s’agit peut-être de Jeanne Lestre du Saussois (Semur-en-Auxois, Côte-d’Or, 24 mai 1865-Juillenay, Côte d’Or, 21 octobre 1951), fille d’Émile Lestre du Saussois et de Louis Ricard, mariée le 11 mai 1887 à Semur-en-Auxois avec François Miron (1855-1917), lieutenant-colonel de cavalerie, dont elle eut deux enfants (en 1901, elle avait trois garçons de 9, 5 et 3 ans) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[86] Il s’agit certainement de François Roumain de La Touche (Saint-Lô, Manche, 15 avril 1883-Thionville, Moselle, 14 février 1951), fils de Paul Roumain de La Touche, de la noblesse bretonne, et de Marie-Thérèse Avril de Pignerolle, pour sa part originaire d’Angers. Il épousera en 1906 à Paris Solange Girard de Vasson (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[87] Voir plus haut note du 14 juin 1901.
[88] Voie plus haut note du 23 juillet 1901.
[89] Il s’agit peut-être d’une erreur, aucun jésuite n’ayant été retrouvé dans la généalogie de la famille de Raymond Cahuzac. On note en revanche Louis Marie Casimir Félix de Roquefeuil Cahuzac (1871-1916), jésuite, fils de Félix de Roquefeuil Cahuzac et de Charlotte du Breil de Pontbriand (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[90] Henri Achard de Bonvouloir (1839-Paris, 12 juillet 1914), dit le comte de Bonvouloir, fils d’Auguste Achard de Bonvouloir et d’Henriette de La Tour du Pin Verclause. Issu de la branche cadette d’un vieille famille noble du Calvados, il épousa le 14 mai 1871 à Bagnères-de-Bigorre (Hautes-Pyrénéees) Marie-Thérèse du Pin (1849-1938) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[91] Ernest de Dax d’Axat, né le 20 décembre 1860 à Montevideo (Uruguay), marquis d’Axat, fils du marquis Albert de Dax d’Axat, diplomate, et d’Hortensia Cruz. Il épousa Marie-Antoinette de Fréjacques de Bar, d’une vieille famille bourgeoise de l’Aude. Les Dax ou d’Ax de Cessales, originaires de l’Aude, arrivèrent en Roussillon par un mariage en 1719. À la génération suivante, Jean d’Ax de Cessales épousa en 1766 Marie-Thérèse de Chiavari, héritière de terres à Ille et Bouleternère, qui se transmirent dans sa famille, par la suite fixée à Montpellier. Ange Bonaventure de Dax d’Axat (1767-1847), marquis d’Axat, arrière-grand-père de celui dont il s’agit ici, fut maire de Montpellier de 1814 à 1830 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[92] Il s’agit peut-être d’Ernest de Sarret, né à Aurillac le 1er mars 1876, fille de Louis Gabriel, vicomte de Sarret, et de Blanche du Cos de la Hitte. Il épousera en 1911 à Lavaur Elisabeth de Bermond d’Auriac. Cette piste semble plus plausible qu’un membre de la branche de Sarret de Coussergues, qui usait plutôt le titre de baron (Note de l’éditeur).
[93] Membre de la famille de Gentil Baichis de l’Aude. À cette époque, il y avait plusieurs jeunes filles de cette famille non encore mariées : Germaine (1879-1922), Lucienne (1879-1928), Pauline (née en 1880) et Marie-Henriette (née en 1881) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[94] Xavier Roux de Reilhac de Chateaurocher (4 novembre 1881-mort pour la France en septembre 1918), fils de Louis Roux de Reilhac de Chateaurocher, capitaine d’infanterie de marine, et d’Élise Motais de Narbonne (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[95] René Le Jariel des Chatelets (Le Mans, 4 juillet 1882-Paris, 17 décembre 1963), fils d’Alexandre Le Jariel des Chatelets, d’une famille originaire d’Ernée (Mayenne) et de Marie Mordret (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[96] Charles Aubin de La Messezière (Torchamp, Orne, 11 mai 1883-mort pour la France le 19 septembre 1918), fils d’Ernest Aubin de La Messezière, d’une famille originaire d’Ernée (Mayenne), et d’Alix Doynel de La Sausserie (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[97] Emmanuel de Chefdebien-Zagarriga (Perpignan, 25 décembre 1877-Lorgues, Var, 5 décembre 1951), prêtre puis professeur, fils de Fernand de Chefdebien-Zagarriga, industriel, et de Marie-Thérèse d’Andoque de Sériège (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[98] Il peut s’agir de plusieurs personnes : Paul de Fournas de La Brosse (1853-1914) ; Henry (1852-1921) ; Gaston (1853-1917) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[99] Henri Brard (Longueville, Seine-et-Marne, 29 juillet 1883-8 novembre 1958), fils de Jean Brard, ingénieur des Arts et Manufactures, et de Marie Eudoxie Marion. Il épousa en 1906 à Paris Louise Gourmand (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[100] Étienne Batlle (Ille-sur-Tet, 10 décembre 1859-6 décembre 1925), fils de Simon Batlle et de Marguerite Salamo, issus de deux vieilles familles d’Ille. Marié à Marguerite Boix, il fut docteur en médecine, maire d’Ille puis pharmacien à Perpignan. Conseiller général du canton de Vinça en 1889, président de la Commission de ravitaillement en 1914-1918, il fut élu député des Pyrénées-Orientales sur la liste « d’union républicaine nationale pour l’ordre et la prospérité du pays ». Il en sera question dans la suite du journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[101] Il s’agit sans doute d’Antoine de Pontich Sicart (Vinça, 5 mars 1775-4 avril 1865), fils de François de Sicart Descallar et de Marie-Antoinette Sicart de Taqui (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[102] Jules Sabaté, né à Vinça le 12 avril 1843, fils de Michel Sabaté et de Thérèse Badrignans, avait épousé le 13 juillet 1871 à Vinça Constance Batlle, née à Vinça le 11 juillet 1850, fille de Constant Batlle et d’Angélique Jonquères. Par sa grand-mère paternelle, Joséphine Ballessa, il était le cousin éloigné de la grand-mère d’Antoinette d’Estève de Bosch, Antoinette de Pontich, elle-même fille d’une Ballessa (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[103] Louis Philippe de Durfort (1733-1800), comte de Deyme, colonel du Régiment de Chartres infanterie, était le fils de Nicolas de Durfort et de Marie Agnès de Curzay de Bourdeville. Il fut portraituré par Carmontelle en 1760. Il semble qu’il y ait ici une erreur : Saint-Cyr était un établissement qui admettait des jeunes filles de la noblesse pauvre ; il est peu probable que le marquis de Durfort ait correspondu pour faire rentrer sa mère dans cette maison (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[104] Les Barrera sont une ancienne famille bourgeoise d’Ille dont les biens parvinrent par héritage à la famille Folcra puis à la famille Boscha, dont descendent les Semaler puis les Bosch, ancêtre des Estève de Bosch. Le document dont Antoine d’Estève de Bosch mentionne l’existence ne figure plus dans les archives de famille, où l’on trouve néanmoins de nombreux documents de la famille Barrera (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[105] Il s’agit de Josep Pontich i Selva, burgès honrat de Perpignan, qui épousa en 1675 Ana Dalmau i Guanter, fille de Diego Dalmau et de Maria-Ana Guanter. C’est le grand-père de ce Josep, Miquel Pontich, originaire de Bouleternère, qui avait été inscrit le 20 février 1639 à la matricule des burgesos honrats de Perpignan à l’époque de Philippe IV d’Espagne (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[106] Joseph de Guardia (Vinça, 24 mars 1849-Perpignan, 14 juillet 1931), membre de la Garde nationale mobile des Pyrénées-Orientales, lieutenant puis capitaine, rédacteur au journal royaliste Le Roussillon, fils de Sébastien de Guardia, d’une famille noble originaire d’Arles-sur-Tech, et de Thérèse Verges, de Vinça. Il épousa le 21 mai 1883 à Marseille Marie Rose Anne Garrigue. Il avait eu deux fils : Charles de Guardia, docteur en médecine, et Albert de Guardia, licencié en droit (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[107] André Desperamons (1861-1951), avocat et directeur du journal Le Roussillon, grande figure du royalisme dans les Pyrénées-Orientales, dont il sera souvent question dans ce journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[108] Il doit s’agir d’Henri Joseph Marie Dalverny (Perpignan, 8 septembre 1840-Terrats, Pyrénées-Orientales, 28 janvier 1910), capitaine au 142e de ligne, qui avait épousé en 1876 à Terrats Thérèse Parahy, et possédait une propriété à Pézilla-la-Rivière (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[109] Il s’agit de l’actuel barrage hydro-électrique de Vinça (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[110] Voir plus loin note du 24 septembre 1901.
[111] Voir ci-dessus note du 12 avril 1901.
[112] Louis Lutrand (Perpignan, 1859-1915), fils d’Alphonse Lutrand, principal du Collège de Perpignan, et de Louise Bouis, elle-même fille de Dominique Bouis (1797-1866), qui fut, de 1837 à 1839, le 5e président de la Société Agricole, Scientifique et Littéraire des Pyrénées-Orientales. Docteur en médecine, Louis Lutrand épousa le 3 avril 1886 à Perpignan Thérèse Bonafos, née à Perpignan le 9 octobre 1860, fille d’Emmanuel Bonafos (1824-1885), médecin chef de l’Hôpital de Perpignan, et de Marie-Fanny Ribell, dont le grand-père paternel Emmanuel Bonafos (1774-1854) avait également été, de 1840 à 1841), président de la SASL. La parenté avec la mère d’Antoine d’Estève de Bosch se faisait par l’épouse de ce dernier et grand-mère de Mme Lutrand, Thérèse Lazerme, tante d’Auguste Lazerme, et donc grande-tante de la mère de l’auteur du présent journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[113] Il s’agit peut-être de Joséphine Monniot (1848-1939), épouse depuis 1876 de Jean Baptiste Noëll (1836-1898), lieutenant-colonel, issu d’une famille de propriétaires de Vinça, originaires de Valmanya et possédant aussi une demeure à Finestret, non loin de là. Leur fils cadet Louis Noëll (1885-1964), futur gouverneur des colonies, épousera en 1918 Antoinette dite « Nénette » Magué (1893-1973), cousine germaine de l’auteur du présent journal, dont il sera très souvent question tout au long de celui-ci. Les deux familles se connaissaient donc de longue date avant ce mariage (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[114] Hector de Pontich (Paris, Les Batignolles, 24 mai 1845-Paris, 29 octobre 1906), polytechnicien, lieutenant-colonel, fils de François de Pontich, chef de bataillon, et d’Elisabeth Volle, cousin germain d’Antoinette de Pontich, épouse Lazerme, grand-mère de l’auteur du journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[115] Jean Sarrète (Argelès-sur-Mer, 3 décembre 1868-Perpignan, 10 décembre 1948), curé de Palau-de-Cerdagne puis de Palau-del-Vidre, professeur à l’institution Saint-Louis-de-Gonzague à Perpignan, il finira chanoine de Perpignan et doyen du chapitre. Il est surtout connu pour avoir été un prêtre érudit et publié de très nombreux articles et monographies sur l’histoire des villages du département, collaborant notamment au Bulletin de la SASL. Ses archives personnelles sont conservées aux Archives départementales des Pyrénées-Orientales (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[116] Jules de Carsalade du Pont (Simorre, Gers, 16 février 1847-Perpignan, 29 décembre 1932), évêque de Perpignan-Elne de 1899 à sa mort, dont il sera très souvent question dans ce journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[117] Peinture à l’huile d’école catalane du XVIIe siècle, dont beaucoup de copies ont circulé, certaines étant encore possédées par la famille. Miquel Pontich, parent éloigné de la famille (Bouleternère, 20 novembre 1632-Girona, 26 janvier 1699), moine franciscain, provincial de son ordre puis, de 1686 à sa mort, évêque de l’important siège de Girona dans le Principat de Catalogne (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[118] L’établissement thermal de Nossa-les-Bains était situé approximativement à l’emplacement de l’actuel lac (artificiel) de Vinça, agrandi après la création du barrage, qui entraina la disparition de ce lieu-dit (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[119] Jean Estève (1804-1881), polytechnicien, colonel, directeur des fortifications de Perpignan (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[120] Jacques Freixe (Le Perthus, 6 juin 1845-1925), érudit ayant écrit essentiellement autour de l’histoire de son village natal. Ses archives sont conservées aux Archives départementales des Pyrénées-Orientales (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[121] Jacques Vasal (Perpignan, 21 avril 1831-24 novembre 1901), négociant, marié le 24 octobre 1864 à Perpignan avec Blanche Devaux (1842-1920) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[122] Certainement Marie-Fanny Ribell, fille d’André Ribell, maire de Perpignan (1800-1860) et de Joséphine Albar. Elle épousa le 21 octobre 1856 à Barcelone Emmanuel Bonafos (1824-1885), médecin en chef de l’Hôpital civil de Perpignan. Leur fille Thérèse Bonafos, mariée au Dr. Lutrand, est également citée dans le journal (voir ci-dessus, note du 9 septembre 1901) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[123] Voir ci-dessus note du 9 septembre 1901.
[124] Il s’agit de Caroline d’Oms (Sainte-Marie-la-Mer, 8 mai 1856-Perpignan, 30 mars 1936), dernière représentante de cette ancienne famille du Roussillon, qui avait épousé le 26 janvier 1880 à Perpignan Joseph de Llamby (1852-1904). Elle eut deux filles : Louise (1880-1910), mariée en 1905 avec Maurice Faurichon de La Bardonnie, et Isabelle (1887-1983), mariée en 1907 avec Lucien Darru. Il sera très souvent question de cette famille au cours de ce journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[125] Voir ci-dessus note du 12 avril 1901.
[126] Il doit certainement s’agir de : Denis de Thézan, Le Pouget et ses alentours. Étude historique, Paris, Ed. Léon Sault, 1882, 59 pages. Cette rare monographie est consultable dans le fonds Lazerme des Archives départementales des Pyrénées-Orientales (ADPO, 57J2).
[127] Rosalie Pallarès (née en 1841), mariée à Ille-sur-Tet le 23 février 1865 avec Jacques Terrats (né en 1841), clerc de notaire, dont la famille portait le nom de courtoisie de « Terrats d’Aguillon » (depuis le mariage à Perpignan en 1765 d’un ancêtre, Jacques Terrats, marchand, avec Louise Daguillon, fille de Pierre Daguillon, maître teinturier). Rose Terrats, fille unique du couple, avait épousé en 1887 à Ille le baron Antonin Desprès, d’où une importante descendance dans les familles Desprès, Sire de Vilar, Marceille et Viguier (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[128] Franz Adrian von Arx, né à Bâle (Suisse) le 13 juin 1869, fils de Franz von Arx et de Sophie Berges, ingénieur électricien, employé à l’usine électrique Bartissol, épousa à Vinça le 24 septembre 1901 Marie Rouyre, née à Vinça le 2 mai 1881, fille de Léger Rouyre, employé des chemins de fer, et de Rose Batlle (1857-1938), elle-même fille de Joseph Batlle et de Rose Paule d’Esprer, d’une vieille famille d’Ille (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[129] Léon de Barescut (1825-1907), cousin éloigné des Bosch par les Cornellà, d’Ille, et son épouse Mathilde Boudet de Joly, avaient eu neuf enfants, parmi lesquels Maurice de Barescut (1865-1940), général, et plusieurs filles dont deux devinrent Mmes Cristau et Delcros de Ferran. C’est de cette dernière, Thérèse (1874-1960) qu’il doit s’agir ici ainsi que de sa sœur aînée Madeleine (1862-1940), restée célibataire, l’aînée, mariée à M. Cristau, étant déjà décédée depuis 1885 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[130] La famille Roca, originaire de Prades, avait hérité de la thèse d’Huytéza de la famille Satgé, qui avait acheté cette seigneurie sous l’Ancien régime. Une branche s’était fixée à Ille au tout début du XIXe siècle par le mariage de Jean Roca et de Thérèse Moynier. Leur fils Joseph Roca (1815-1889), propriétaire à Ille, avait épousé Antoinette Bonafos (1825-1912), fille de Jean-Baptiste Bonafos et de Marie-Rose de Sampso, cousine éloignée des Bosch par une grand-mère Cornellà (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[131] Jacques Trainier, docteur en médecine dont il a été question plus haut (voir notes du chapitre introductif), fils de Madeleine de Sampso et donc cousin germain de Mme Roca citée ci-dessus, avait épousé Thérèse Batlle, de Vinça, fille de Joséphine Ballessa et donc elle aussi cousine de l’auteur du journal par le biais des Pontich de Vinça. De ce mariage étaient nées plusieurs filles : Antoinette, mariée en 1885 au docteur Simon Pons (ce sont les parents du poète Josep Sebastià Pons et de Simona Gay), Joséphine, mariée en octobre 1901 à Albert Batlle (voir plus loin, journal au 26 octobre 1901), et Marie, devenue Mme Jager (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[132] Voir plus haut, note du 19 août 1901.
[133] Voir plus haut, note du 27 août 1901.
[134] Il s’agit de l’ancienne maison des Cornellà, devenue ensuite par héritage de Bourdeville, situé à l’actuel n°25 de la Grande rue à Ille-sur-Tet (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[135] Act. Caladroy (Pyrénées-Orientales) (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[136] Auguste Delebart, né à Lille en 1840, filateur, avait épousé Lucie Pech, originaire de la Réunion, dont il avait eu quatre filles : Germaine (mariée en 1897 à Emile Vanlaer, notaire à Lille), Suzanne (mariée en 1899 à Maurice Gillotin, industriel dans les Vosges), Marcelle (mariée en 1900 à Lille avec Paul Dewavrin, négociant en coton à Tourcoing) et Renée, qui épousera Élie Talairach, négociant en vins de Perpignan, dont il sera question plus loin dans le journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[137] Il doit s’agir de Marie Ferriol, née à Millas en 1887, mariée depuis 1881 à Jean Bertran de Balanda, polytechnicien et officier d’artillerie. Par sa mère, née Marie Gelabert, elle descend de familles d’Estagel et lointainement, par sa grand-mère née Batlle, d’Estagel, des Llorens et des Estève. Ce sont ces Llorens, fixés à Pézilla, qui furent à l’origine du célèbre épisode des Saintes Hosties de Pézilla, dont il sera question plus loin (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[138] René de Chefdebien-Zagarriga (Perpignan, 1er janvier 1877-27 mars 1953), fils de l’industriel Fernand de Chefdebien-Zagarriga et de Marie-Thérèse d’Andoque de Sériège. Ingénieur des Arts et Manufactures, il épousera en 1906 Louise Bas de Cesso (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[139] Voir ci-dessus, note du 1er septembre 1901.
[140] Voir aussi plus haut note du 1er juillet 1901.
[141] Aujourd’hui L’Esparrou (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[142] Il s’agit de la maison de la rue Sainte-Croix, à Ille-sur-Tet (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[143] Voir ci-dessus, note du 29 septembre 1901.
[144] Ferdinand Trullès (1858-1918), notaire à Ille-sur-Tet, dont il sera souvent question au fil de ce journal (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[145] Josep Balalud de Saint-Jean (Ille-sur-Tet, 12 août 1846-Prades, 14 novemre 1885), fils d’Antoine Balalud de Saint-Jean et de Sophie d’Argiot de La Ferrière, avait épousé à Prades le 27 avril 1870 Marie de Romeu (Prades, 22 août 1845-Prades, février 1936), fils d’Hyacinthe de Romeu et de Joséphine Guiter (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[146] Les Boluix descendent du mariage de François-Xavier Boluix et de Marie-Grâce Lazerme en 1799. C’étaient les arrière-grands parents de Mme Marie née Joséphine Sèbe, mariés en 1885 à Perpignan (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[147] Drame en 5 actes et 7 tableaux d’Édouard Brisebarre et Eugène Nus, créée au Théâtre de l’Ambigu-Comique le 5 septembre 1856 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[148] Ernest Renauld (Vierzon, 16 octobre 1869-janvier 1939), journaliste et essayiste catholique principalement connu pour son antiprotestantisme. Royaliste mais opposé à l’Action française, il dirigera le journal Le Soleil de 1904 à 1911 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[149] Voir ci-dessus note du 21 février 1901.
[150] Voir ci-dessus note du 21 février 1901.
[151] Il s’agit certainement d’Henri de Goislard de Monsabert (Bordeaux, 25 septembre 1846-Poitiers, 30 septembre 1910), fils de Gustave de Goislard de Monsabert, et de Marie Léontine Hosseleyre, qui avait épousé en 1874 Pauline de Cumont (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[152] Guillaume Marie Joseph Labouré (Achiet-le-Petit, Pas-de-Calais, 27 octobre 1841-Rennes, 21 avril 1906), évêque du Mans puis, de 1893 à sa mort de Rennes, créé cardinal par Léon XIII en 1897. Il avait été favorable au ralliement de l’Église à la République et ne s’opposera pas à la séparation de l’Église et de l’État, mourant cependant peu après (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[153] Olivier de Durfort Civrac de Lorge (Montfermeil, 12 juillet 1863-Combourg, 27 février 1935), qui sera, évêque de Langres et de Poitiers (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[154] Louis de Maillé de La Tour-Landry (Paris, 27 juin 1860-6 février 1907), duc de Plaisance à la mort de son grand-père maternel M. Le Brun de Plaisance (titre de noblesse d’Empire), il était issu d’une vielle famille de l’Anjou. Marié depuis 1886 à Hélène de La Rochefoucauld, il fut conseiller général puis, de 1903 à sa mort en 1907, député du Maine-et-Loire (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[155] Noémie de Robin de Barbentane (1839-1914), veuve d’Henri d’Andigné (1821-1895), ancien sénateur du Maine-et-Loire et propriétaire du château de Monet à Beaufort-en-Vallée, dans ce département. Le titre de marquis, porté par un oncle, est de courtoisie dans cette branche. Onéida d’Andigné (1864-1945), restée célibataire, fille des précédents, est certainement celle qui est ici désignée comme Mlle d’Andigné (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[156] Il s’agit de Paul Roussier (Le Lion-d’Angers, Maine-et-Loire, 19 octobre 1882-Savonnières, Maine-et-Loire, 12 mars 1965), qui deviendra archiviste paléographe en 1912 (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[157] Il peut s’agir de Manuel de Solís y Desmaisières (Sevilla, 10 avril 1881-29 avril 1928) ou de son frère cadet Pedro (Cádiz, 1883-Carmona, Andalucía, 10 octobre 1945), tous deux fils de Pedro de Solís et de Mathilde Desmaisières, Marquesa de Valencina. L’aîné Manuel hérita de ce titre de sa mère (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[158] Paul Lerolle (Paris, 3 avril 1846-26 octobre 1912), conseiller général puis député de la Seine de 1898 à 1912, membre de l’Action libérale (Note de l’éditeur, S. Chevauché).
[159] Voir plus haut note du 10 avril 1901.











